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Doctrine sociale dans la continuité du magistère

Le cinquantième anniversaire de l'encyclique de Jean XXIII Mater et magistra. Discours de Benoît XVI (18/5/2011)

Lundi 16 mai, Benoît XVI a reçu ce matin les participants au Congrès mondial organisé par le Conseil pontifical Iustitia et Pax à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'encyclique Mater et Magistra de Jean XXIII.
Le résumé du bulletin VIS s'ouvre sur un titre bien choisi: Humanisme ouvert a la transcendance
Texte en italien: Site du Vatican.
Ma traduction.

Messieurs les Cardinaux,
Vénérés confrères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux de vous accueillir et de vous saluer à l'occasion du 50ème anniversaire de l'Encyclique Mater et Magistra du Bienheureux Jean XXIII; un document qui conserve encore une grande actualité, dans le monde globalisé. Je salue le Cardinal Président, que je remercie pour ses aimables paroles... et vous tous, venus de différents continents pour cet important congrès.

Dans Mater et Magistra, Papa Roncalli, avec une vision de l'Église au service de la famille humaine surtout à travers sa mission spécifique d'évangélisation, a pensé à la doctrine sociale - anticipant le Bienheureux Jean-Paul II - comme à un élément essentiel de cette mission, parce que "partie intégrante de la conception chrétienne de la vie"(n° 206).
Jean XXIII est à l'origine des affirmations de ses successeurs, y compris quand il a indiqué dans l'Eglise le sujet communautaire et pluriel de la Doctrine sociale. Les laïcs chritifideles, en particulier, ne peuvent pas en être de simples bénéficiaires ou des exécutants passifs, mais ils en sont des acteurs essentiels au moment de sa mise en œuvre, ainsi que des partenaires précieux des Pasteurs dans sa formulation, grâce à l'expérience acquise sur le terrain et à leurs compétences spécifiques. Pour le bienheureux Jean XXIII , la Doctrine Sociale de l'Eglise a comme lumière la vérité, comme force motrice l'amour, comme objectif la justice (cf. n ° 209), une vision de la Doctrine sociale, que j'ai reprise dans l'encyclique "Caritas in veritate" en témoignage de cette continuité qui tient uni l'entier corpus des encycliques sociales. La vérité, l'amour, la justice, soulignés par Mater et Magistra, en même temps que le principe de la destination universelle des biens comme critères fondamentaux pour surmonter les déséquilibres sociaux et culturels, restent les piliers pour interpréter et apporter une solution aux déséquilibres internes de la mondialisation d'aujourd'hui.

Face à ces déséquilibres, il est nécessaire de rétablir une raison intégrale qui fasse renaître la pensée et l'éthique. Sans une pensée morale qui va au-delà de la structure des éthiques laïques, tels que celles neo-utilitariste et neo-contractualiste, qui sont basées sur un scepticisme substantiel et une vision essentiellement immanente de l'histoire, il devient difficile pour l'homme d'aujourd'hui d'avoir accès à la connaissance du vrai bien de l'homme. Il faut donc développer des synthèses culturelles humanistes ouvertes à la transcendance par le biais d'une nouvelle évangélisation - enracinée dans la loi nouvelle de l'Évangile, la loi de l'Esprit - comme nous en a sollicité à plusieurs reprises le bienheureux Jean-Paul II. Ce n'est que dans la communion personnelle avec le Nouvel Adam, Jésus-Christ, que la raison humaine est guérie et renforcée, et qu'il est possible d'accéder à une vision plus appropriée de l'économie et la politique selon leur dimension anthropologique et les nouvelles conditions historiques. Et c'est grâce à une raison rétablie dans sa capacité spéculative et pratique qu'on peut disposer de critères fondamentaux pour surmonter les déséquilibres mondiaux, à la lumière du bien commun.
En effet, sans la connaissance du vrai bien humain, la charité bascule dans le sentimentalisme (voir n. 3), la justice perd sa «mesure» fondamentale; le principe de la destination universelle des biens est délégitimé. Les différents déséquilibres mondiaux qui caractérisent notre époque, alimentent les disparités, les différences de richesse, les inégalités, créant des problèmes de justice et de distribution équitable des ressources et des opportunités, en particulier envers les pauvres.

Mais non moins inquiétants sont les phénomènes liés à la finance qui, après les phases les plus aigües de la crise, a recommencé à pratiquer avec frénésie des contrats de crédit qui permettent souvent une spéculation illimitée. Des phénomènes de spéculation nocifs se produisent également à l'égard de la nourriture, de l'eau, de la terre, finissant par appauvrir encore plus ceux qui vivent déjà dans des situations de grave précarité. De même, la hausse des prix des ressources énergétiques primaires, avec la recherche conséquente d'énergies alternatives guidée parfois par des intérêts purement économiques à court terme, finissent par avoir des conséquences négatives sur l'environnement sur et l'homme lui-même.

La question sociale aujourd'hui est sans aucun doute une question de justice sociale au niveau mondial, comme le soulignait déjà Mater Magistra il y a cinquante ans, même si c'était en référence à un autre contexte. Il est aussi question de répartition équitable des ressources matérielles et immatérielles, de mondialisation de la démocratie de fond, sociale et participative. Par conséquent, dans un contexte où on vit une unification progressive de l'humanité, il est indispensable que la nouvelle évangélisation du social mette en évidence les implications d'une justice qui doit être mise en œuvre au niveau universel. Se référant à la fondation de cette justice, il faut souligner qu'il n'est pas possible de la réaliser en s'appuyant sur le simple consensus social, sans reconnaître que celui-ci, pour être durable, doit être enraciné dans le bien humain universel. En ce qui concerne le niveau de réalisation, la justice sociale doit être mise en œuvre dans la société civile, dans l'économie de marché (cf. Caritas in Veritate n ° 35), mais aussi par une autorité politique équitable et transparente à sa mesure, y compris au niveau international (cf. ibid., 67).

Par rapport aux grands défis d'aujourd'hui, l'Eglise, tout en se confiant en premier lieu au Seigneur Jésus et à son Esprit, qui la conduisent à travers les vicissitudes du monde, à la diffusion de la doctrine sociale, compte aussi sur l'activité de ses institutions culturelles, sur les programmes d'instruction religieuse et de catéchèse dans les paroisses, sur les médias et sur l'oeuvre d'annonce et de témoignage des laïcs christifideles (voir Mater et Magistra, 206-207). Ceux-ci doivent être préparés spirituellement, professionnelle et éthiquement. Mater et Magistra insistait non seulement sur la formation, mais surtout sur l'éducation qui forme la conscience chrétienne et mène à une action concrète, selon un discernement sagement dirigé. Le Bienheureux Jean XXIII affirmait: «L'éducation à agir chrétiennement dans les domaines économique et social peut difficilement être efficace si ces mêmes sujets ne prennent pas une part active à leur propre éducation, et si l'éducation ne se fait pas aussi à travers l'action» (n ° 212-213).

Restent également valides les indications données par le pape Roncalli à propos d'un pluralisme légitime parmi les catholiques dans la réalisation de la doctrine sociale. Il écrivait, en effet, que, dans ce contexte " [...] il peut aussi survenir même chez les catholiques, droits et sincères, des divergences d'opinion. Lorsque cela se produit, on ne doit jamais abandonner la considération réciproque, le respect mutuel et la bonne volonté à identifier les points de rencontre pour des mesures rapides et efficaces: on ne doit pas s'user dans des discussions sans fin et, sous le prétexte du meilleur et de l'excellent, il ne faut pas négliger de faire le bien qui est possible et donc nécessaire "(n ° 219).
Des institutions importantes au service de la nouvelle évangélisation du social sont aussi les associations bénévoles et les organisations non gouvernementales, chrétiennes, ou d'inspiration chrétienne, les commissions Justice et Paix, les Offices pour les problèmes sociaux et le travail, les Centres et les Instituts de Doctrine sociale, dont beaucoup ne se limitent pas à l'étude et à la diffusion, mais aussi à l'accompagnement des différentes initiatives d'expérimentation des contenus de la doctrine sociale, comme dans le cas de coopératives sociales de développement, d'expériences de micro-crédit et d'une économie animée par la logique de la communion et de la fraternité.

Le Bienheureux Jean XXIII, dans Mater et Magistra, rappelait qu'on peut mieux saisir les exigences fondamentales de la justice quand on vit comme des enfants de la lumière (cf. n ° 235).
Je souhaite donc à vous tous que le Seigneur ressuscité réchauffe vos cœurs et vous aide à répandre les fruits de la rédemption à travers une nouvelle évangélisation du social et le témoignage de la bonne vie selon l'Evangile. Que cette évangélisation soit soutenue par une pastorale sociale adéquate, mise en oeuvre systématiquement dans les différentes Églises particulières. Dans un monde, souvent replié sur lui-même, privé d'espérance, l'Eglise attend que vous soyez la levure, semeurs infatigables de pensée véridique et responsable, et de projets sociaux généreux, soutenus par l'amour plein de vérité qui habite en Jésus-Christ, Verbe de Dieu fait homme.
Je vous remercie pour votre travail, et je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.

© Copyright 2011 - Libreria Editrice Vaticana

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