Un prêtre est envoyé de Rome dans un monastère d’une île perdue située au large de l’Irlande continentale pour soumettre à l’abbé et à sa petite communauté un ultimatum: cesser immédiatement de dire la messe en latin et obéir aux autres exigences de la bulle papale Vatican IV destinée à faire entrer la foi dans le XXIe siècle, ou être mutés d’office. Une « religion-fiction » prophétique, datant de 1972, mais censée se passer autour de l’an 2000. Et en effet, nous somme en plein dedans!

Une belle surprise. Explorant le rayon DVD d’une grande surface culturelle, je suis tombée par hasard sur un film dont le titre « Catholics » a forcément attiré mon attention, bien que la présentation au revers de la jaquette laissât supposer une charge (une de plus) politiquement correcte et binaire contre l’obscurantisme de l’Eglise.

Mais ce n’était pas le cas. D’abord parce que le court (80′) film date de 1972, et se présente comme une sorte d’uchronie ou de dystopie, imaginant ce qui devait se passer dans un futur qu’on peut situer au début des années 2000. Et là, on est bluffés, car Brian Moore, l’auteur du roman éponyme dont est tiré le scénario, avait vu juste, et nous y sommes, à quelques détails près: l’Église du XXIe siècle imaginée ici est dirigée par un Concile œcuménique à Amsterdam et elle se prépare à s’unir aux bouddhistes. Et les amoureux de l’ancienne messe sont priés de rentrer dans le rang, au risque de sanctions de l’autorité romaine

Voici le résumé de Wikipedia (en anglais):

Catholics est un  téléfilm de 1973 également connu sous le nom de
 Conflict ,  A Fable of the Future  et  The Visitor.
Basé sur  le roman du même nom de  Brian Moore, qui a également écrit le scénario du film, il est interprété par Trevor Howard,  Martin Sheen et
 Cyril Cusack

Le roman original de Brian Moore a été écrit en 1972. Le film se déroule en l’an 2000, une année dans le futur.
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Au mépris de Sacrosanctum Concilium, des édits du Concile Vatican II et d’un futur Concile Vatican IV, un groupe de moines d’un monastère situé sur une île au large de la République d’Irlande célèbre la messe traditionnelle tridentine en latin sur le continent irlandais. Ces messes traditionnelles sont si populaires que des groupes du monde entier se rendent en pèlerinage pour assister à ces messes et exprimer leur mécontentement face aux changements intervenus dans l’Église catholique romaine. Ce futur concile du Vatican détruit également le mystère de la messe, nie la transsubstantiation et insiste pour que les prêtres ne portent les vêtements cléricaux que lors de cérémonies.
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Le Vatican est excédé par les débuts d’une contre-réforme potentielle, en particulier au moment où un dialogue interconfessionnel est sur le point de se dérouler à Singapour. Le Père Général envoie le Père Kinsella, un fervent adepte de la théologie de la libération, pour ordonner aux moines de changer leurs habitudes ou d’être transférés dans d’autres monastères.

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https://en.wikipedia.org/wiki/Catholics_(film)
Illustration de la couverture du livre de Brian Moore

Le film, qui par son sujet cible un public de niche (mais devrait intéresser les lecteurs de mon site…?), pose avec finesse le problème de l’autorité et de l’obéissance dans l’Eglise. Il respecte la triple unité de temps, de lieu et d’action (tout se déroule durant le très bref laps de temps, un ou deux jours, entre l’arrivée du jeune prêtre américain sur l’île sauvage et son départ en hélicoptère, alors qu’une tempête menace de l’y bloquer), et en ce sens il évoque un peu du théâtre filmé.
Au fil des conversations entre le Père abbé et le jeune prêtre imprégné de l’idéologie politique issue de la théologie de la libération, avec en guise de chœur et de toile de fond, la communauté vivant au monastère, ce sont deux univers irréconciliables qui s’affrontent; les certitudes s’effritent (des deux côtés!), mais ce n’est jamais caricatural, jusqu’à la scène finale, où l’Abbé, qui avait perdu depuis des années la foi et ne sauvait les apparences (et préservait sa situation) que grâce au principe d’autorité, et qui ne parvenait plus à prier, y arrive enfin.

Bref, comme je le disais dans le titre, une belle surprise.

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