Dans l’éditorial de la NBQ d’aujourd’hui, ce que nos voisins appellent le lockdown est qualifié de « hantise italienne ». En France, après le confinement – un mot apparemment passé de mode, sinon sur le mode menace -, il vaudrait mieux parler d' »arrêt », et ce n’est pas moins une hantise française. Mais qu’en est-il dans les pays autres que ceux de nos voisins immédiats, et en particulier hors d’Europe? En lisant cet article, on réalise que le monde ne se réduit pas à notre petite zone européenne, qui nous donne une lecture des évènement pour le moins déformée. Et on a quelques surprises.

Lockdown, hantise italienne. Les autres recherchent la normalité

Eugenio Capozzi
La NBQ
17 octobre 2020
Ma traduction

Ce n’est que dans une partie du continent européen – et avec des pics paroxystiques en Italie – que les gros titres des journaux sont consacrées à l’épidémie de Covid. Dans le reste du monde, c’est la poussée vers la normalité qui prévaut parce que l’opinion publique et les classes dirigeantes croient que la pandémie est certes un problème, mais que la réaction alarmiste a causé des dommages bien pires que le virus, paralysant l’économie. Une tendance confirmée également par le changement d’approche de l’OMS sur les politiques de lockdown. Chez nous, par contre, nous sommes de plus en plus aspirés dans le « trou noir » lockdowniste, complètement indifférents à l’effondrement économique auquel nous conduisons le pays.

Si vous parcourez rapidement les premières pages et les sites web des journaux dans différentes parties du monde, un fait fondamental vous saute immédiatement aux yeux: ce n’est que dans une partie du continent européen – et avec des pics paroxystiques notamment en Italie [France] – que les gros titres sont consacrées à l’épidémie du covid. Dans l’écrasante majorité des cas, la situation sanitaire liée au virus est reléguée parmi les nouvelles brèves et dans les pages internes, ou est considérée comme une nouvelle parmi les autres, sans occuper une place de choix. Les titres alarmistes font de moins en moins la une.

Dans les pays très peuplés – comme l’Inde, le Brésil, l’Argentine, la Russie – ce qui occupe les médias, ce sont les nouvelles sur l’économie et la politique, avec quelques mises à jour sur les contagions, la recherche de vaccins ou les thérapies. Cela étonne d’autant plus l’observateur italien [français] que nos médias présentent plus ou moins ces pays comme étant toujours aussi dévastés par la maladie, comme si une hécatombe était en cours. Le taux d’importance accordé au covid est plus élevé dans les journaux d’Europe centrale et orientale, dans les Balkans et dans les pays germanophones, alors qu’il reste très faible dans les pays scandinaves. Aux États-Unis, il est très variable d’un État à l’autre, et dépend de l’orientation des médias (naturellement grossi par les médias anti-Trump), mais généralement modéré. Tout comme il est est modéré au Canada et au Mexique, qui font pourtant partie des pays les plus touchés. Ce n’est que dans la zone située entre l’Italie, l’Espagne, la France, le Royaume-Uni et le Benelux qu’il semble au lecteur des journaux que le covid est le principal sujet d’actualité.

J’ai déjà mentionné les causes culturelles de cette particularité dans un précédent article de ces pages, en soulignant que le catastrophisme sur covid est directement proportionnel à l’âge, au degré d’infertilité et de concentration urbaine des personnes âgées dans les pays européens les plus industrialisés. Ce qu’il me semble important de souligner aujourd’hui, par contre, c’est que, dans le reste du monde, et plus particulièrement dans les grands pays de l’hémisphère sud, la poussée vers la normalité, le souci de la croissance économique, ou celui des équilibres politiques internes et internationaux, l’emportent résolument sur l’alarmisme, la panique « virale » et l’attention spasmodique portée aux mesures de lutte contre le virus – avant tout la « distanciation sociale » et le confinement. En résumé, dans une grande partie du monde, l’opinion publique et les classes dominantes croient que la pandémie est certes un problème, mais que la réaction alarmiste basée sur les restrictions, les confinements, les fermetures a causé des dommages bien pires que le virus, paralysant l’économie de régions entières, bloquant des processus de développement délicats, plongeant le monde globalisé dans une dépression pire que celle de 2008, qui pourrait avoir des coûts sociaux incalculables, et en perspective faire beaucoup plus de victimes de la maladie parmi les classes les plus fragiles.

Ce n’est pas un hasard si cette attitude se reflète largement dans le récent changement de ligne de l’OMS, qui est apparu il y a quelques jours dans l’interview donnée au « Spectator » par David Nabarro, envoyé spécial de l’Organisation pour la Pandémie. Lequel a fait valoir que, selon l’Organisation elle-même, les lockdowns, justifiés uniquement comme mesure d’urgence temporaire visant à réorganiser la réponse sanitaire, ne devraient pas être utilisés comme le principal moyen de vaincre le virus, d’autant plus qu’ils ont des effets désastreux sur l’économie mondiale, en particulier sur les nations les plus pauvres. Les déclarations faites par le britannique Nabarro semblent être un défi clair à la politique menée ces derniers mois par le directeur général de l’OMS, Tedros Ghebreyesus. Et, fait significatif, l’envoyé spécial y ajoute une appréciation explicite de la déclaration de Great Barrington, récemment signée par plus de 1600 scientifiques du monde entier, qui affirme que la meilleure stratégie pour combattre le covid n’est pas celle de restrictions aveugles, mais celle d’une protection ciblée des sujets les plus fragiles, couplée à un retour à la normale le plus complet possible pour le reste de la société. Une position appréciée également par l’administration Trump.


Qu’en est-il de la Chine ? Assurément, quelle que soit la thèse que l’on veuille faire valoir sur la politique tenue par elle à l’origine de la pandémie, le régime de Xi Jinping a habilement exploité le récit officiel selon lequel sa politique de lockdown a tué le virus dans la phase initiale, et a pleinement profité du fait que si son économie est rapidement revenue aux niveaux d’avant le virus, l’Occident est resté embourbé dans la crise sanitaire comme dans la crise économique. On se demande cependant, étant donné que l’OMS n’exprime pas vraiment d’opinions susceptibles de déplaire à Pékin, si même en Chine ne commence pas à s’insinuer l’inquiétude concernant les répercussions négatives qu’une récession mondiale profonde et durable provoquée par le covid pourrait avoir sur l’économie de la plus grande puissance manufacturière d’Asie, fondée sur les exportations, qui pourrait voir son espace de marché se rétrécir considérablement.

En tout cas, parmi tous ces changements de route, pour le moment très peu de choses semblent avoir atteint les classes dirigeantes et les médias des Européens de l’Ouest. Ils semblent vivre dans un monde qui leur est propre, dépourvu de références et de véritable débat sur le sujet, de plus en plus aspirés dans le « trou noir » d’une coercition ne répondant au problème sanitaire que par des politiques « lockdownistes« , renforçant encore les régimes « bio-sécuritaires », et complètement indifférents à l’effondrement économique auquel ils conduisent leurs pays.

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