Tout ceux qui s’opposent à la narration officielle particulièrement lancinante ces jours-ci « restez vigilants », et surtout « la seconde vague est inévitable » (voire: « elle est déjà là ») sont la cible d’un pilonnement médiatique qui inspire les pires soupçons sur les motivations de ceux qui la répandent. La crise liée à la pandémie est devenue presque exclusivement politique.

Jair Bolsonaro

Covid: Bolsonaro malade et les chiffres de la terreur

Stefano Magni
La NBQ
8 juillet 2020
Ma traduction

Le président brésilien Bolsonaro a été resté positif au Covid. Dans les gros titres où est donnée la nouvelle, on trouve très souvent l’ajout que Bolsonaro est le président qui a « sous-estimé le Covid ». Cela fait partie de la même stratégie médiatique qui met l’accent sur les dangers d’une deuxième vague chez nous et surestime les effets de l’épidémie aux États-Unis de Trump.

Dans la narration de la terreur par le Covid-19, une nouvelle fait jubiler de nombreux commentateurs: le président brésilien Jair Bolsonaro a été testé positif. Dans les gros titres qui rapportent la nouvelle, on ajoute très souvent que Bolsonaro est le président qui a « sous-estimé le Covid ». De la série « il ne l’a pas volé »: la même teneur de commentaires (même subliminaux, un titre mis de cette façon suffit) qui ont accompagné la nouvelle de la maladie de Boris Johnson à l’époque.

Autres thèmes de la narration de la terreur : l’explosion de la contagion aux États-Unis, en particulier dans les États du sud, les plus conservateurs et proches de Trump. Et enfin, la crainte de la deuxième vague en Italie [et en France!!!]. Toute cette narration est pour le moins forcée et semble viser plus des objectifs politiques qu’une description précise de cette phase de la pandémie mondiale.

Tout d’abord, Bolsonaro est dans la ligne de mire de la presse (depuis le jour de son entrée en fonction), mais il l’est d’autant plus depuis que l’épidémie de coronavirus a frappé le Brésil. La raison est simple : il est explicitement contre la stratégie de confinement. Il estime que les victimes d’une crise économique pourraient être beaucoup plus nombreuses que celles dues à la maladie. Vu la taille du Brésil, Bolsonaro n’a pas tort: l’épidémie a tué jusqu’à présent 66 741 Brésiliens, un nombre de victimes qui n’est dépassé que par les États-Unis. On oublie toujours, cependant, que par rapport à sa population, le Brésil est le quinzième pays du monde pour le nombre de décès. L’Italie, avec son système de confinement très strict, se trouve à la sixième place. Au Brésil, bien que la situation reste dramatique, on est passé d’un pic de 1492 morts par jour le 4 juin à 656 actuellement. La tendance à la baisse n’est pas consolidée, il y a des poussées inquiétantes jour après jour, mais nous ne voyons pas pour autant une situation totalement incontrôlable. Bolsonaro a donc affronté un risque calculé et n’a pas tort lorsqu’il affirme que, dans un pays en développement comme le sien, une crise économique, due à un verrouillage généralisé, pourrait faire encore plus de victimes. En plus d’être de mauvais goût, les coups portés à sa maladie sont donc également déplacés.

Passons maintenant aux États-Unis: la hausse des cas est-elle réelle? En attendant, par rapport à la population, les États-Unis sont à la neuvième place dans le monde pour le nombre d’infections. De nombreux nouveaux cas sont découverts chaque jour. Ce fait ne coïncide cependant pas avec le nombre de décès quotidiens (378, le 6 juillet) qui a atteint son minimum historique, du 26 mars à aujourd’hui. Et c’est un chiffre en constante diminution.

Que pourrait signifier cette divergence? Elle pourrait signifier que l’augmentation du nombre de cas est due à une augmentation du nombre de tests. Tandis que la baisse du nombre de décès indique une amélioration générale de la situation. Ne le disons pas trop fort (par superstition), mais malgré l’hyperexposition médiatique de l’Amérique de Trump, les choses pourraient vraiment s’améliorer de l’autre côté de l’Océan. Curieusement, aucun commentateur ne pense à blâmer les manifestations de masse de Black Lives Matter, des rassemblements gigantesques qui sont même approuvés par de nombreux médecins (qui y participent et les bénissent).

Pour les protestations des antiracistes, la même règle, médiatique, de terreur pour les rassemblements n’est pas valable. Terreur qui nourrit quotidiennement la narration du Covid-19. Vous souvenez-vous de ce qui a été dit fin avril sur les risques liés au déconfinement [partiel] du 4 mai ? Selon un rapport qui a fini directement entre les mains de Conte, il était dit que, d’ici la fin juin, jusqu’à 151 000 personnes malades en soins intensifs seraient en danger si tout était rouvert. Heureusement, les prévisions se sont révélées très erronées: le 7 juillet, le nombre total de patients en soins intensifs est de 70.

A la mi-juin, la grande fête pour la victoire de Naples dans la Coupe d’Italie, avait élevé le seuil d’alarme hors de toute proportion, faisant dire à Ranieri Guerra, directeur général adjoint des initiatives stratégiques de l’OMS: « Malheureux. Cela fait vraiment mal de voir ces images ». Et pourtant au 7 juillet: l’augmentation hebdomadaire des cas est supérieure à la moyenne nationale, mais la prévalence est en dessous. Et il n’y a pas de nouveaux foyers à Naples. En Campanie, il y en a deux: un à Mondragone, dans des maisons habitées par des immigrés bulgares, et un à Santa Maria di Serino, toutes ces affaires étant imputables à une seule unité familiale. Il est difficile de trouver des liens avec les festivités pour Naples.

Les messages de cette narration sont-ils surtout politiques ? On pourrait le penser, car ils sont tous cohérents les uns avec les autres : Bolsonaro et Trump sont dans le collimateur des médias (ils le sont de toute façon, mais surtout depuis le début de l’épidémie) parce qu’ils s’opposent à une stratégie de confinement. Idem pour les gouverneurs américains qui sont moins enclins à tout fermer. Et pour l’Italie, il en va de même: tout ce qui remet en cause l’injonction « restons à la maison » est décrit comme un danger très grave: la « teuf« , une fête du football, une réouverture des activités économiques. Sauf ensuite, toujours en Italie, à faire des exceptions flagrantes, comme la non condamnation des rassemblements du 25 avril ou ceux pour les manifestations (italiennes) de Black Lives Matter. C’est la défense à tout prix du « modèle italien » de lutte contre l’épidémie, dérivé du modèle chinois, et une condamnation a priori de tout ce qui pourrait le remettre en cause. Et pourtant, nous devrions avoir quelques doutes, ici même en Italie, le pays qui a appliqué le confinement le plus rigide et le plus durable au monde et qui connaît aujourd’hui l’un des nombres de décès les plus élevés au monde (par rapport à la population) et la pire crise économique en Europe.

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