Œcuménisme: Cinquième centenaire de la Réforme


Tandis que le P. Cantalamessa fait l'éloge de Luther devant le Pape, le cardinal Müller affirme que les catholiques n'ont aucune raison de participer aux célébrations (1er/4/2016)




Le très vigilant Giuseppe Nardi relève la sortie inattendue, le jour du vendredi Saint, dans la Basilique Saint-Pierre et en présence du Souverain Pontife, du religieux capucin prédicateur du Pape : après le lavement des pieds dans un centre de réfugiés, c’est une nouvelle bizarrerie de la Semaine Sainte à Rome, passée relativement inaperçue à cause des attentats de Bruxelles.
Simultanément, dans un livre-interview publié ces jours-ci en Espagne, le préfet de la CDF rappelle fermement que nous n’avons pas à célébrer le demi-millénaire de la Réforme.

Un éloge de Martin Luther dans la Basilique Saint-Pierre : « Il a remis en lumière la vérité »


Giuseppe Nardi
26 mars 2016
www.katholisches.info
Traduction de l'allemand: Isabelle

Le Pape écoute l'homélie du P. Cantalamessa


(Rome)
En 2016 encore, c'est le prédicateur de la Maison Pontificale, le père Raniero Cantalamessa (OFMCap) qui a prononcé, en présence du pape François, l'homélie du Vendredi Saint dans la Basilique Saint-Pierre. A cette occasion, le célèbre capucin a annoncé, devant un auditoire catholique, quelque chose d'incroyable : le « mérite » de Martin Luther, a-t-il dit, est d'avoir à nouveau « mis en lumière » la « vérité » sur la « justice de Dieu ».

Le « mérite » de Luther, la politique ecclésiale de Rome et son agenda oecuménique
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Avant Luther – dit Cantalamessa – l’Église avait, durant des siècles, perdu le sens de la justice de Dieu. La redécouverte de cette vérité « est, en réalité, ce que le christianisme doit à la Réforme ». A cette occasion, Cantalamessa a rappelé la « célébration imminente du cinquième centenaire » de la « Réforme ». Dans le même temps, le prédicateur de la Maison Pontificale a cité Luther qui écrivait, à propos de cette redécouverte qui est son « mérite » envers la chrétienté : « Je me sentis tout à fait né une nouvelle fois et, par les portes ouvertes, j'entrai dans le paradis ».

Cantalamessa a ensuite affirmé, en présence du pape et à l'intérieur même de la basilique tant combattue par Luther, que Martin Luther avait mis en lumière une vérité qui s'était perdue dans l’Église catholique et par laquelle le chrétien « naît à nouveau » et « entre par les portes ouvertes au sein même du paradis ». Par là, Cantalamessa ne disait pas seulement que la Réforme était justifiée, mais encore que Luther possédait plus de lumière et de vérité que l’Église catholique. Jamais Luther n'aurait pu souhaiter, de la part d'un catholique, plus bel éloge pour sa personne et pour la « Réforme ». L'homélie du Vendredi Saint de Cantalamessa en dit toutefois plus sur l'actuelle politique oecuménique de Rome que sur les faits historiques et théologiques.

Avant Luther, l'Eglise Catholique avait-elle « des siècles durant », « perdu » une vérité ?
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Voici les paroles exactes de Cantalamessa :

A tout cela toutefois, on ne peut rien comprendre, si on ne saisit pas d'abord ce que signifie exactement l'expression « justice de Dieu ». Si l'on entend parler de la justice de Dieu et qu'on se méprend sur elle, on court le danger de se laisser effrayer par elle au lieu de se sentir encouragé. Déjà Augustin avait indiqué cela : « La justice de Dieu », écrit-il « c'est que, par sa grâce, nous sommes justifiés, exactement comme le « salut du Seigneur » (salus Domini : Ps. 3, 9) est ce par quoi Dieu nous sauve ». En d'autres termes : la justice de Dieu est l'acte par lequel Il justifie tout homme qui croit en son Fils et met en lui sa complaisance . Il ne s'agit donc pas « de se faire justice » mais « de rendre justes ».

A Luther revient le mérite d'avoir remis en lumière cette vérité, après que l'annonce chrétienne en eut, pour des siècles, perdu le sens. C'est là réellement ce que le christianisme doit à la Réforme, dont approche la célébration du cinquième centenaire. Sur cette découverte, le réformateur écrivit plus tard : « Je me sentis alors tout à fait né une nouvelle fois et entrai, par les portes ouvertes, dans le paradis » .

En 2013 Cantalamessa demandait d'éliminer « les murs qui séparaient » les « différentes églises chrétiennes » et les « vestiges des rituels »
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Déjà lors de sa première prédication lors du Vendredi Saint, en 2013, Cantalamessa s'était fait remarquer par ses déclarations controversées sur l'œcuménisme et l'unité des communautés chrétiennes. Voici ce que disait alors le prédicateur de la Maison Pontificale :

« Nous devons faire tout notre possible, pour que l'Eglise ressemble de moins en moins à un édifice compliqué à la Kafka, et que son message puisse jaillir d'elle, libre et joyeux, comme aux premiers temps. Nous connaissons les obstacles qui peuvent entraver le message : les murs de séparation, à commencer par ceux qui séparent les unes des autres les différentes églises chrétiennes ; ensuite un excès de bureaucratie, les vestiges des rituels, des lois et des disputes de jadis, dépassées aujourd'hui. »


Müller, la réforme: rien à célébrer pour les catholiques


Marco Tosatti
1er avril 2016
San Pietro e dintorni
Ma traduction

Il n'y a aucune raison, pour un catholique, de célébrer le début de la Réforme protestante. Telle est l'opinion exprimée par le Préfet de la Congrégation de la Foi, le cardinal Gerhard Müller, dans un livre-interview “Informe sobre la Esperanza” (en fait, il semble que le titre du livre soit "La esperanza de la Familia" [cf. Exhortation: la bataille des interprétations])

Le 31 Octobre 1517 est la date normalement considérée comme le début du mouvement protestant; l'anniversaire sera célébré cette année avec une solennité particulière. «Nous, catholiques, nous n'avons aucune raison de célébrer le 31 octobre 1517, la date considéré comme le début de la Réforme qui devait conduire à la rupture du christianisme occidental».
Ce fut alors que Martin Luther rendit publiques ses 95 thèses, affichées sur la porte de l'église de Wittenberg. Il n'y proposait pas une séparation d'avec l'Église, mais les thèses en furent certainement le point de départ.

Le cardinal Müller affirme: «Si nous sommes convaincus que la révélation divine est conservée entière et inchangée dans l'Écriture et la Tradition, dans la doctrine de la Foi, dans les sacrements, dans la constitution hiérarchique de l'Église par droit divin, fondée sur le sacrement de l'Ordre, nous ne pouvons pas accepter qu'il existe des raisons suffisamment pour se séparer de l'Eglise».

Il est probable que ses déclarations feront du bruit, parce que dans quelques mois, nous allons célébrer le demi-millénaire depuis la Réforme. Et entre autre, le pape se rendra en Suède en Octobre pour une commémoration œcuménique avec les représentants de la Fédération luthérienne mondiale et d'autres confessions chrétiennes.
Le cardinal rappelle que de nombreux représentants de la Réforme définirent le pape comme l'Antéchrist pour «justifier la séparation» d'avec l'Église catholique.