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D'Assise 1986 à Assise 2011. Le sens d'un voyage

Un article du Cardinal Bertone dans l'OR. (4/7/2011)

Voir aussi sur ce site


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Dans cet article paru dans l'OR du 7 mars dernier, et reproduit encore hier en première page (via le nouveau portail du Vatican), Tarcisio Bertone revient sur les précédentes rencontres d'Assise, notamment celles de 1986, et celles de 2002 dans le contexte très particulier de l'après 11 septembre.
Avec le souci martelé d'éviter toute interprétation syncrétiste, il explique l'esprit qui a conduit à répéter cette initiative en octobre prochain. On peut légitimement supposer que c'est "la voix du Pape".

Ma traduction.



JP II et le cardinal Ratzinger

sur le train en route vers Assise (24 Janvier 2002)

D'Assise 1986 à Assise 2011 - le sens d'un voyage
07/03/2011
L'Osservatore Romano
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Le 25 Janvier 1986, dans son homélie de la messe célébrée dans la basilique de Saint-Paul hors les Murs, le Bienheureux Jean-Paul II prononça un appel, dans le cadre de l'Année internationale de la paix proclamée par l'ONU, adressé non seulement aux catholiques ou aux croyants dans le Christ, mais aussi à ceux qui appartiennent à différentes religions du monde et à toutes les personnes de bonne volonté afin que de tous soit invoqué du Tout-Puissant le don de la paix. "Le Saint-Siège souhaite contribuer à inspirer un mouvement mondial de prière pour la paix, au-delà des frontières des nations individuelles, et impliquant les croyants de toutes religions, vienne embrasser le monde entier» (Enseignements de Jean-Paul II, 1986, vol . i, p. 198).

Par la même occasion, le Pape annonçait qu'il voulait se faire promoteur d'une rencontre spéciale qui se tiendrait à Assise, qui serait ouverte aux chefs des Églises, des communautés chrétiennes et des grandes religions du monde. Le rassemblement, qui eut lieu le 27 Octobre 1986, trouva un écho très ample parmi les opinions publiques du monde entier.
Ce qui à première vue catalysa l'attention et l'imagination de beaucoup était de voir, peut-être pour la première fois dans l'histoire, de nombreux membres des principales religions réunis.
Avec un regard plus attentif, cependant, on pouvait saisir clairement les intentions profondes qui avaient conduit le grand Pontife: en premier lieu, mettre en lumière la dimension intrinsèquement spirituelle de la paix, face à un climat culturel qui tendait à marginaliser le phénomène religieux. Les composantes de la paix sont multiples et sa construction nécessite sans doute l'engagement dans les domaines économique politique, social, par les gouvernements, les organisations internationales, les sociétés civiles. Cependant, il reste vrai que la paix est avant tout et fondamentalement, une réalité qui doit être construite dans le cœur, qui naît des plus hautes aspirations humaines.
En second lieu, le rassemblement de dirigeants de religions différentes, plaçait chacune d'elles devant la responsabilité que leurs croyances religieuses se traduisissent, sur le plan personnel et communautaire, dans le sens d'une construction effective de la paix. Il est bien connu, en effet, que dans l'histoire, l'appartenance religieuse a souvent été instrumentalisée comme un élément de confrontation et de conflit.
La rencontre de 1986 valorisa trois éléments spirituels, quoique sous des formes différentes, dans presque toutes les traditions religieuses: la prière, le pèlerinage, le jeûne.
Jean-Paul II a clairement expliqué le sens de se rassembler pour prier dans la même ville: «"Le fait que nous soyons venus ici n'implique aucune intention de rechercher un consensus religieux entre nous ou de négocier nos convictions de foi. Cela ne signifie pas que les religions peuvent être se réconcilier au niveau d'un engagement commun dans un projet terrestre qui les surpasserait toutes. Ce n'est pas non plus une concession au relativisme des croyances religieuses »(Enseignements de Jean-Paul II, 1986, t. II, p. 1252.).

Ce dernier point était d'une importance capitale: le relativisme et syncrétisme, en effet, finissent par détruire, plutôt que valoriser, la spécificité de l'expérience religieuse. Sur ce point, on est revenus à plusieurs reprises par la suite, également en raison des interprétations superficielles, qui n'ont pas manqué, cette première rencontre d'Assise. Dans la lettre à l'évêque d'Assise pour le vingtième anniversaire de l'événement, le pape Benoît XVI a rappelé que "il convient d'éviter [...] toute confusion inopportune. Par conséquent, même lorsque nous nous réunissons pour prier pour la paix, cette prière doit être effectué selon les chemins différent qui sont propres aux diverses religions. Tel était le choix de 1986, et ce choix ne peut que rester valable aujourd'hui. La convergence des différences ne doit pas donner le sentiment de céder à ce relativisme qui nie le sens même de la vérité et la possibilité de l'atteindre"(Message à Mgr Domenico Sorrentino, 2 Septembre, 2006, Enseignements de Benoît XVI, 2006, vol. II , p. 190).
Telle est l'interprétation correcte de l '"esprit d'Assise", souvent invoqué dans le contexte des initiatives de dialogue et de rencontre entre les membres des différentes traditions religieuses, qui se sont multipliées dans les années suivant la rencontre de 1986, lequel reste de son côté un événement en quelque sorte unique: moment fort de partage spirituel, vécu dans la simplicité et la fraternité, attitudes typiques de Saint-François, qu'on peut encore respirer dans sa ville natale.
Il devint donc spontané de regarder de nouveau vers Assise à un moment particulièrement délicat et dramatique de l'histoire récente, celui qui a suivi les attaques terroristes du 11 Septembre 2001.
Au début du nouveau millénaire, peut-être juste au moment où, après la division du monde en blocs opposés, l'attente était plus forte pour l'émergence d'une ère de plus grande tranquillité, des nuages menaçants ont soudainement obscurci les espoirs de beaucoup.
Jean-Paul II donna alors à rendez-vous dans la ville de saint François aux dirigeants des communautés chrétiennes et des religions du monde, non seulement pour rendre visible la condamnation, par tous les hommes religieux, du terrorisme intégriste, mais aussi pour témoigner que les religions en tant que telles sont engagées à favoriser un climat de paix dans le monde, da justice, de fraternité, et n'entendaient pas être manipulés pour des affrontements entre nations, peuples et cultures.
"Nous voulons nous retrouver ensemble, en particulier chrétiens et musulmans, pour annoncer au monde que la religion ne doit jamais devenir une source de conflit, de haine et de violence" (Angélus du 18 Novembre 2001, Enseignements de Jean-Paul II, 2001, vol. II, p. 757).
Le Pape invita à se préparer à cette rencontre par une journée de jeûne, qui, significativement, fut placée dans une période proche de la fin du mois de Ramadan.
La Journée de prière pour la paix mondiale se tint à Assise le 24 Janvier 2002. À cette occasion, par rapport à la prière publique des différentes religions qui distingua la rencontre de 1986, on voulut souligner l'engagement solennel pour la paix. Chaque groupe religieux put prier dans des environnements particuliers à l'intérieur monastère franciscain, tandis que les chrétiens se sont retrouvés dans l'église inférieure. Ces choix dérivaient de la volonté, partagée par tous, de ne pas fournir le prétexte à des interprétations irénistes de la rencontre entre des hommes appartenant à des religions différentes.
Lors de la réunion commune, sur la Piazza San Francesco, on écouta des témoignages en faveur de la paix et dans l'après-midi, fut proclamé un engagement solennel, partagé par tous les présents. C'est un texte qui conserve encore aujourd'hui toute sa valeur: il exprimait la condamnation de la violence et du terrorisme, contrastant avec l'esprit authentique de la religion; il manifestait la volonté d'éduquer à l'estime et au respect mutuel, de promouvoir une culture de dialogue entre les individus et les peuples, de vivre la confrontation avec les différences des autres comme une opportunité pour une meilleure compréhension mutuelle. Il affirmait la volonté de pardon, l'engagement à surmonter les erreurs et les préjugés du passé; il faisait sienne la cause des pauvres et des oubliés. Le texte se concluait par un appel aux dirigeants des nations, afin qu'ils mettent tous leurs efforts pour bâtir sur les fondements de la justice, un monde de solidarité et de paix.
La condamnation de la violence et du terrorisme opérés au nom de la religion introduisait dans la rencontre interreligieuse un élément peut-être pas nouveau, mais vécu aujourd'hui avec une intensité particulière: le besoin de purification, dont chaque tradition religieuse doit se charger, face aux autres traditions religieuses et face au monde. La pratique de la religion est elle aussi exposée aux conséquences du mal, du péché, et peut se trouver défiguré. Se réunir ensemble, signifie aussi être disposé à pardonner et à purifier sa propre façon de vivre la dimension religieuse. L'échange de l'étreinte de la paix entre les personnes présentes, qui concluait la journée de 2002, était une expression éloquente de cette volonté.

25 ans se sont écoulés depuis la première rencontre historique à Assise. Le monde a subi de profondes transformations. Pourquoi retourner à nouveau dans la ville du Poverello?

La réponse est simple: le monde change, mais les aspirations du cœur humain restent, et aujourd'hui plus que jamais, la dimension religieuse se révèle être un élément indispensable pour la défense et la promotion de la paix.
Le pape Benoît XVI donne à nouveau rendez-vous aux dirigeants des Églises, des communautés chrétiennes et des grandes religions du monde, avant tout pour rappeler l'événement de 1986: celui-ci a vraiment ouvert une nouvelle ère dans les relations entre personnes de religions différentes, il a permis à chacun de réaliser que la confrontation avec l'autre que soi-même est une nécessité qu'aucun homme religieux ne peut ignorer.

Toutefois, naturellement, on ne se rencontre pas seulement pour rappeler le passé, mais aussi pour regarder vers l'avenir. Quels sont les défis auxquels sont confrontés aujourd'hui les hommes croyants par rapport à la construction de la paix? Quelle contribution chaque personne et chaque tradition religieuse peut-elle offrir à la cause de la justice? Et, inversement, quel stimulus peut-on recevoir, dans l'effort pour travailler à bâtir une société plus juste et plus solidaire du monde, de ceux qui ont une foi différente de la sienne, et même de ceux qui ne manifestent aucune foi religieuse, mais qui se sentent engagés par cette noble cause?
Le thème que le pape a indiqué pour la célébration de la journée - "Pèlerins de la vérité, pèlerins de la paix" - montre clairement le sens qu'aura la rencontre du 27 Octobre 2011.
Nous voulons en premier lieu nous reconnaître tous insérés dans ce chemin commun qui est l'histoire humaine. Affirmer être pèlerin signifie admettre que nous n'avons pas encore atteint notre but, ou plutôt, que but nous dépasse toujours, constituant le sens de notre voyage. Chaque homme de bonne volonté se sent "pèlerin de la vérité" : il se sent en chemin parce qu'il est conscient que la vérité le dépasse toujours.
De là le motif d'un choix qualifiant pour la prochaine rencontre, celui d'inviter aussi à Assise des personnalités du monde de la science et la culture qui se définissent non-religieux. Et cela pas seulement pour le fait que la construction de la paix est une responsabilité de tous, croyants et non croyants. Plus profondément, nous sommes convaincus que la position de celui qui ne croit pas, ou a du mal à croire, peut jouer un rôle salutaire pour la religion en tant que telle, par exemple en aidant à mettre en évidence des dégénérescence possible ou l'inauthenticité. Des traces de ces «Lumières» (le mot employé est "illuminisme") correctement comprises sont présentes dans la tradition biblique elle-même, fortement critique envers les modalités de culte qui ne rapprochent pas mais éloignent de Dieu.
Comme chrétiens, nous professons avoir reçu dans le Christ la révélation pleine et définitive du visage de Dieu; nous savons que ce don du salut est pour tous les hommes et nous désirons ardemment que le dessein d'amour du Père se manifeste et se réalise dans son intégralité. Nous savons bien, cependant, que nous ne pouvons jamais épuiser la profondeur du mystère du Christ. Non seulement cela, nous reconnaissons que notre fragilité peut parfois obscurcir la splendeur de ce trésor qui nous a été révélé, et le rendre plus difficile à connaître. Avoir reçu le don de la vérité ne nous empêche donc pas de nous sentir compagnons de voyage de chaque homme et chaque femme.
La Journée d'Assise se déroulera à l'enseigne de ces éléments qui caractérisaient déjà la première rencontre, il y a vingt-cinq ans: la prière, jeûne, le pèlerinage.
La prière sera vécue principalement dans la dimension du silence et du recueillement intérieur, qu'on a voulu privilégier sur les formes publiques de prière de chaque tradition, en continuité avec ce qui s'était déjà passé à la rencontre de 2002. Le souci d'éviter même l'apparence de tout relativisme n'est pas seulement catholique, et il est particulièrement compréhensible dans le contexte culturel d'aujourd'hui, par de nombreux aspects réfractaire à la question de la vérité et donc enclin à une présentation indifférenciée, et finalement sans importance, le phénomène religieux. Cela ne diminue pas la conviction profonde que la prière demeure la contribution essentielle que les personnes religieuses peuvent apporter à la cause de la paix. Le pape Benoît XVI présidera la nuit précédente, une veillée de prière pour la paix avec les fidèles du diocèse de Rome, invitant à se joindre à lui les évêques et les fidèles du monde entier.

Le second élément de la journée est le jeûne, qui ne sera que partiellement interrompu par un repas frugal, pour exprimer la fraternité entre les personnes présentes. Le jeûne marquera la dimension pénitentielle que la rencontre veut également assumer, la conviction de devoir toujours être prêt à un processus de purification.

Enfin, il y a l'élément du pèlerinage, qui sera symbolisée par le voyage en train des délégations, de Rome à Assise, et dans l'après-midi, la montée de tous les participants, de la Basilique de Sainte Marie des Anges à la place désormais historique qui a également vu la conclusion des rencontres précédentes. Nous marcherons ensemble le long des rues d'Assise, comme nous marchons ensemble tous les jours sur les routes de ce monde, sur les routes de l'histoire. Nous nous reconnaîtrons pèlerins de la vérité, pèlerins de la paix, nous efforçant d'être les bâtisseurs d'un monde plus juste et plus uni, et conscients du fait que cette tâche échappe à nos pauvres forces et que nous sommes appelés d'en haut. C'est avec ces sentiments que nous nous apprêtons à accepter l'invitation du Pape Benoît XVI et à retourner à Assise.
Tarcisio Bertone




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