Le site argentin The Wanderer poursuit ses investigations et ses réflexions sur l’Eglise aujourd’hui, et particulièrement sur le pontificat bergoglien, et il n’y va pas par quatre chemins. Certains lui reprocheront d’être trop pessimiste, mais pour lui, l’Eglise est en phase terminale. En annexe, « Le cannibalisme institutionnel », un portrait prémonitoire du Pape, issu du même site, datant de 2013.

Voir aussi, du même site:

Et aussi, l’enquête très fouillée de Giuseppe Nardi:

Le principe [de François] est le suivant: ne jamais signer ce qui est contraire à la doctrine, mais approuver et encourager les changements par des gestes et des opérations de presse.

Illustration d’un fameux article de Damian Thompson
(cf. benoit-et-moi.fr/2015-II/actualite/pape-vs-eglise)

Présages de crise terminale/ Les ambiguïtés délibérées de François et Vatican III

AM Valli (pour la traduction en italien)
(source en vo: caminante-wanderer)
Ma traduction

Nous savons depuis des décennies que l’Église est en crise. Cependant, ces dernières années et surtout ces derniers mois, nous assistons, à mon avis, à la manifestation de présages qui indiquent l’imminence de l’issue finale. La crise est terminale, c’est-à-dire irréversible. Il n’y a pas de retour possible. Sans intervention divine directe, l’Église catholique disparaîtra dans la prochaine décennie, transformée en une multinationale religieuse, défigurée dans son caractère originel et transformée en un furieux persécuteur des quelques catholiques fidèles au depositum fidei.

Lorsque le pape François nous a révélé les histoires d’amour de Letizia il y a quelques années [référence sarcastique à Amoris laetitia, note d’AMV], nous avons commencé à voir que la question ne se réduisait plus au latin ou à l’utilisation des guitares dans la liturgie. C’est la doctrine qui était touchée.

Ces jours-ci, nous avons été témoins des développements comiques provoqués par la déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi niant la possibilité de bénir les couples homosexuels, une question qui, pour un catholique normal ayant appris le catéchisme, est d’une vérité évidente. Eh bien, ce qui aurait dû être une réponse presque superflue et évidente a provoqué un grand débat. Pour ne citer que quelques exemples, des prêtres autrichiens ont clairement fait savoir qu’ils n’obéiraient pas, tout comme de nombreux Allemands, tandis qu’un évêque belge de premier plan, Mgr Johan Bonny, a déclaré qu’il avait honte de l’Église à cause d’un tel document et qu’il présentait ses excuses à tous les couples homosexuels, ainsi qu’à leurs parents et grands-parents.

Jusqu’à présent, le Saint-Siège n’a pas réagi à ces signes de rébellion contre la doctrine de la foi catholique, alors que l’évêque Eduardo Taussig et de nombreux autres évêques continuent de sanctionner des prêtres et des fidèles pour avoir donné et reçu la communion dans la bouche. Je ne sais pas si nous réalisons la situation d’apostasie dans laquelle nous nous trouvons, ou si nous avons l’impression que tout est normal.

Je ne vais pas répéter ici l’histoire du document de la CDF et des marches et contre-marches qui ont suivi et qui ont été suffisamment documentées ailleurs, mais cela vaut la peine de l’analyser.

L’épisode dépeint Bergoglio dans son intégralité. Son principe est le suivant: ne jamais signer ce qui est contraire à la doctrine, mais approuver et encourager les changements par des gestes et des opérations de presse. C’est la vieille tactique des jésuites et des péronistes. Un ami a opportunément rappelé l’histoire du Grand Tamerlan de Perse [dans laquelle le protagoniste se déguisait en marchand la nuit et visitait les bas fonds et le jour se déchaînait contre le peuple dans son palais, ndlr]. Certains médias italiens se sont demandés si cela n’était pas un signe de déséquilibre psychologique de Bergoglio. À mon avis, c’était une manœuvre parfaitement planifiée.

Il est clair et indiscutable que la réponse de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a été publiée avec l’autorisation expresse du Pontife. Le même document indique: « Le Souverain Pontife François, au cours d’une audience accordée au Secrétaire soussigné de cette Congrégation, a été informé et a donné son consentement à la publication du Responsum ad dubium cité, avec une note explicative jointe ». Les explications typiquement jésuites de Pino Piva [Père Pino Piva, jésuite, « expert dans les parcours d’accompagnement pastoral des personnes homosexuelles », ndlr] n’ont pas de fondement.

Quelques jours après la publication du document et le tollé qui s’en est suivi, l’association journalistique formée par le couple Gerard O’Donnell – Elisabetta Piqué, avec des articles associés dans les médias internationaux (American Magazine et La Nación) a pris des mesures pour nous informer que, selon des sources confidentielles à Santa Marta, le Pape François était très troublé par la note de la CDF, comme le montreraient les paroles prononcées à l’Angélus du 21 mars. Les articles sont apparus immédiatement après la fin de la prière, ce qui suggère qu’ils avaient été préparés bien à l’avance. Beaucoup se sont demandés qui pouvait être cette source faisant autorité. Je n’ai aucun doute : c’est Bergoglio lui-même. Il est un ami personnel du couple O’Donnell-Piqué et l’a déjà utilisé à d’autres occasions, notamment en tant qu’archevêque de Buenos Aires, pour ses opérations de presse.

Bergoglio, pour un motif quelconque, veut changer la pratique de l’Église à l’égard des personnes homosexuelles, non seulement en autorisant leur comportement, mais en le bénissant. Il ne peut pas ou ne veut pas signer un changement doctrinal officiel, qui serait catastrophique pour l’unité déjà faible de l’Église et le ferait entrer dans l’histoire comme un apostat patenté. Ce qu’il fait, donc, c’est d’atteindre son but avec des allusions et des discours ambigus, pour que de toute façon tout le monde comprenne ce qu’il veut à travers la presse internationale alignée sur lui […] Tout a été soigneusement planifié par François.

Comme si l’ambiguïté des paroles de l’Angélus ne suffisait pas, mardi, dans un discours prononcé à l’occasion de l’anniversaire de rien de moins que saint Alphonse Marie de Liguori, François a donné des indices beaucoup plus clairs, même si son ambiguïté est cette fois passée presque inaperçue. Il a dit : « …J’invite les théologiens moraux, les missionnaires et les confesseurs à entrer dans une relation vivante avec les membres du peuple de Dieu, et à regarder l’existence sous leur angle, afin de comprendre les difficultés réelles qu’ils rencontrent et d’aider à guérir leurs blessures…La théologie morale ne peut pas réfléchir seulement à la formulation de principes, de normes, mais il est nécessaire qu’elle prenne en charge de manière propositionnelle la réalité qui dépasse toute idée. Il s’agit d’une priorité car la seule connaissance des principes théoriques, comme le rappelle saint Alphonse lui-même, ne suffit pas pour accompagner et soutenir les consciences dans le discernement du bien à faire ».

Bergoglio, paraphrasant Perón, dit : « Ne regardez pas ce que je signe, mais ce que je dis ». Après ces propos, avec quelle autorité peut-on reprocher, par exemple, au prêtre salésien qui, il y a quelques semaines, a béni publiquement un couple homosexuel à Ushuaia? Ce n’était rien d’autre qu’un bon pasteur qui savait regarder la réalité et, prenant ses distances avec les principes théoriques, il accompagnait les consciences et guérissait les blessés.

Ces événements rappellent et confirment l’intuition que Ludovicus http://caminante-wanderer.blogspot.com/2013/09/notas-sobre-canibalismo-institucional.html a eue dans les premiers mois du pontificat bergoglien, en inventant l’expression « cannibalisme institutionnel » (*). Elisabetta Piqué a écrit dans La Nación: « Bien que la lettre d’aujourd’hui, comme l’Angelus de dimanche dernier, n’ait pas fait référence au responsum de la CDF, document qui avait l’assentiment du Saint-Père, le message a clairement montré la vision contrastante du pape François et de l’Église en termes de contenu et de langage ». Je me demande comment il peut y avoir un contraste entre la vision du pape et celle de l’Église. Le message de la journaliste – et c’est le message que Bergoglio veut faire passer – est que le pape est le bon et l’Église la mauvaise, empêche le développement des bonnes intentions et des actions du pape.

Enfin, et comme on l’a dit il y a quelques jours, François n’est pas, comme beaucoup d’entre nous le croyaient, l’incarnation de Vatican II. Cette malheureuse assemblée n’a pas jeté la pierre aussi loin. François EST Vatican III.

Annexe

Couverture de The Windswept house

(*) Le cannibalisme institutionnel


(I) Le cannibalisme institutionnel consiste à se nourrir de la mauvaise réputation de l’institution à laquelle on appartient, en acceptant les versions péjoratives, les préjugés et les calomnies, en s’y opposant et en sauvant ainsi la face personnellement. Lorsqu’elle est exercée par la personne qui détient la représentation suprême de l’institution, elle peut atteindre le rang de trahison. Souvent, ce sauvetage individuel de la face est justifié comme un moyen de sauver le sauvable de l’institution honnie, qui est sauvé, en théorie, par le triomphe du cannibale: « cette organisation ne peut pas être si mauvaise si elle elle a un si bon président ».

(II) Il se distingue d’une autocritique saine par la perspective de la personne qui l’exerce, qui est généralement exogène et proche de la pensée politiquement correcte ou actuelle. La critique du cannibale institutionnel, explicite ou tacite, n’est fondamentalement pas différente de celle de l’ennemi. Ou elle est accompagné d’un silence sur l’interprétatione de l’ennemi. Ou, en tout cas, l’autocritique n’est pas suivie par la mise en évidence des erreurs de l’ennemi ou l’exaltation des principes qui AGACENT l’ennemi de l’institution.

(III) Le cannibale institutionnel semble étranger à l’institution. C’est comme s’il y était venu par hasard, et il s’en distancie définitivement. Il la critique comme un nouveau venu, un parvenu, pourrait la critiquer. Lorsqu’il représente l’institution, il le fait comme acteur, comme celui qui tient un rôle imposé dont il se dépouille joyeusement à la fin du spectacle, épuisé par la représentation. L’institution, ses fondements et son histoire sont sous tout son jugement et son examen, il ne l’assume pas comme un axiome mais comme un problème. Rien de plus éloigné de ce cannibalisme que Napoléon, lorsqu’il prononçait: «De Clovis à la Convention, je me charge de tout».

(IV) Le paradoxe est que cette aliénation avec l’institution coexiste généralement avec une attitude de pouvoir jamais vue auparavant. Le cannibale la considère comme sienne et en même temps la rejette. C’est un maître, pas un représentant. En tant que propriétaire, il s’estime parfaitement habilité à la dévorer et à la refaire. Il est un héritier bénéficiant d’un inventaire perpétuel.

(V) Le cannibale institutionnel n’est pas l’autre face du triomphaliste, mais seulement son opposé. Alors que le triomphaliste tente de s’approprier la renommée de l’institution, l’exaltant et s’exaltant dans une fusion idolâtre qui lui fait perdre l’âme, les principes et la cause finale de l’institution elle-même (ce qui se justifiera, naturellement, dans la tentative humaine de vouloir lui donner éclat et gloire), le cannibale institutionnel, avec la même attitude et la même intention, avec le même élan anthropique et pélagien, privatise le triomphalisme en s’exaltant. Il s’excusera pour les crimes et les erreurs de l’institution, rarement pour les siens.

(VI) Le cannibale institutionnel prétend remplacer par sa gloire le prestige des siècles. Avec les mauvaises herbes de l’approbation populaire, l’humus de l’Histoire. Avec les vieux livres, les meubles séculaires, les vêtements vénérables, il construit un feu de joie qui brille d’un éclat jamais vu auparavant. Le lendemain matin, il trouvera des cendres. Comme un Cronos inversé, il sera dévoré par son fils.

(https://caminante-wanderer.blogspot.com/2013/09/notas-sobre-canibalismo-institucional.html, 21 septembre 2013)

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