« Nous applaudissons l’acte du Pape François et nous nous y associons de tout cœur s’il suit les exigences fixées par Notre Dame à Fatima. Cependant, tant que cet acte ne sera pas suivi d’une véritable croisade spirituelle contre l’immoralité rampante – avortement, homosexualité, mode indécente, pornographie, gender, etc. – la simple consécration de la Russie – aussi agréable soit-elle pour la Providence divine – n’évitera pas le châtiment ».

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Julio Loredo

Depuis que le pape François a annoncé qu’il consacrerait la Russie (et l’Ukraine) au Cœur Immaculé de Marie, avec tous les évêques du monde – à qui il a lancé un appel spécifique en ce sens -, l’ensemble du monde catholique vit dans l’attente de cet événement historique.

Certains, animés d’un esprit pieux, voient dans le geste pontifical une solution définitive qui mettra fin à la guerre, conduira à la conversion de la Russie et à la réhabilitation morale du monde moderne. D’autres, en revanche, sont critiques et soulignent les éventuelles omissions et contradictions. Quoi qu’il en soit, il convient de noter que l’annonce du pape François – plaçant Fatima au centre des événements contemporains – a touché une fibre profonde dans l’opinion publique mondiale [est-ce si sûr? En France, hors un microcosme catholique, la nouvelle ne fait aucun titre, ndt].

L’acte de François est lié à une demande précise faite par Notre Dame à Fatima en 1917.

En parlant aux Pastoureaux, la Sainte Vierge a voulu s’adresser au monde entier, exhortant tous les hommes à la prière, à la pénitence et à la modification de leur vie. D’une manière particulière, Elle s’est adressée au Pape et à la hiérarchie sacrée, leur demandant de consacrer la Russie à son Cœur Immaculé.

La Mère de Dieu a fait ces demandes face à la situation religieuse dans laquelle se trouvait le monde entier au moment des apparitions. La Sainte Vierge a souligné que cette situation était extrêmement dangereuse. L’impiété et l’impureté avaient pris à tel point possession de la terre que pour punir l’humanité se préparait l’hécatombe de Grande Guerre de 1914-1918.

Cette conflagration se terminerait rapidement, et les pécheurs auraient le temps de s’amender, selon l’appel lancé à Fatima. Si cet appel était entendu, l’humanité connaîtrait la paix. S’il restait lettre morte, une autre guerre encore plus terrible aurait lieu. Et si le monde restait sourd à la voix de sa Reine, un massacre suprême, d’origine idéologique et de portée universelle, impliquant de graves persécutions religieuses, affligerait tous les hommes, entraînant de grandes épreuves pour les catholiques : « La Russie répandra ses erreurs dans le monde entier, favorisant les guerres et les persécutions de l’Église (…) Les bons seront martyrisés . Le Saint-Père aura beaucoup à souffrir ».

« Pour empêcher cela – poursuit la Madone – je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé et la communion de réparation les premiers samedis. S’ils acceptent Mes demandes, la Russie sera convertie et connaîtra la paix ».

Après une période d’extrême tribulation et de terribles châtiments « tels qu’on n’en a jamais vu » (Sainte Jacinthe de Fatima), la Sainte Vierge promet le triomphe final : « Enfin, mon Cœur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie, elle sera convertie, et une période de paix sera accordée au monde ».

Aujourd’hui encore, les spécialistes débattent de la validité ou non des différentes consécrations effectuées par Pie XII et Jean-Paul II. La Sainte Vierge avait trois conditions : que la consécration soit faite par le Souverain Pontife, qu’elle mentionne la Russie, et qu’elle soit faite en union avec tous les évêques du monde. D’une manière ou d’une autre, toutes les consécrations – 1942, 1952, 1982, 1984 – ont manqué au moins une des conditions. Après avoir affirmé péremptoirement que la consécration de 1984 par Jean-Paul II n’était pas valide, la voyante Sœur Lucie a changé d’avis, attestant au contraire de sa conformité avec la demande de la Vierge. C’est la position la plus répandue dans les milieux ecclésiastiques et parmi les fidèles en général.

Nous ne voulons pas entrer dans un sujet aussi complexe. Nous tenons cependant à souligner qu’à la Cova da Iria, la Vierge a indiqué deux conditions, toutes deux indispensables, pour que les châtiments dont elle nous menaçait soient levés.

L’une de ces conditions était la consécration. Supposons qu’elle ait été faite de la manière demandée par la Sainte Vierge. Reste la deuxième condition: la diffusion de la pratique de la communion réparatrice les cinq premiers samedis du mois. Il nous semble évident que cette dévotion ne s’est pas encore répandue dans le monde catholique dans la mesure souhaitée par la Mère de Dieu.

Et il y a encore une autre condition, implicite dans le message mais également indispensable : c’est la victoire du monde sur les milliers de formes d’impiété et d’impureté qui, aujourd’hui, beaucoup plus qu’en 1917, le dominent. Tout indique que cette victoire n’est pas acquise et, au contraire, que dans cette affaire, nous nous rapprochons de plus en plus du paroxysme. Ainsi, un changement de direction pour l’humanité devient de plus en plus improbable. Et, dans la mesure où nous avançons vers ce paroxysme, il devient plus probable que nous avancions vers la réalisation des châtiments.

A ce point, une observation s’impose, c’est que si l’on ne voyait pas les choses de cette manière, le message de Fatima serait absurde. En effet, si la Vierge a dit en 1917 que les péchés du monde avaient atteint un niveau tel qu’ils exigeaient le châtiment de Dieu, il ne semblerait pas logique que ces péchés aient continué à augmenter pendant plus d’un demi-siècle, que le monde ait obstinément refusé de tenir compte de ce qui a été dit à Fatima et que le châtiment ne vienne pas. Ce serait comme si Ninive n’avait pas fait pénitence et que, en dépit de tout, les menaces du prophète ne s’étaient pas réalisées.

D’ailleurs, la consécration même demandée par la Vierge n’aurait pas pour effet de conjurer le châtiment si l’humanité restait de plus en plus attachée à l’impiété et au péché. En effet, tant que ce sera le cas, la consécration restera incomplète.

En somme, puisque l’énorme transformation spirituelle requise à la Cova da Iria ne s’est pas produite dans le monde, nous avançons de plus en plus vers l’abîme. Et, dans la mesure où nous progressons, cette transformation devient de plus en plus improbable.

Nous applaudissons l’acte du Pape François et nous nous y associons de tout cœur s’il suit les exigences fixées par Notre Dame à Fatima. Cependant, tant que cet acte ne sera pas suivi d’une véritable croisade spirituelle contre l’immoralité rampante – avortement, homosexualité, mode indécente, pornographie, gender, etc. – la simple consécration de la Russie – aussi agréable soit-elle pour la Providence divine – n’évitera pas le châtiment.

Qu’il me soit permis de soulever une autre perplexité, et non des moindres.

À Fatima, la Vierge a indiqué, comme élément le plus dynamique du processus révolutionnaire qui conduisait l’humanité vers l’abîme, les « erreurs de la Russie », c’est-à-dire le communisme, qui précisément dans l’Union soviétique a trouvé son siège et son foyer d’expansion. Il n’y aura pas de véritable conversion tant que cette idéologie ne sera pas rejetée dans toutes ses manifestations.

Or, c’est justement dans ce domaine que le pontificat du pape François s’est distingué par sa proximité avec l’extrême gauche : de sa proximité avec la dictature cubaine, à son soutien aux « mouvements populaires » latino-américains de matrice marxiste, sans oublier ses contacts avec le patriarche Kiryll, qui fut un fidèle serviteur et propagandiste de la dictature soviétique.

Là aussi, sous réserve d’un meilleur jugement, il nous semble que, tant que l’acte du vendredi à Saint-Pierre ne sera pas suivi d’une véritable croisade spirituelle contre le communisme et ses épigones, la consécration de la Russie ne pourra pas, à elle seule, agir comme une panacée pour éviter une catastrophe à la civilisation contemporaine.

Julio Loredo
atfp.it

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