Et pas qu’en France (où le secrétaire d’état au numérique s’inquiète… de la saturation de la bande passante, tout en précisant que les gens font ce qu’ils veulent chez eux [*]). La NBQ publie une interview d’un catholique laïc impliqué dans la lutte contre ce fléau, Tebaldo Vinciguerra [**]: il dénonce « une gigantesque expérience hors-contrôle de transformation sociale« 

[*] Ce qui ne manque pas de sel en ce moment où tout est interdit!!
[**] Italo-français, Tebaldo Vinciguerra est diplômé en sciences politiques. Depuis 2011, il est chargé au Conseil pontifical « Justice et Paix » des questions d’écologie et de développement, analysant les nombreux enjeux contemporains à la lumière de la doctrine sociale de l’Église. Il est en particulier l’auteur d’un livre [traduit?] en français « La pornographie: qu’en dit l’Eglise? » (Tequi, 2015)


« Les gens font ce qu’ils veulent, ce n’est pas mon affaire », a précisé Cédric O. « Ce que je souhaite, c’est que tout le monde puisse se connecter, sans que ça empêche la télémédecine, le télétravail ou les cours à distance des enfants. »

Pour cela, Cédric O a indiqué avoir demandé « à tous les gros consommateurs de bandes passantes » d’être vigilants, en réduisant par exemple la qualité de leurs vidéos, « y compris les sites pornographiques ».

*

https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/video-coronavirus-la-consommation-de-sites-pornographiques-a-augmente-de-50-selon-le-secretaire-d-etat-charge-du-numerique_3887469.html

Pornographie et confinement: une combinaison dévastatrice

Luca Marcolivio
La NBQ
8 avril 2020
Traduction partielle

L’explosion de l’accès aux sites pornographiques (+24%) au cours du premier mois de quarantaine. « Certains sites pornographiques connus ont annoncé un accès gratuit pendant la pandémie: c’est une gigantesque expérience de transformation sociale hors de contrôle, qui met en péril le développement harmonieux de chaque personne ».

Parallèlement au Covid-19, un autre virus se répand comme une traînée de poudre, ici dans l’indifférence générale: la pornographie en ligne. L’ennui de la quarantaine joue des tours et contribue à l’une des plus graves addictions de ce siècle.

Q: Au cours du premier mois de quarantaine pour le coronavirus, on a constaté un boom de l’accès aux sites pornographiques (+24% rien qu’en Italie). Comment commentez-vous ces données?

R: Certains sites pornographiques connus ont annoncé un accès gratuit pendant la pandémie dans les zones les plus touchées et les plus confinées. On a par exemple annoncé le libre accès pour la Lombardie et la Vénétie. Avec cette trouvaille publicitaire, ces sites ont eu une vitrine supplémentaire, grâce à des canaux d’information « tiers » qui, en passant, ont donné plus de visibilité à leur promotion, impliquant ainsi également des personnes qui ne sont généralement pas atteintes par le marketing pornographique. En fin de compte, certains des principaux sites de l’industrie du porno ont bénéficié d’une bonne publicité, réussissant à faire parler d’eux en dehors de la sphère des médias pornographiques. Cela contribue à « normaliser » ou à banaliser la pornographie: elle est traitée comme n’importe quelle autre information. Avec autant de personnes à la maison et l’augmentation des vidéoconférences, du streaming, des jeux et des cours en ligne, l’Internet est très sollicité. Je ne crains pas le risque de black-out, mais je constate qu’avec l’urgence du coronavirus, Netflix, YouTube et d’autres sites réduisent la qualité du streaming pour permettre à ceux qui ont besoin de surfer pour des raisons d’études ou de travail de le faire. Il serait donc dommage que ces utilisateurs soient gênés, ne serait-ce que de façon minime, par le trafic porno.

Quelles pourraient en être les conséquences ?

J’aurais tendance à faire une distinction entre les conséquences d’un tel boom d’accès bien identifié lié à l’urgence COVID-19, d’un côté, et les conséquences d’une consommation prolongée de pornographie, d’un autre côté. Premier point: on assiste non seulement à une augmentation de la consommation des utilisateurs réguliers, mais aussi à la création de très nombreux nouveaux comptes sur des sites qui ont proposé des contenus gratuits dans les zones de confinement. On peut en déduire que la combinaison du Covid et de la publicité pour ces sites a fonctionné: on a constaté une augmentation du nombre de consommateurs qui, bien qu’ils soient peut-être des utilisateurs de contenu gratuit, déplacent une énorme masse d’argent pour la publicité, les données, et peut-être même qu’un jour ils décideront de payer pour accéder à plus de matériel. Deuxième point : une consommation prolongée peut conduire à des situations d’addiction, à l’adoption de croyances et de comportements inculqués par la production pornographique qui sont incompatibles avec la dignité humaine. Il est difficile d’être exhaustif en quelques mots. Avec internet, les smartphones et les réseaux sociaux, nous sommes confrontés à un tsunami. La hausse de la consommation et de l’accès due à Covid n’est qu’une augmentation ponctuelle de ce que divers experts américains appellent une gigantesque expérience hors-contrôle de transformation sociale – la façon dont la pornographie affecte nos sociétés, mettant en péril le développement harmonieux de toute la personne et de chaque personne. Une pornographie aussi répandue, à laquelle on accède de manière de plus en plus précoce, en encourageant la production amateur, est une parodie d’éducation sexuelle qui ne respecte pas la dignité de la personne, qui avilit le don de la sexualité voulu par Dieu, qui blesse l’affectivité et pollue l’écologie humaine telle que la présente le Magistère.

Pensez-vous que la catégorie la plus à risque de tomber dans le vice pornographique est celle des hommes adultes célibataires vivant seuls? Ou pensez-vous aussi que les adolescents – qui sont plus contrôlés par leurs parents ces dernières semaines – ne devraient pas être négligés ?

Je ne me concentrerais pas sur les hommes, car le pourcentage de femmes qui apprécient la pornographie est en augmentation. Dans cette situation particulière, le risque est peut-être l’isolement et l’oisiveté, mais aussi les difficultés. Je pense à ceux qui ont perdu leur emploi (ou qui ont vu leurs revenus diminuer de façon drastique): pour eux, la pornographie risque d’être perçue et utilisée comme un exutoire. C’est ainsi qu’elle peut apparaître sur le moment mais, à long terme, la pornographie est un piège de tristesse et d’insatisfaction dont on ne peut rien obtenir de bon et dans lequel on se laisse entraîner. Il devient donc difficile de « Sortir du tunnel », pour reprendre le titre du livre du psychothérapeute Peter Kleponis écrit en 2017. Les adolescents sont sans doute plus proches de leurs parents en ce moment, mais tous ont un smartphone, donc le risque est là! Plus à cause du smartphone que du coronavirus. Les adolescents et surtout les pré-adolescents sont particulièrement exposés car la pornographie les touche à un stade crucial de leur maturation, allant même jusqu’à les influencer profondément. Commencer à consommer de la pornographie à l’âge de 14 ou 40 ans n’est pas la même chose pour le développement de la personne (en plus d’être illégal dans le premier cas). Beaucoup commencent malheureusement bien avant l’âge de 14 ans. Les enfants, les jeunes et les adolescents ne doivent jamais être négligés!

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