Rumeurs vaticanes



.... autour du prochain consistoire, et d'éventuelles nominations cardinalices. Il est même question d'Enzo Bianchi! Les indiscrétions de Giuseppe Nardi, traduites par Isabelle (11/1/2016)


Evidemment, ces projections peuvent paraître "fumeuses", d'autant plus que la date du prochain consistoire n'est pas encore fixée.
Mais qu'on puisse seulement évoquer la possibilité d'un Enzi (laïc! et pas très "catholique"!!) nommé cardinal en dit long sur l'ambiance qui règne actuellement au Vatican.

Le pape François élèvera-t-il Enzo Bianchi au cardinalat ?


Giuseppe Nardi
www.katholisches.info
7 janvier 2016
Traduction d'Isabelle


La rumeur selon laquelle Enzo Bianchi devrait être élevé au cardinalat s’amplifie à Rome. Bianchi n’est pas prêtre, mais laïc – ce qui, dans l’Eglise, ne serait pas en soi une nouveauté ; il est aussi le fondateur et la figure de proue d’une congrégation étrange (c’est à ce titre qu’il s’appelle lui-même « prieur » et « moine ») qui n’est, en tout état de cause, pas catholique. A cause de sa doctrine inorthodoxe, Enzo Bianchi s’est vu qualifier de « faux prophète » par Mgr Antonio Livi, l’ancien doyen de la faculté de Philosophie de l’Université du Latran.

La date du prochain consistoire extraordinaire au cours duquel le pape François créera de nouveaux cardinaux n’est pas encore fixée. A Rome, pourtant, des noms circulent avec insistance, au nombre desquels on trouve surtout ceux qui appartiennent à la cour rapprochée du Pape et mettent un zèle particulier à défendre ses orientations. Traditionnellement, à Rome, on cite surtout des noms italiens. A côté d’Enzo Bianchi, trois noms ont la cote : Mgr Marcello Semeraro, évêque d’Albano Laziale, secrétaire du conseil C-9 des cardinaux et membre de la commission chargée de rédiger le rapport final du Synode sur la famille ; l’évêque de curie, Mgr Vincenzo Paglia, de la communauté Sant’Egidio, président du Conseil pontifical pour la Famille et Mgr Bruno Forte, archevêque de Chieti.

Enzo Bianchi et l’abolition de la papauté
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Pour Enzo Bianchi (né en 1943), Fatima est une « imposture » ; l’Eglise devrait « se taire » sur l’homosexualité ; la famille est « une forme que se donne la société » et, par conséquent, modifiable à volonté ; Marie n’est pas « un exemple approprié pour la femme dans l’Eglise ». C’est par une ironie de l’histoire qu’Enzo Bianchi, qui voudrait dépasser la papauté en faveur de l’œcuménisme, est aujourd’hui un hôte apprécié au Vatican. Tenu éloigné de Rome par le pape Benoît XVI, Enzo Bianchi se voit lui-même à l’unisson du pape François. L’estime que François lui porte à son tour s’est traduite par la nomination de Bianchi comme Consulteur du Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens en juillet 2014.

Mgr Semeraro et la « morale de la personne »
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Mgr Semeraro (né en 1947) a été nommé membre du synode sur la famille par décision personnelle du pape François. Lorsque, à l’incitation du cardinal de curie George Pell, treize cardinaux , parmi lesquels le préfet de la CDF, le cardinal Gerhard Müller, soulevèrent dans une lettre des objections massives contre la manière de procéder du Synode, Semeraro, en fidèle du pape, exprima sa mauvaise humeur à leur égard. Les treize cardinaux disaient soupçonner une intention d’obtenir « sur certains thèmes importants et controversés des résultats préparés à l’avance ». Dans le même temps, ils critiquaient et déclaraient « inacceptable » le document préparatoire aux travaux du synode. Semeraro fulmina contre eux : « Je suis dégoûté par la publication de ce document ». Celui qui connaît la manière de parler et les usages de l’Eglise, n’a aucun mal à décoder à un double niveau l’explosion de Semeraro : premièrement, l’évêque d’Albano Laziale se savait couvert par le pape ; deuxièmement, la lettre des cardinaux contrecarrait fâcheusement les plans de régie du synode.

Voici peu, Semerararo a publié un petit texte à propos du synode sur la famille, où il ouvre la voie à une possible admission des divorcés remariés à la communion, qu’il présente comme un « retour » à la « praxis » antérieure à la phase « de restauration » des pontificats de Jean-Paul II et de Benoît XVI. Le synode aurait en effet accompli, sous la conduite « décisive » du pape François, le passage de l’Eglise de la « morale de la loi à la morale de la personne », laquelle élève la conscience personnelle au rang d’instance suprême.

Déjà en octobre 2014, Semeraro avait, dans une lettre pastorale, menacé d’excommunication les fidèles de son diocèse qui reçoivent les sacrements de prêtres appartenant à la Fraternité Pie X (FSSPX).

Vincenzo Paglia et les kaspériades homophiles
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Mgr Vincenzo Paglia (né en 1945) fut le premier évêque issu des rangs de la communauté Sant’Egidio. Cette communauté élabora l’idée des rencontres interreligieuses de la paix à Assise, qui suscitèrent la controverse. Depuis sa nomination par Benoît XVI, peu avant sa renonciation inopinée, à la présidence du Conseil pontifical pour la famille, Mgr. Paglia figure parmi les candidats à la pourpre. Depuis lors toutefois, il s’est fait remarquer, moins par une défense du mariage et de la famille, que comme tenant d’une « ouverture » envers l’homosexualité et envers les divorcés remariés. Dès sa première conférence de presse en tant que « ministre de la famille » du Vatican, il tint des discours aux accents homophiles.

Un trou financier de 20 millions d’euro qu’il a laissé dans les caisses de son diocèse de Terni en 2012, lui valut une enquête judiciaire, classée depuis lors. En mai 2015, Paglia participa à la rencontre secrète tenue à l’Université Pontificale Grégorienne, où les kaspériens se préparaient au synode de l’automne.

Bruno Forte et la « légende » du tombeau vide
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Mgr Bruno Forte (né en 1949) fut nommé archevêque de Chieti par Jean-Paul II, peu de temps avant sa mort ; sa carrière connut un arrêt marqué sous Benoît XVI. Forte a dirigé le groupe de travail de la Commission théologique internationale qui prépara le document pour le « Jour du pardon » de l’année sainte 2000, au cours duquel le pape Jean-Paul II fit une confession publique et demanda le pardon de Dieu pour les fautes qu’au cours des 2000 ans écoulés « des hommes appartenant à l’Eglise avaient commises au nom de la foi et de la morale ». En 2009, Mgr Forte se moqua du motu proprio Summorum pontificum de Benoît XVI et résista obstinément à la requête du pape allemand de traduire dans les langues vernaculaires les paroles consécratoires « pro multis » par « pour beaucoup » au lieu de « pour tous » . Une demande que n’ont suivie jusqu’ici ni les évêques italiens, ni les évêques allemands. En 2011 Forte raconta que le tombeau vide du Christ ressuscité n’était qu’une légende.

Avec l’élection du pape François, Mgr Forte lui aussi se trouve de nouveau en harmonie avec Rome. Le nouveau pape le nomma secrétaire spécial du Synode sur la famille. A ce titre, Forte rédigea le rapport intermédiaire très controversé du synode de 2014, avec les passages sur l’homosexualité et les divorcés remariés, qui furent rejetés par le synode.


Pour le moment une rumeur circule aussi sur l’attribution de la barrette cardinalice au Père Raniero Cantalamessa, prédicateur de la maison pontificale. Durant l’Avent, au cours d’un sermon à la curie romaine, le capucin a désigné Marie comme un obstacle à l’unité avec les protestants. S’il a parlé textuellement de « certaines formes » du culte marial, son discours n’en était pas moins une dépréciation et une réduction du culte marial, une concession aux protestants, qui rejettent Marie comme « rempart » de la foi. Le capucin toutefois ne serait plus parmi les cardinaux électeurs, puisqu’il aura 82 ans en juillet prochain.

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Certains des candidats présumés à la pourpre l’étaient déjà en 2014 et 2015, sans avoir alors reçu la dignité cardinalice. Sans confirmation officielle, il ne s’agit que de « rumeurs ». Qu’Enzo Bianchi fasse lui aussi aujourd’hui partie de la liste des candidats est un indice de tout ce que l’on prête au pape François, pour la joie des uns et le chagrin des autres.