La question vaut d’être posée au moment où, à peine nous a-t-on annoncé que l’horizon s’éclaircissait enfin et qu’ « omicron » (pas si terrible que ça, au fond, admettent tardivement les médias), était sur le point de plier bagages, qu’un nouveau variant – ou plutôt sous-variant (ou sous-sous-sous variant du covid initial, on s’y perd) au nom aussi ésotérique qu’improbable de BA.2 allait faire son entrée. Dans un article intitulé « La fin de la pandémie ne sera pas télévisée », résumé sur la Bussola par Tommaso Scandroglio, le British Medical Journal (que je m’abstiens prudemment de qualifier de « très sérieux ») explique que les paramètres ne sont pas purement numériques, que d’autres critères sont à prendre en compte et donc, pour faire court, que la pandémie cessera quand « eux » l’auront décidé. Mais aussi quand elle cessera d’alimenter les écrans et donc également (et là, c’est NOTRE responsabilité) quand nous cesserons de nous comporter fébrilement en covid-accro.

La fin de la pandémie (quand « eux » le décideront)

Tommaso Scandroglio
https://lanuovabq.it/it/la-fine-della-pandemia-quando-lo-decideranno-loro
24 janvier 2022

Quand la pandémie prendra-t-elle fin ? Non pas quand le nombre de morts sera nul, mais quand la société cessera d’être entièrement absorbée par les chiffres-choc de la pandémie. C’est à nous aussi qu’il revient de veiller à ce qu’il ne s’agisse pas d’un produit appétissant pour les grands médias.

La fin de la pandémie ne dépend pas du virus, mais des gouvernements et des médias. Le British medical journal a récemment publié un article intéressant intitulé The end of the pandemic will not be televised. David Robertson et Peter Doshi, les deux auteurs de l’article, écrivent :

« Il n’existe pas de définition universelle des paramètres épidémiologiques de la fin d’une pandémie. Par quel paramètre, alors, saurons-nous que c’est effectivement terminé ? L’Organisation mondiale de la santé a déclaré une pandémie de covid 19, mais qui nous dira quand elle sera terminée ? ».

Les auteurs expliquent que l’infodémie [mot-valise inventé en 2000 et que le covid a fait entrer dans le langage courant, ndt] galopante « a contribué à la perception que la pandémie sera terminée lorsque tous les indicateurs […] atteindront zéro (infections, cas, décès) ou 100 (pourcentage de vaccinés). Cependant, les pandémies respiratoires du siècle dernier montrent que la fin n’est pas précise et que la fin de la pandémie doit être comprise comme la reprise de la vie sociale, et non comme la réalisation d’objectifs épidémiologiques spécifiques. Les pandémies respiratoires des 130 dernières années ont été suivies de vagues saisonnières annuelles alimentées par une endémicité virale qui se maintient généralement jusqu’à la pandémie suivante ».

En particulier, l’article souligne que le critère « zéro maladie » et/ou « zéro mortalité » ne peut être considéré comme un critère valable pour déclarer la fin de la saison pandémique :

« L’idée […] qu’une pandémie prend fin lorsque le nombre de cas ou de décès tombe à zéro est en contradiction avec les preuves historiques selon lesquelles une morbidité et une mortalité substantielles dues à la grippe continuent de se produire saison après saison entre les pandémies ».

En outre, l’indice de mortalité peut également être trompeur pour une autre raison. Les auteurs mettent en garde contre le fait que « la fin d’une pandémie ne peut être définie par l’absence de décès en excès associés à l’agent pathogène pandémique ». Cela signifie que le critère suivant doit être rejeté : lorsque le nombre de décès par an se situe dans la moyenne annuelle, cela signifie que la pandémie est terminée. Mais ce critère n’est pas valable car on a vu que parfois, dans les périodes entre une pandémie et une autre, il y a eu plus de décès. On pourrait donc décréter à tort la fin d’une pandémie parce que le taux de mortalité est plus faible que dans les périodes passées, périodes qui toutefois sont hors moyenne.

Passons à un autre critère permettant d’établir la fin d’une pandémie : « la levée des mesures ou des restrictions visant à protéger la santé publique ». Les auteurs notent, entre autres, que « par rapport aux pandémies précédentes, la pandémie de covid-19 a entraîné une perturbation sans précédent de la vie sociale ».

Mais quand les restrictions seront-elles levées ? Telle est la question : quand les gouvernements, les lobbies du pouvoir, les élites politiques utiliseront les médias pour dire que la pandémie est terminée. L’affirmation semble évidente – fin de la pandémie égale fin des restrictions – mais en réalité, ce n’est pas si évident.

En résumé, les deux auteurs nous disent que la fin de la pandémie ne dépend pas du virus, mais du couple gouvernement-médias :

« Les pandémies ne prennent pas fin lorsque la transmission de la « maladie » s’arrête, mais plutôt quand, dans l’attention du grand public et dans le jugement de certains médias et des élites politiques qui façonnent cette attention, la maladie cesse d’être digne d’intérêt .

Tout est donc entre les mains de ces groupes de pouvoir : tant que l’on en parle et que l’on en parle d’une certaine manière, la pandémie ne s’arrêtera pas :

Les dashboard [tableaux de bord] pandémiques (tableaux, graphiques, fromages, schémas récapitulatifs, etc.) alimentent en continu l’actualité de la pandémie de covid-19, même lorsque la menace est faible. De cette manière, ils pourraient prolonger la pandémie en influençant négativement la perception qu’elle est terminée ou en limitant le retour à la vie pré-pandémique ».

Ainsi, mettre fin aux flux continus d’informations « pourrait être l’option la plus efficace et l’unique pour mettre fin à la pandémie ».

D’où la conclusion :

L’histoire suggère que la fin de la pandémie ne sera pas la simple conséquence de l’obtention d’une immunité collective ou le résultat d’une déclaration officielle, mais qu’elle se produira plutôt de manière progressive et inégale, à mesure que la société cessera d’être entièrement absorbée par la mesure choc de la pandémie.

Si le récit du gouvernement et des médias est apaisant, la perception collective mettra fin à cette saison pandémique, sinon, hypothétiquement, la pandémie pourrait ne jamais cesser. En somme, la pandémie continuera d’exister tant qu’elle continuera d’exister dans nos têtes :

La fin de la pandémie est plus une question d’expérience vécue, et donc plus un phénomène sociologique que biologique. […] La pandémie de covid-19 sera terminée lorsque nous éteindrons nos écrans et déciderons que d’autres questions méritent à nouveau notre attention. Contrairement à son début, la fin de la pandémie ne sera pas  » télévisée « 

… c’est-à-dire qu’il n’y aura pas de jour précis où la télévision et les journaux annonceront cette nouvelle.

Enfin, le non-dit de l’article est peut-être le suivant : c’est aussi à nous de commencer à ne pas penser à la pandémie tout le temps, et à nous extraire du flux constant d’informations à son sujet. Notre manque d’intérêt découragera les médias de parler encore du covid. Et donc, semblent suggérer les deux chercheurs, faisons en sorte que le covid ne soit plus un produit alléchant pour les grands médias.

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