On la trouve sur un site réputé sulfureux (forcément), et pourtant, ici, étonnamment modéré et surtout très lucide, E&R (fondé par Alain Soral). A titre personnel, je partage la perplexité quant à l’attitude incompréhensible, toute en repli, de Marine Le Pen qui n’a pas osé interpeler directement le favori des médias sur les sujets gravissimes mais qui fâchent (Mckinsey, covid…). Toutefois, si je peux comprendre que l’objectif principal était (ou aurait dû être) de séduire l’électorat Mélenchon (et pourquoi pas les catholiques de conviction? Comptent-ils pour rien?), je n’oublie pas et je déplore qu’elle ait délibérément ignoré toutes les questions qui concernent le Bien Commun dans sa dimension morale (voir les avertissements de Mgr Aillet).

Lorsque Emmanuel Macron lui affirme sournoisement que « La Russie est votre banquier », que n’a-t-elle répondu du tac-au-tac : « Et vous M. Macron, qui est votre banquier ? ».

à quelques-uns l’arrogance tient lieu de grandeur ; l’inhumanité de fermeté ; et la fourberie, d’esprit

[Les Caractères (1696), 25, V, De l’homme de Jean de La Bruyère]
Photo: ©Jean-Claude Coutausse pour Le Monde

www.egaliteetreconciliation.fr/Fabrice-Di-Vizio-et-Idriss-J-Aberkane-debriefent-le-debat-d-entre-deux-tours
(Extraits, lire l’article sur le site)

Ce débat, beaucoup l’attendaient, surtout dans le camp national, comme une revanche possible de 2017, mais surtout comme la possibilité de venger un peuple meurtri, martyrisé pendant cinq longues années. Une abréaction salutaire diraient les psychologues, une catharsis judiciaire répliqueraient les juristes. Ce débat n’était pourtant pas un procès, mais il y avait cependant un mémoire en défense à faire. Celui d’un homme avec un bilan. Mais cet homme est un homme habile, un malin dans son sens étymologique.

Aussi, dans un retournement rhétorique subtil c’est lui qui systématiquement renvoya son adversaire Marine Le Pen dans les cordes : c’est elle qui avait un bilan, celui de ses votes antérieurs à l’Assemblée nationale, celui de ses propos, de ses tweets, de ses sorties, de ses fréquentations, de ses prêts bancaires. Marine Le Pen, pourtant sans responsabilité politique aucune, se retrouva sommée de se défendre, de s’expliquer. Et elle sembla ne jamais avoir eu la présence d’esprit de se rappeler que parfois la meilleure défense est l’attaque. Lorsque Emmanuel Macron lui affirme sournoisement que « La Russie est votre banquier », que n’a-t-elle répondu du tac-au-tac : « Et vous M. Macron, qui est votre banquier ? ».

Jean de La Bruyère avait résumé en quelques mots les Macron de son époque, « à quelques-uns l’arrogance tient lieu de grandeur ; l’inhumanité de fermeté ; et la fourberie, d’esprit ». Des siècles ont passé et nous voilà guère avancés. Face à ce technicien, ce technocrate même, il fallait, à défaut de gagner le débat, rendre justice à ces millions de Français méprisés. L’histoire aurait retenu Marine Le Pen comme avocate des silencieux, de ces sans-dents du président Hollande, alors qu’elle retiendra un débat sans éclat et une candidate qui n’aura jamais appuyé là où ça fait mal chez son adversaire, et Dieu sait si les sujets ne manquaient pas !

(…)

Où sont passés tous les scandales de la Macronie ? L’affaire Mc Kinsey par exemple qui éclaire les collusions privé/public et à la fois a coûté une fortune au contribuable (près d’un milliard, une paille !) en plus de rendre inutiles des hauts fonctionnaires, pourtant rémunérés par ailleurs. Le mot n’a été lâché incidemment qu’une seule fois au détour d’une réponse, laissant son interlocuteur Emmanuel Macron étonné lui-même que l’affaire ne fut pas encore utilisée par son adversaire. Elle ne le sera jamais.

(…)

Que n’a-t-on parlé du Covid-19 et de l’effroyable gestion sanitaire qui dura 2 ans ? Bien sûr, il ne s’agissait pas de faire peur aux covidiots, très nombreux en France, mais ne pouvait-on pas pointer du doigt certaines faiblesses évidentes et qui ne font pas débat ? L’absence de masques par exemple, l’inexistence d’un vaccin français (la société Valneva ira le vendre en Grande-Bretagne !), le port du masque abusif chez les enfants, le pass sanitaire et, pire, le pass vaccinal, qui fabriquèrent des citoyens de seconde zone, un véritable apartheid légal, l’odieuse sanction contre les soignants non vaccinés laissés sans salaire aucun (ce seul point a été rapidement abordé par Marine Le Pen), la gestion des EHPAD où on laissa mourir les personnes âgées dans une solitude honteuse, etc. Il y avait tant à dire sans prendre le risque de prêter le flanc au complotisme !

Plus loin de nous, les deux années de Gilets jaunes, méprisés, maltraités, molestés par le pouvoir, et son cortège de mutilés et d’éborgnés, cette communauté de Français qui représentent pourtant, si l’on ne s’arrête qu’à cette sordide comptabilité électorale, un vivier de voix du RN et de la France insoumise, pourquoi n’en a-t-on pas fait mention ? Pourquoi ne pas avoir passé le président sortant au grill de questions saignantes qui auraient rappelé comment celui-ci n’a ni répondu à aucune de leurs attentes mais les a de surcroît méprisés et violentés ?

La peur de passer pour une dangereuse complotiste, ou celle peut-être de se retrouver perdue dans un combat de boxe où elle aurait du montrer un visage offensif pouvant basculer négativement pour elle, a figé Marine Le Pen dans une posture de Mère de la Patrie, sage et raisonnable. On imagine que son staff l’a spécifiquement briefé pour une telle posture, visant à rassurer, en particulier les seniors ou plus généralement les électeurs qui voient encore chez elle un dictateur en puissance. C’est à notre sens une erreur.

En effet les électeurs boomers (les plus de 65 ans) sont définitivement perdus dans un vote Macron qui conserve (croient-ils !) leurs acquis et propose aux Français plus jeunes de travailler davantage en repoussant la retraite à 65 ans, permettant égoïstement de payer la leur !

L’électorat qu’il fallait aller chercher c’était l’électorat mélenchoniste, bien sûr [?]. Pas le bobo, le prof d’université ou le woke LGBT, mais bien plutôt l’électeur insoumis qui pense social, qui réfléchit économie, pouvoir d’achat, mais aussi rapport de classe riches/pauvres, celui qui était sur les ronds-points, demande le RIC (le RIP), etc. Il fallait donc être bien plus offensif sur tous ces sujets, et Dieu sait si avec le bilan Macron il n’y avait qu’à se baisser pour cueillir les sujets à critiques, les affaires et les scandales ! (et ne pas se perdre sur le sujet à la fois hautement périlleux et très secondaire de l’interdiction du voile)

Plus que challenger, Marine Le Pen était l’outsider du débat. Non seulement elle était la personnalité seconde de ce débat, mais elle était surtout la moins favorite. Dès lors, une posture de neutralité bienveillante, de femme humaine, ne pouvait pas renverser ce rapport d’infériorité sondagière. Comme le joueur de poker qui n’a plus rien doit faire tapis, seule l’attaque permettait de grapiller les 3, 4 ou 5% qui lui manquent. Au risque d’en perdre 5 ou 10, comme ce fut le cas en 2017. Certes. Mais, perdue pour perdue, dans cette position précise d’outsider, l’attaque reste la meilleure défense.

(…)

Toutes ces critiques ne nous empêcheront pas de voter contre Emmanuel Macron. Même si nous préférerions une opposition avec davantage de b…, ce sont bien les urnes qui dimanche accueilleront notre bulletin de vote.

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