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Le Pape et les tsiganes: la première fois?

Traduction d'un article paru sur Radio Vatican la veille de la rencontre de samedi (12/6/2011)

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Les (rares) medias qui en ont parlé ont récupéré la rencontre du Saint-Père avec les tsiganes pour exacerber les vieilles rancoeurs, critiquer la politique du gouvernement, et opposer les "gens du voyage" aux populations européennes qui ne pratiquent pas "l'accueil" (on verra plus loin que, selon le représentant de l'Eglise, c'est une démarche radicalement opposée qui s'impose!).
Cet article du Monde.fr est un bon exemple. Quelques mots bien choisis pour appuyer les thèses habituelles ont été extraits du discours du Saint-Père (qu'il vaut mieux lire en entier!)


Dans la même tonalité, Carlota me signale ce qu'elle a lu sur le journal espagnol El Mundo:
"[...] la réception de Benoît XVI a aussi une lecture avec une clef politique. Avec la venue au pouvoir pour la troisième fois de Silvio Berlusconi il y a deux ans et demi, l'Italie s'est transformé en l'un des pays les plus repressifs contre les gitans. Pour ne pas parler de la France dont 800 gitans ont été expulsés l'année passé par ordre du gouvernement Sarkozy (ndt: 800 expulsions ou plus exactement raccompagnement avec viatiques conséquents, sur les 12 millions de gitans de l'UE!!). Ce n'est pas pour rien qu'Antonio Maria Veglio, président du conseil pontifical pour les immigrants et organisateur de la rencontre souligne le fait que les gitans continuent à être objet actuellement de marginalisation et harcèlement".
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D'autre part, le lecteur qui lirait distraitement les seuls titres de la presse, en tirerait la certitude que c'était "la première fois". Comme si l'Eglise avait attendu hier pour se préoccuper du sort des tsiganes!
La première fois sous cette forme, certes! mais le vrai travail se fait sur le terrain, et il ne date pas d'hier.
Pour prendre du recul par rapport à ces caricatures, voici l'article de présentation paru sur Radio Vatican à la veille de l'évènement (il en était question ici: Le Pape reçoit 1500 tsiganes ).
La première partie rappelle l'évènement extaordinaire de la visite de Paul VI à un campement nomade, près de Rome, en 1965, et la béatification très significative par Jean-Paul II d'un gitan espagnol fusillé par les républicains durant la guerre civile.
La seconde est une interviewe de Mgr Antonio Maria Veglio, président du Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants. Il explique les voies de l'intégration, insistant sur le caractère de réciprocité qu'elle doit revêtir, et, en particulier, ce que l'Eglise fait sur le terrain.

Article ici: http://paparatzinger4-blograffaella
Ma traduction:

I.

Rencontre du Pape Benoît XVI avec les gitans européens
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Pour marquer le 75e anniversaire du martyre du gitan espagnol Ceferino Gimenez Malla, béatifié par le Pape Jean-Paul II le 4 mai 1997, une nombreuse représentation de gitans européens seront présents demain et dimanche, à Rome, pour le pèlerinage organisé par le Conseil Pontifical pour la Pastorale pour les Migrants et les Personnes en Déplacement. Le point culminant de la rencontre sera la rencontre prévue samedi dans la Salle des Bénédictions (aula Paul VI), entre Benoît XVI avec plus de 1.500 nomades en provenance de différentes communautés et ethnies des Roms. Une rencontre qui s'ajoute à d'autres pages denses de l'histoire.

C'est le 26 Septembre 1965, et les Tsiganes du camp installée à Pomezia reçoivent la visite de Paul VI. Papa Montini préside la messe, et durant l'homélie, il souligne combien la rencontre avec la population nomade est "quelque chose de nouveau", un "grand événement", une "découverte différente":

"Aujourd'hui, vous, comme jamais auparavant, vous découvrez l'Eglise. Vous, dans l'Eglise, vous n'êtes pas sur le bord, mais à certains égards, vous êtes au centre, vous êtes en son coeur. Vous êtes au cœur de l'Eglise, parce que vous êtes seuls: personne n'est seul dans l'Eglise; vous êtes au cœur de l'Eglise, parce que vous êtes pauvres, que vous avez besoin d'assistance, d'instruction, d'aide, et que l'Eglise aime les pauvres, les souffrants, les pauvres, les dépossédés, les abandonnés".

En ce "jour mémorable", le Pape Paul VI s'adresse à ceux qu'il appelle "chers nomades" et "chers tsiganes", avec un amour paternel. Son appel est celui d'un père aimant:
"Ayez confiance! Nous n'avons rien à vous demander, sinon que vous acceptiez l'amitié maternelle de l'Eglise. Nous pouvons faire quelque chose pour vous, pour vos enfants, pour vos malades, pour vos familles, pour vos âmes, si vous accordez à l'Église et à ceux qui la représentent votre confiance".

L'appel à ne pas avoir peur de vivre dans la lumière de l'Evangile, a rythmé la vie de Ceferino Gimenez Malla, un humble gitan espagnol fusillé en 1936, pendant la guerre civile espagnole, pour défendre un prêtre qui était sur le point d'être arrêté. Jean-Paul II l'a proclamé bienheureux le 4 mai 1997 et il l'a indiqué comme "un modèle à suivre et un exemple significatif de l'appel universel à la sainteté".

"Sa vie montre que le Christ est présent dans les différents peuples et races, et que tous sont appelés à la sainteté, qui est atteinte en observant ses commandements et en demeurant dans son amour".
La charité du Christ ne connaît pas de limites de race et de culture, et "chaque précepte - souligne Benoît XVI lors de l'Angélus du 13 Février (ici) - devient vrai comme exigence d'amour". Se référant à la nouvelles dramatique des quatre enfants roms morts brûlés dans leur caravane, le Pape souligne que "la plénitude de la loi est la charité":
"Face à cette exigence, par exemple, le triste cas des quatre enfants Roms, morts la semaine dernière à la périphérie de cette ville, dans l'incendie de leur baraquement, nous oblige à nous demander si une société plus solidaire et fraternelle, plus cohérente dans l'amour, c'est-à-dire plus chrétienne, n'aurait pas pu éviter cet événement tragique. Et cette question vaut pour toutes les autres circonstances douloureuses, plus ou moins connues, qui se produisent quotidiennement dans nos villes et dans nos pays"

Et dans cette société, la dimension itinérante du peuple tsigane est également un témoignage de liberté intérieure face à la consommation, un rappel que notre vie est un voyage continu vers un autre pays, la patrie céleste.

II.

Mais comment est née l'idée d'une rencontre entre le Pape Benoît XVI et une délégation des Tziganes européens?
L'archevêque Antonio Maria Veglio, président du Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en Déplacement répond aux questions de Rdio Vatican:
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R: L'idée est née à la suite d'un entretien privé que m'a accordé le Saint-Père Benoît XVI.
Dans sa sollicitude pour les pauvres, le Pape a exprimé une préoccupation particulière au sujet de la minorité Rom et a exprimé le désir de rencontrer les Roms au Vatican, en confiant au Conseil pontifical la promotion de l'événement. Notre dicastère a demandé la collaboration de la Fondation pour les Migrants de la Conférence épiscopale italienne, ainsi que du diocèse de Rome et de la Communauté de Sant'Egidio. A quelques jours de l'audience, on peut dire que le groupe de Tsiganes sera composée d'environ 2000 personnes également réunis à Rome pour célébrer l'anniversaire du 75e anniversaire du martyre et du 150e anniversaire de la naissance du bienheureux Ceferino Giménez Malla (1861-1936), tzigane martyr de la foi d'origine espagnole.

Q: Quelle signification revêt ce geste dans un contexte européen où de nombreux pays travaillent pour favoriser l'intégration des Roms, mais où subsistent toujours la méfiance et des épisodes anti-tsiganes?

R: Comme aime à le souligner le Saint-Père, l'Eglise a la mission d'être accueillante et d'aider les chrétiens à surmonter un sentiment de méfiance, de peur ou, pire, de rejet des Tsiganes. C'est pourquoi elle accompagne avec confiance les efforts afin que soient reconnus aux tziganes les droits des minorités. En outre, elle soutient l'authentique intégration de ce peuple et cherche à l'aider à s'intégrer dans la société tout en conservant sa propre identité culturelle.
Par ailleurs, l'Église ne cesse de rappeler qu'ils sont eux aussi appelés à assumer leurs propres responsabilités. Dans les dernières décennies, on a noté chez les jeunes tsiganes une prise de conscience de leur propre dignité, et le désir d'une plus grande implication dans les décisions qui les concernent. Il s'agit d'une réalité également perçue par le Conseil de l'Europe et d'autres organismes internationaux, lesquels offrent au peuple tsigane des programmes d'aide pour sortir de l'exclusion et participer pleinement aux droits et devoirs de la société. Certes, beaucoup reste à faire pour rendre plus fructueux les outils dont disposent les organismes internationaux et les gouvernements.

Q: Où en est le développement d'une pastorale spécifique accordée aux populations tsiganes?

R: La pastorale spécifique des Tsiganes a pour tâche fondamentale d'évangéliser et de leur porter le Christ. Mais elle ne peut se soustraire à ses responsabilités dans le domaine social et au devoir de dénoncer les conditions de pauvreté où ils se trouvent et les discriminations dont ils sont l'objet. Ensuite, face aux défis qui viennent de la communauté gitane, l'Eglise est appelée à trouver de nouveaux moyens et de nouvelles méthodes pour être efficace dans son ministère. Une des routes à parcourir, c'est d'insister sur la qualité des relations entre les Tsiganes et la société, qui doivent être fondées sur le respect mutuel, sur la connaissance personnelle, sur l'accueil et la reconnaissance des différences légitimes. Certes, ce n'est pas une tâche facile, mais des travailleurs pastoraux, des prêtres, des diacres, des religieux et des religieuses s'y emploient avec enthousiasme. Un fruit de ce travail pastoral est les vocations parmi les populations tsiganes: par exemple, depuis quelques mois en Inde, le premier évêque tsigane a été nommé, et il y a deux vicaires généraux, 25 prêtres et 30 religieuses. En effet, les Églises locales sont plus sensibles à l'égard de cette pastorale spécifique, et les congrégations religieuses et les mouvements d'Église coopérent avec les organisations internationales.

Q: Quelle est la route pour promouvoir l'intégration des Roms dans les pays européens?

R: L'intégration n'est pas un processus à sens unique. La société, ainsi que les tsiganes, doivent se montrer disponibles pour parcourir les voies du dialogue et de l'enrichissement mutuel, qui permettent de valoriser et de saisir les aspects positifs de chacun. Parmi les facteurs qui peuvent contribuer à amorcer l'intégration des tsiganes, leur permettant de participer activement à la vie sociale, économique et politique, il y a entre autres, la formation, l'éducation et la qualification professionnelle. Les gouvernements et les autorités locales leur offrent déjà la possibilité d'accéder à l'enseignement scolaire, utile à la connaissance mutuelle et à l'acceptation entre enfants tsiganes et lnon-tsiganes. L'Union européenne a lancé un programme de formation de médiateurs sociaux et culturels pour les Tsiganes. L'Eglise a joué un rôle actif dans ce domaine avec quelques congrégations religieuses et mouvements ecclésiaux. Par exemple, en Europe il y a aujourd'hui 14 communautés salésiennes qui oeuvrent à rendre les enfants et les jeunes Tsiganes protagonistes de leur propre développement humain, social et chrétien. Je peux mentionner les centres éducatifs de Bardejov et Kosice en Slovaquie, de Kazincbarczika en Hongrie, de Stara Zagora, en Bulgarie, de Havivarov en République tchèque et de Tirana en Albanie. En outre, pour favoriser l'inclusion sociale, il faut une oeuvre de sensibilisation visant à donner une image positive des tsiganes, de leur identité culturelle et de leurs valeurs, comme le sens de la famille, le respect des anciens, l'amour pour la musique, danse, etc. Comme il s'agit d'un processus qui implique deux parties, je ne me lasserai pas de dire qu'il faut également, de la part des tsiganes, une bonne dose de confiance, d'engagement et de participation.

Lettre de Paul VI à Joseph Ratzinger Rencontre avec les tsiganes