Les appels à la restauration se multiplient (l’un d’entre eux émane de la conférence des évêques de rite latin d’Ukraine), en même temps que les condamnations du nouveau cours. Parallèlement le directeur de l’Institut présente le programme des études pour l’année universitaire qui s’ouvre, en utilisant un charabia abscons pour justifier le changement. AM Valli tente en vain de décrypter ce chef-d’oeuvre de langue de bois cléricale.

Mgr Sequeri , directeur du JPII, avec Vincenzo Paglia et le Pape

D’après Ermes Dovico, la NBQ, 27/9/2019

L’épiscopat ukrainien de rite latin a écrit au Pape et au cardinal Farrell, préfet du dicastère pour les laïcs, pour demander que l’Institut Jean Paul II retrouve son identité.

« Nous voulons exprimer notre profonde gratitude à Dieu pour la personne et le service de saint Jean Paul II, en particulier pour son énorme contribution à la théologie du mariage et de la famille « , lit-on au début de la lettre, écrite à l’initiative de la Commission pour la pastorale familiale et signée par Mgr Bronislaw Bernacki, Président de la Conférence épiscopale de l’Église catholique en Ukraine.
« Ces derniers mois, nous avons remarqué avec tristesse comment cette grande œuvre, construite avec la grâce de Dieu par Jean-Paul II, peut perdre son identité… Les personnes qui ont consacré leur vie à des activités aussi nobles et importantes ont été traitées selon la culture de l’exclusion sociale ».
« Nous demandons et nous nous confions à votre intervention concrète. Nous croyons que l’Institut est un grand don pour l’Église et qu’il aidera à renforcer, sanctifier et faire croître spirituellement des milliers de familles ».

Par ailleurs, 15 philosophes américains, membres de l’American Catholic Philosophical Association lancent un appel dans lequel ils soulignent la perte de crédibilité causée par les procédures arbitraires qui on porté à la révision des statuts, et demandent que les professeurs licenciés soient réintégrés .

Enfin, George Weigel revient à la charge dans un article au vitriol sur First Things , au titre éloquent Balderdash on the Tiber (« Bal musette sur le Tibre »), où il s’en prend avec une ironie féroce au Président de l’Institut venu présenter le programme de l’année universitaire 2019-2020.

Aujourd’hui, l’Institut Jean-Paul II a été pris en otage par une nouvelle meute de vandales conduisant un nouveau sac de Rome. Les nouveaux Vandales marchent sous la bannière de l' »accompagnement » pastoral. Mais il est clair depuis un certain temps que leur but premier est de déconstruire l’encyclique de Jean-Paul II sur la théologie morale, Veritatis Splendor, et son enseignement selon lequel certains actes sont tout simplement mauvais, point final, de sorte qu’aucun calcul des intentions et conséquences ne peut leur donner une valeur morale. Pour aider ce programme destructeur, les Vandales ont maintenant congédié des professeurs permanents de l’Institut, remanié le programme d’études et embauché des professeurs dont l’emprise sur la doctrine catholique est au mieux ténue. Maintenant, ils tentent de justifier ce vandalisme avec un charabia sur « l’espace théologique planétaire pour un remodelage historique de la forme chrétienne ».

Justement à propos de ce discours du directeur de l’Institut Jean-Paul II, AM Valli nous faisait part dès hier de ses réflexions.


Le pape, les adjectifs, les adverbes et le directeur ampoulé

Aldo Maria Valli
26 septembre 2019
Ma traduction

Chers amis de Duc in altum, lisez avec moi le passage suivant, puis nous en parlerons.

« La recomposition de la pensée et de la pratique de la foi avec l’alliance globale de l’homme et de la femme est maintenant, avec toutes les preuves, un lieu théologique planétaire pour le remodelage de la forme chrétienne voué à faire date. Et pour la réconciliation de la créature humaine avec la beauté de la foi. En termes simples, en surmontant toute séparation intellectualiste entre théologie et pastorale, spiritualité et vie, connaissance et amour, il s’agit de rendre cette évidence persuasive pour tous: la connaissance de la foi aime les hommes et les femmes de notre temps ».

Vous dites? Vous n’avez pas compris grand-chose? Moi non plus. De la forêt lexicale émerge l’idée que les choses doivent changer et que l’Église doit accepter le monde. Mais je demanderais à l’auteur un petit effort: ne pourrait-il pas s’exprimer un peu plus clairement ?

Mais je crains que ce ne soit impossible. L’auteur est en fait Mgr Pierangelo Sequeri, dont la prose n’a jamais été distinguée pour sa clarté.

Vous dites? Qui est ce Sequeri ?

Théologien et musicologue, il est l’actuel président de l’Institut Théologique Pontifical Saint Jean Paul II pour les Sciences du Mariage et de la Famille, ou plutôt l’institut voulu par le Pape François à la place du précédent, fondé par Jean Paul II en 1981 et rasé au sol par les exécuteurs diligents du diktat bergoglien.

Le passage que j’ai reproduit au début fait partie de la présentation de l’offre académique de l’institut pour l’année 2019-20, mais dire présentation est réducteur. En fait, il est très probable qu’être capable de comprendre ce que Mgr Sequeri veut dire constitue un test d’admission.

George Weigel, biographe et ami du Pape Wojtyla, écrit dans un article en anglais pour First Things que certains pourraient imaginer que la salade de mots produite par Sequeri est moins indigeste dans l’italien original, mais, malheureusement, il n’en est rien. Comme le dit Weigel, la prose semble tout aussi impénétrable, même dans la langue maternelle du bon monsignor.

Mais pourquoi nous occupons-nous du texte sequerien? Parce que tandis que je le lisais et le relisais, et qu’à chaque passage, je m’émerveillais de cette salade, je pensais à ce qu’a dit le Pape François il y a quelques jours, quand, dans un de ses moments de colère miséricordieuse, il s’en est pris aux adjectifs et aux adverbes.

Vous dites? Vous ne vous rappelez pas?
Je vais tout de suite vous rafraîchir la mémoire.

L’autre jour, François s’adressait au service de communication du Vatican et disait à cette occasion qu’il se sentait « allergique » quand il entendait dire: « C’est une chose authentiquement chrétienne ».
Oh, très bien, direz-vous, mais pourquoi le pape en a-t-il après les choses authentiquement chrétiennes? Le fait est qu’en réalité le pape, comme il l’a lui-même expliqué, en a après les adjectifs et les adverbes (*). Écoutez ici :

« Nous sommes tombés dans la culture des adjectifs et des adverbes, et nous avons oublié la force des noms. Le communicateur doit faire comprendre aux gens le poids de la réalité des noms qui reflètent la réalité des gens. Et c’est une mission de communication: communiquer avec la réalité, sans édulcorer avec des adjectifs ou des adverbes ». Donc, argumente le Pape, pourquoi dire « authentiquement chrétien » alors qu’il suffit de dire « c’est une chose chrétienne »?

Maintenant, il serait intéressant de savoir ce que François pense de la salade de mots produite par le fidèle Sequeri. Quand les adjectifs et les adverbes sont utilisés par les pro-bergogliens, ils sont bien ?

Pardon de vous soumettre à une rude épreuve, mais voici un autre passage sequerien:

« Le nouvel organigramme des études montre de manière éloquente l’instrumentation mise à jour que notre navigation aura à sa disposition. Le renforcement de ses fondements théologiques passe par la nouvelle centralité conférée à la structure fondamentale de la forme chrétienne, dans laquelle le sujet de l’amour de Dieu et les figures de l’amour humain, la grâce de la foi et les passions de la vie sont recomposés, existentiellement, éthiquement, spirituellement. Cette autonomisation théologique, puis déclinée dans les différents enseignements qui précisent le profil académique de l’Institut, ouvre constamment l’espace d’un dialogue amical et d’une confrontation compétente avec les connaissances humanistes et scientifiques qui lui sont les plus étroitement liées ».

[NDT: Par souci de clarté, voilà la vo]

Il nuovo organigramma degli studi visualizza in modo eloquente l’aggiornata strumentazione di bordo di cui la nostra navigazione potrà disporre. Il potenziamento dei suoi fondamentali teologici passa attraverso la nuova centralità conferita alla struttura fondamentale della forma cristiana, in cui si ricompongono – esistenzialmente, eticamente, spiritualmente – il soggetto dell’amore di Dio e le figure dell’amore umano, la grazia della fede e le passioni della vita. Questo potenziamento teologico, declinato poi nei vari insegnamenti che specificano il profilo accademico dell’Istituto, apre coerentemente lo spazio di un dialogo amichevole e di un confronto competente con i saperi umanistici e scientifici che più strettamente vi si collegano

Un écran de fumée de plus en plus dense. Il est clair, encore une fois, que la question est réduite à la façon de s’entendre avec le monde en éliminant le sens du péché, mais tout est dit de façon tellement ampoulée, et avec une telle abondance d’adjectifs et d’adverbes, qu’on en a des maux de tête.

Le Pape François doit donc décider: son interdiction des adjectifs et des adverbes s’applique-t-elle toujours et dans tous les cas uniquement quand elle touche ceux qui veulent établir ce qui est authentiquement chrétien? Mais quand il s’agit de dissimuler l’hérésie derrière un écran de fumée de mots, les adjectifs et les adverbes sont autorisés ?


Note additive

(*) Curieusement, on ne trouve pas trace de ces propos sur le site du Vatican, dans la version en français du discours. La version en italien commence par ces mots (pour une fois, j’apprécie l’humour du Pape, mais les fonctionnaires de curie qui ont rédigé le discours officiel apprécieront moins):

J’ai sous les yeux un discours à lire…, il n’est pas tellement long, seulement sept pages…, mais je suis sûr qu’après la première, la majorité dormira, et je ne pourrai pas communiquer. Je crois que ce que je veux dire dans ce discours sera bien compris dans la lecture, dans la réflexion. C’est pourquoi je confie ce discours au Dott. Ruffini (nouveau préfet -laïc!! – du dicastère pour la communication)

http://w2.vatican.va
Mots Clés :
Share This