Stefano Fontana commente le Responsum de la CDF du point de vue de l’autorité magistérielle du document, ou plutôt du type de document choisi pour affronter la question. Comme si le Pape voulait « dire et ne pas dire, plaire à ceux-ci sans déplaire à ceux-là ». Bref, s’esquiver: une réponse politique plus que religieuse, conforme à la « méthode Bergoglio ».

Quand le Magistère se réduit à de la politique

Stefano Fontana
La NBQ
24 mars 2021
Ma traduction

Le critère de choix de l’instrument et de la formule d’approbation des documents pontificaux devient politique, une façon de dire et de ne pas dire, de plaire à ceux-ci sans déplaire à ceux-là. Les notes de bas de page d’Amoris laetitia font école.

Il est notoire que les interventions du Magistère sont de différents niveaux, et avec la même diversité obligent les fidèles à l’assentiment. Le choix du support dans ce cas est d’une grande importance, car il indique déjà la valeur du contenu. Qu’il s’agisse d’une Encyclique ou d’une Lettre Apostolique, les fidèles qui l’écoutent comprennent déjà le niveau de Magistère qui leur est proposé. Je rappelle, par exemple, qu’en 1971, Paul VI a commémoré le 80e anniversaire de Rerum novarum non pas par une encyclique, comme l’avaient fait jusqu’alors Pie XI en 1931 et Jean XXIII en 1961, mais par une lettre apostolique, Octogesima adveniens. Ce choix du support – pas une encyclique, mais une lettre – a suffi à faire dire à beaucoup que Paul VI avait l’intention de diminuer la valeur de la Doctrine sociale de l’Église après le tournant du Concile. L’utilisation du support a été immédiatement traduite en contenu, le fait que ce soit bien ou en mal n’est pas ce qui nous occupe ici.

La même chose doit être dite pour les documents des Dicastères pontificaux. Une formule très utilisée est par exemple la suivante: « Le Souverain Pontife, au cours de l’audience accordée au Cardinal Préfet soussigné, a approuvé la présente Instruction et en a ordonné la publication ». Dans ce cas, le document revêt une importance considérable puisqu’il est expressément approuvé par le Pape. Les Instructions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi se concluent habituellement par cette expression, dans certains cas cependant, l’expression est renforcée: par exemple, dans l’Instruction Dominus Jesus, il est dit que le Pape « en toute connaissance de cause et avec son autorité apostolique a ratifié et confirmé cette Déclaration ». Comme nous pouvons le voir, dans ce cas, la volonté du pape de définir des doctrines de la foi de manière certaine est soulignée, ce qui donne aux doctrines spécifiées une autorité encore plus grande.

Le choix de l’instrument – une encyclique ou une lettre apostolique pour le pape, ou une instruction, un vade-mecum ou un décret pour un dicastère pontifical – et le choix des formules définissant le mode de son approbation sont donc très importants car ils avertissent objectivement le peuple chrétien de l’importance des enseignements dispensés. Si le bureau de presse du Saint-Siège publie un communiqué farfelu, s’il fait une déclaration inexacte, s’il rectifie de manière inconvenante ou s’il ne nie pas ce qui devrait être nié… cela cause certainement des dommages. Mais jamais aussi significatifs que lorsque l’incertitude concerne l’instrument choisi pour transmettre l’enseignement magistériel ou la formule qui en précise le degré d’autorité: ici, en effet, c’est la foi qui est en jeu.

En ce qui concerne le Responsum de la Congrégation de la Doctrine de la Foi sur l’interdiction de bénir les couples homosexuels, une véritable guerre est née, où tous les coups sont permis, concernant le degré d’autorité du document et, en particulier, s’il avait été fait sien par le Pape. La formule de conclusion était cette fois-ci la suivante: « Le Souverain Pontife François, au cours d’une audience accordée au Secrétaire soussigné de cette Congrégation, a été informé et a donné son accord à la publication du Responsum ad dubium susmentionné, avec la note explicative annexée ». Avait-il été simplement informé ou l’avait-il formellement approuvé avec tout le poids de son autorité apostolique? Ici, les partis existants, tant au sein de la Curie romaine que dans toute l’Église, se sont déchaînés.

La vraie question me semble être la suivante. Il fut un temps où le choix de l’instrument et des formules qui exprimaient sa relation avec l’autorité des Pontifes pour paître les agneaux et lier et délier sur la terre avait une base doctrinale objective claire. Le critère à suivre était le contenu doctrinal et moral à exprimer, étant donné que le magistère authentique et celui ordinaire ont des niveaux différents d’expression, d’extériorisation et de pouvoir liant les consciences des fidèles. Mais c’est précisément en cela que le changement a eu lieu, et surtout qu’il a lieu. Le critère de choix de l’instrument et de la formule d’approbation devient politique, une façon de dire et de ne pas dire, de plaire à ceux-ci sans déplaire à ceux-là. Les notes de bas de page d’Amoris laetitia sont en train de faire école.

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