L’article publié récemment sur l’attitude ‘schizophrénique’ du cardinal Sarah, entre affirmation répétée d’un soutien indéfectible au Pape et opposition sans concession aux orientations de son pontificat, m’a valu de vives critiques. Si l’on peut comprendre la défense de ceux qui voient en lui un futur pape, ce site n’est pas le seul à exprimer une perplexité… qui vaut aussi pour d’autres hauts prélats.

Benoît XVI apprécie beaucoup le cardinal Sarah

Une fidèle lectrice (et catholique fidèle) résume bien le sentiment des voix hors du chœur:

« Le Cardinal Sarah a tout d’un saint homme pourvu d’une haute spiritualité et je n’arrive pas à comprendre comment il peut rester à la Curie. J’ai lu ses trois livres qui montrent, sans jamais accuser explicitement François, qu’il est en profond désaccord avec lui. Comment un homme aussi droit peut-il rester aux côtés d’un Pape comme François? Est-il aveuglé par la nécessité de rester fidèle au Pape quel qu’il soit? Pour moi, cet homme est un mystère« .

Parmi ces voix, après celle de ‘Chiesa e post Concilio‘ , dont j’ai tiré la substance de mon propre article, voici celle de ‘CPF‘ (Cronache di Papa Francesco), datée du 26 juillet, avant la pause estivale, dont j’extrais, dans ma traduction, quelques éléments:


Cher Cardinal Sarah :

si votre discours est « oui, oui et non, non », il ne sert à rien de vous justifier.

En juin 2018, nous écrivions : « Cher cardinal Müller: assez avec la découverte de l’eau chaude! agissez! »
Assez de ce va-et-vient continuel et épuisant: vous dénoncez pour ensuite rassurer (mais qui ??); vous lancez le caillou puis vous cachez la main.

Et dans cet autre éditorial nous demandions à ces Pasteurs: « Vous dénoncez des dérives gravissimes pour ensuite souligner que vous n’en avez pas après ‘Tizio, Caio et Sempronio‘ [noms génériques, pour désigner ‘telle ou telle personne‘] ».

Mais alors, désolé, qui est responsable des faits graves que vous dénoncez?
Qui est le pasteur: vous, ou nous?
Qui a le pouvoir de freiner ces dérives doctrinales que vous dénoncez vous-mêmes?

Maintenant, c’est au tour du Cardinal Robert Sarah…
D’une certaine façon on peut le comprendre, personne ne veut déclarer le schisme;et puisque ces pasteurs courageux consultent souvent Benoît XVI… on peut peut-être se poser une ou deux petites questions…
Mais allons aux faits, que nous tirons du site Chiesa e Post Concilio

Ici, l’auteur (CPF) reproduit l’article « Trois pas en avant, deux pas en arrière » que j’ai traduit la semaine dernière.
Et il poursuit:

Nous ne connaissons pas la frontière floue entre une responsabilité diabolique et perverse de la part des médias, lorsqu’ils rapportent des ‘fake news‘ ou lorsqu’ils déforment la pensée de beaucoup, y compris du Pape lui-même, et les nombreuses peurs qui envahissent nos pasteurs, même les plus courageux en apparence, comme ce fut déjà le cas pour le Cardinaux Burke, Brandmuller, Müller et aujourd’hui Sarah.
..

On comprend parfaitement les peurs de Müller et de Sarah, et celles de Mgr Schneider, qui, tout en étant courageusement actifs sur les lignes directrices qu’ils s’efforcent de donner, ne vont en fin de compte pas jusqu’aux conclusions….

Eh oui, les conclusions. Le fait est que nous aussi, nous aimerions que la solution de ces problèmes soit immédiate, nous aimerions que les coupables ou les responsables soient sur le banc des accusés, nous aimerions un procès qui puisse expliquer au monde entier que l’Église (une, sainte, catholique et apostolique), la vraie, celle qui a deux mille ans, n’a pas de faute, mais que le modernisme condamné par saint Pie X dans Pascendi Dominici gregis, a gagné… qu’il est entré dans l’Église et qu’il la gouverne.

On voulait, on présumait on prétendait changer l’Église, oubliant qu’il fallait que ce fût l’Église qui nous change pour nous convertir au Christ. La Babel de notre temps, qui a ouvertement et clairement renversé la Mission de l’Église dans le monde, démontre cet échec dont aucun pasteur ne veut prendre la responsabilité.
..

Nous comprenons bien qu’aucun cardinal ou évêque, aujourd’hui, ne veut assumer la responsabilité de déclarer un schisme en état avancé… d’ailleurs si Notre Seigneur Jésus-Christ lui-même permet, et même tolère, cette situation anormale et bizarre non seulement de « deux papes », mais surtout de la Babel que nous vivons, il doit y avoir une raison !

Nous comprenons donc qu’on ne peut pas attendre de ces pasteurs qu’ils déclenchent des procès contre les personnes; mais qu’ils continuent à prendre le troupeau pour des imbéciles, qu’ils continuent à y semer la confusion, qu’ils continuent à lui donner de faux espoirs… dans quel but?

Bref, dire qu' »il fait chaud » toutes les deux minutes comme nous le faisons aujourd’hui, ce n’est pas cela qui fait baisser la température.

Et donc, chers Pasteurs: inutile de donner des interviews tous les deux jours pour dénoncer l’enfer doctrinal qui nous submerge si vous ne placez pas également les extincteurs, destinés à éteindre les flammes dévorantes… Un canadair sans eau, sur une forêt en feu, est inutile. On ne vous demande pas de jeter de l’huile sur le feu, mais de l’eau douce. Excusatio non petita, accusatio manifesta (Excuse non demandée, accusation manifeste) vaut toujours….

Chers Pasteurs, cher Mgr Sarah, on a parfois l’impression que c’est vous qui alimentez le feu de la vérité, sauf ensuite à vous débarrasser de la responsabilité et des conséquences, laissant le troupeau dans les flammes des disputes… comme si nous avions nous le pouvoir d’éteindre cet incendie.
Comme le disait Jeanne d’Arc sur le bûcher: « Tenez haut la croix, pour que je puisse la voir à travers les flammes » .

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