« La politique en rangs serrés sous le commandement de l’OTAN », titre Marcello Veneziani. A la politique, il faut bien sûr ajouter les médias. Tout ce qui est dit ici sur l’Italie vaut évidemment, comme toujours, pour la France (*), même si, échéance électorale oblige, Macron semble plutôt moins belliciste que l’effrayant Dragon italien.

(*) Bien que les bases militaires de l’Otan en France ait été fermées ou rétrocédées à l’armée française en 1966 suite à la décision du général De Gaulle de quitter le commandement militaire intégré (une décision que Sarkozy a « annulé » de fait en 2009, en organisant la réintégration de la France dans l’OTAN), la France se situe au 3e rang des pays contributeurs au budget commun de l’OTAN, avec un niveau de contribution de 1,8% de son PIB (contre 1,11% pour l’Italie: voir aussi à ce sujet Une guerre nucléaire déclenchée depuis l’autre côté des Alpes, c’est possible?) (wikipedia). Par ailleurs, on apprend qu’à l’instar de l’Italie « des armes létales sont expédiées [par la France] pour lutter contre l’invasion russe. Mais Paris ne communique pas sur leur contenu, protégé par le secret de la défense nationale » (Europe1). Bref, nous ne sommes guère mieux lotis que nos voisins. Dommage qu’il n’en ait pas été question (enfin, pas que je sache) dans le « débat » d’hier. Mais, comme le dit Veneziani, « les choix des politiques sont dictés par la nécessité de ne pas se couper de l’establishment« . CQFD.

La politique en rangs serrés sous le commandement de l’OTAN

Le régime de l’information a adopté le contrôle parental pour filtrer et bloquer l’accès des citoyens à l’autre côté et à l’autre version de la guerre en Ukraine, comme il l’a déjà fait avec la pandémie et d’autres événements, tels que le vote en France. Nous sommes traités comme des mineurs contraints de subir le récit illustré de l’État, avec ses chiffres, ses voix sur le terrain et hors du terrain. Et un réseau de censure, de déplorations et de silences nous empêche de toucher la zone interdite de la dissidence.

Autrefois, la politique c’était le théâtre des dissensions et des divergences, le lieu où les opinions opposées étaient exprimées et canalisées, en évitant qu’elles ne se transforment en conflits amers ou sanglants. Nous appelions cela pluralisme, démocratie, bipolarité, dialectique entre partis antagonistes. Aujourd’hui, essayez de trouver un seul parti dans le pays qui exprime pleinement l’autre position sur les événements actuels, et ramène à la raison les positions les plus extrêmes, les plus infantiles, les plus radicales. Existe-t-il quelque part une entité politique capable de donner une lecture différente du scénario international, existe-t-il un parti ou un mouvement qui aborde la question sans casque, sans affiliation fidéiste à l’OTAN et au bellicisme démocrate, et sans contrôle parental des citoyens ? Existe-t-il un parti ou un mouvement qui, même en ce moment, réaffirme que les intérêts nationaux, notre souveraineté, sont primordiaux ; et que les intérêts, les valeurs, de la souveraineté européenne ne coïncident pas avec la suprématie américaine et sa prétention à diriger le monde, en subordonnant les intérêts des autres aux siens ? Y a-t-il quelqu’un qui dirait, face à l’escalade et à la dégénérescence du conflit guerrier – qui, au-delà du voile et de la cataracte ukrainiens, est entre la Russie et les États-Unis -, que le moment est venu de rechercher une solution négociée ? Y a-t-il dans l’arène politique quelqu’un qui s’inquiète du fait que derrière les nobles principes humanitaires se cachent des intérêts plus ou moins louches de nature économique, commerciale, énergétique, géopolitique ? Non, il n’y en a pas. Des faucons du parti dem et de Draghi aux faucons de la droite italienne, en passant par tous les alliés de l’actuel gouvernement, il n’y a pas une seule voix qui ne soit pas d’accord et qui propose une lecture différente des faits, des bilans et des situations. Du reste, une partie conséquente de l’opinion publique italienne et européenne pense de cette manière différente ; je ne dirai pas une majorité car il n’y a pas de preuves réelles pour l’affirmer ou le réfuter. Et en l’absence de véritables débouchés et références, la dissidence est en quelque sorte diluée, réprimée ou détournée. Cependant, une grande partie de l’opinion publique partage une chose : ce n’est pas la façon de rechercher la paix, ce n’est pas la façon de protéger nos intérêts et nos valeurs nationales et européennes, l’OTAN n’est pas notre cathédrale et l’administration Biden n’est pas notre Mecque.

Rien à redire à ceux qui ne partagent pas cette ligne de dissidence, mais ils doivent reconnaître une chose, ou plutôt deux choses : ce que nous avons exprimé est une opinion répandue, mais elle n’est pas du tout représentée dans le monde varié de la politique italienne. Je comprends toutes les raisons, les convenances, l’opportunisme même, de ceux qui n’ont pas envie de s’écarter du gouvernement qu’ils soutiennent, du parapluie atlantique qui nous entoure, du régime de l’information à sens unique et des puissances internationales qui nous dominent. Je comprends, c’est humain, ceux qui veulent être politiciens ont aussi pour objectif de gouverner, d’avoir le pouvoir ou au moins une tranche de celui-ci ; pas de témoignage idéal mais la conquête d’une position de pouvoir. Ils ont toute notre compréhension humaine, aussi parce qu’il est bien connu qu’une position comme celle exposée ci-dessus, que l’on pourrait définir néo-gaulliste – mais au sens du Général De Gaulle et non des derniers restes gaullistes alignés et balayés aux dernières élections – empêche de nombreux accès. Pensez-vous que quiconque puisse entrer dans la salle de contrôle sans se déclarer atlantiste, partisan de l’OTAN et dépendant du cadre international imposé par les pouvoirs en place ?

Mais alors, ne vous plaignez pas si les gens n’aiment pas la politique, si l’abstentionnisme et la protestation progressent dans les votes, si personne ne fait confiance aux dirigeants et aux partis, si la politique compte pour moins que rien dans les décisions et les stratégies. S’ils sont tous enrégimentés sous la direction du capitaine Draghi Macron, qui à son tour exécute les directives du commandement général, alors ne cherchez pas d’explications complexes pour justifier la désaffection, la méfiance et le mépris du peuple pour la politique de la pensée unique. Si la survie des partis prévaut sur la raison sociale pour laquelle ils sont nés et pour laquelle ils s’affrontent, alors bonne nuit à la politique et bienvenue dans l’ère du service et du catering politique.

Il serait naturel, par exemple, de s’attendre à ce que si les démocrates sont devenus le parti de la guerre, de l’OTAN, de Draghi et de Biden, ceux de l’autre camp représentent la ligne opposée; il n’en est rien, au contraire la convergence avec les Dem est soulignée comme un fait positif. Je note cela sans aucune polémique contre qui que ce soit, mais plutôt en reconnaissant – comme je l’ai dit il y a un instant – que les choix des politiques sont dictés par la nécessité de ne pas se couper de l’establishment. Ce sont des choix dictés par l’utilité. Parce que désormais, il n’y a pas d’espace, pas de Pape, pas de pacifiste qui puisse s’écarter du plan établi, sans être réduit au silence, critiqué et mis de côté.

Le contrôle parental s’applique aussi à eux.

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