Voici un extrait d’une interview du député LR Olivier Marleix, président de la commission d’enquête parlementaire sur la politique industrielle de l’Etat, réalisée avant le premier tour de l’élection présidentielle par le site Causeur. Ladite commission a enquêté sur le rachat des activités énergie d’Alstom par l’américain General Electric en 2014. Alstom, « fleuron dont les produits équipent les centrales nucléaires, les sous-marins et les navires de guerre français » (cf. www.valeursactuelles.com). Les propos du député mettent en lumière certains faits dont la prétendue fraude fiscale du cabinet McKinsey n’est que la (toute petite) face émergée d’un iceberg bien profond (voir à ce sujet: Les méfaits de Mc Kinsey). A défaut d’être informés par ceux dont c’est le métier de le faire (voir ci-dessous), les Français risquent de reconduire « à l’aveugle » pour 5 autres années un homme dont le moins que l’on puisse dire est qu’il a une conception très personnelle de la grandeur de la France… et qu’il leur doit quelques explications.

On objectera que tous ces faits sont connus depuis longtemps et ont fait l’objet de nombreux articles. Sans doute. Mais l’homme de la rue (l’électeur lambda) l’ignore en grande partie, ou l’a oublié, et c’est maintenant qu’il faut en parler: quiconque observe un peu le fonctionnement de l’information sait que si une nouvelle n’est pas mise en perspective, et surtout « claquée » à répétition dans les gros titres des principaux journaux et balancée en ouverture de tous les JT pendant plusieurs jours, c’est comme si elle n’existait pas. Aujourd’hui, ce serait vraiment LE moment. A moins qu’il ne faille à tout prix « sauver le soldat Macron », au prix de quelques menus aménagements de la vérité.
J’ajoute qu’en comparaison, le « Pénélope gate » de 2017, impliquant l’épouse de François Fillon (épisode auquel les médias ont appliqué le traitement que j’évoquais plus haut), était carrément une bagatelle.

Concernant Alstom, pourriez-vous rappeler à nos lecteurs en quoi la vente orchestrée par Macron pourrait constituer un « pacte de corruption » ?

J’ai passé six mois comme président de la commission d’enquête à examiner les conditions dans lesquelles ont été autorisées et décidées les ventes de très grandes entreprises françaises à caractère véritablement stratégique. Alstom représentait notre totale autonomie dans le nucléaire, car la partie non-conventionnelle était faite par Areva et la partie conventionnelle (les turbines pour transformer l’énergie de la vapeur en électricité) était faite grâce à Alstom qui concevait aussi les turbines pour nos sous-marins et porte-avions. Alstom était donc une entreprise hautement stratégique. Formellement, c’est Macron qui a autorisé la vente fin 2014. L’État n’était plus actionnaire, mais il avait à donner son autorisation au titre des investissements étrangers en France.

La question est de savoir si on a vraiment été mis devant le fait accompli avec l’impossibilité d’éviter cette vente, ou si quelqu’un a donné un feu vert en amont dans le dos de Montebourg.

Or j’ai découvert qu’une commande avait été passée dans le dos du ministre de l’Économie dès octobre 2012 sur le thème « Que se passe-t-il si l’actionnaire de référence d’Alstom Power décide de vendre ses participations ? ». Commande passée par quelqu’un qui était visiblement dans le secret de l’entreprise et de sa banque d’affaires. Une commission d’enquête n’a pas le droit d’interroger le président de la République, mais tous les autres acteurs qui auraient pu commanditer cette étude et que j’ai interrogés m’ont dit que ce n’était pas eux. Pour moi, par élimination, c’est Macron, Secrétaire général adjoint de l’Elysée, qui a eu cette information en 2012 et qui a décidé de laisser faire (1).

M. Macron a aussi autorisé la vente d’Alcatel, qui était notre géant dans le domaine des équipements de télécommunications. 80% du trafic internet mondial passe par les câbles d’Alcatel Submarine Networks ! Il y a eu aussi le cimentier Lafarge ou Technip. Tout cela a été l’occasion d’un ruissellement sur le tout Paris. Rien qu’avec Alstom, c’est sans doute 500 millions d’honoraires versés à différents cabinets de conseil, donc vous imaginez le ruissellement sur ces quatre ventes. Alstom, c’est 12,3 milliards ; Alcatel, 15 milliards ; Technip, 8 ou 9 milliards ; et Lafarge, 19 milliards… cela a de quoi susciter l’enthousiasme à l’égard du Mozart de la finance.

Le hasard fait que quand on compare la liste des gens qui ont eu un intérêt à la vente d’Alstom, qui ont touché des success fees, à la liste des donateurs ou des organisateurs de dîners de levées de fonds, dans les MacronLeaks, on se rend compte que ça matche dans un certain nombre de cas. La question que j’ai posée au procureur de la République, c’est de regarder si ces ventes n’avaient pas été l’occasion d’organiser un système pour rendre service à certaines personnes et obtenir d’eux, en échange, un renvoi d’ascenseur. Je rappelle que le financement de la campagne de Macron a reposé essentiellement sur les dons de quelques centaines de grands donateurs.

(1)

La commission d’enquête parlementaire sur les décisions de l’État en matière industrielle, et notamment dans la vente d’Alstom, présidée par le député LR Olivier Marleix, révèle des aspects secrets des conditions de la vente du géant français de l’énergie à l’américain General Electric.

(…) les échanges ont révélé qu’un rapport d’une étonnante perspicacité avait été commandé par l’Agence des participations de l’État (APE) dès octobre 2012, sur l’hypothèse d’une vente d’Alstom à une entreprise américaine. Un rapport demandé à l’APE par un mystérieux personnage important de l’Élysée… sans en informer le ministre de l’Économie de l’époque, un certain Arnaud Montebourg. Plusieurs sources concordantes attestent qu’il s’agissait à l’époque d’Emmanuel Macron, qui était alors secrétaire général adjoint de l’Élysée chargé de l’économie.
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https://www.valeursactuelles.com/politique/info-va-vente-dalstom-macron-etait-il-au-courant-des-2012/
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