Le dialogue remplace-t-il la mission?



Toujours sur le rapport avec les autres religions, voici pour mémoire un passage de la lumineuse conférence écrite par le Pape émérite et lue par Mgr Gänswein à l'Urbanienne, le 21 octobre 2014 (8/1/2016)

>>> Voir aussi:
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Non, toutes les religions ne se valent pas
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Vers la religion mondiale?
¤ Vers la religion mondiale (II)


Texte complet dans ma traduction ici: benoit-et-moi.fr/2014-II-1/benoit/la-lectio-de-benoit-xvi-a-lurbanienne

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(...)
Le Seigneur ressuscité a chargé ses apôtres, et à travers eux les disciples de tous les temps, de porter sa parole aux extrémités de la terre et de faire de tous les hommes ses disciples. Le Concile Vatican II, reprenant dans le décret «Ad Gentes», une tradition constante, a mis en lumière les raisons profondes de cette tâche missionnaire et l'a donnée ainsi avec une force renouvelée à l'Eglise d'aujourd'hui.

Mais cela est-il encore valable? - se demandent beaucoup, aujourd'hui, à l'intérieur et à l'extérieur de l'Église - vraiment, la mission est-elle toujours actuelle? Ne serait-il pas plus approprié de se rencontrer dans le dialogue entre les religions et de servir ensemble la cause de la paix dans le monde?
La contre-question est: le dialogue peut-il remplacer la mission?

Aujourd'hui, beaucoup, en effet, sont de l'idée que les religions devraient se respecter mutuellement et, dans le dialogue entre elles, devenir une force commune de paix conjointe. Dans ce mode de pensée, la plupart du temps on prend pour hypothèse que les différentes religions sont des variantes d'une seule et même réalité; que la «religion» est le genre commun, qui prend des formes différentes selon les différentes cultures, mais exprime toujours la même réalité. La question de la vérité, celle qui à l'origine motiva les chrétiens plus que toute autre chose, est mise ici entre parenthèses. On présuppose que la vérité sur Dieu, en dernière analyse, est inaccessible et que tout au plus on ne peut rendre présent ce qui est ineffable qu'avec une variété de symboles.

Cette renonciation à la vérité semble réaliste et utile à la paix entre les religions dans le monde.

Et pourtant, elle est mortelle pour la foi.
En effet, la foi perd son caractère contraignant et sa gravité, si tout se résume à des symboles au fond interchangeables, capables de renvoyer seulement de loin au mystère inaccessible du divin.

(...) L'opinion commune est que les religions sont pour ainsi dire côte à côte, comme les continents et les pays sur la carte géographique. Cependant, cela n'est pas exact. Les religions sont en mouvement au niveau historique, de même que les peuples et les cultures sont en mouvement. Il y a des religions en attente. Les religions tribales sont de ce type: elles ont leur moment de l'histoire, et pourtant elles sont en attente d'une rencontre plus grande qui les mène à la plénitude.

Nous, en tant que chrétiens, nous sommes convaincus que, dans le silence, elles attendent la rencontre avec Jésus-Christ, la lumière qui vient de lui, qui seul peut les conduire pleinement à leur vérité. Et le Christ les attend. La rencontre avec lui n'est pas l'irruption d'un étranger qui détruit leur propre culture et leur propre histoire. Elle est, au contraire, l'entrée dans quelque chose de plus grand, vers lequel elles sont en chemin. C'est pourquoi cette rencontre est toujours à la fois, purification et maturation. Par ailleurs, la rencontre est toujours mutuelle. Le Christ attend leur histoire, leur sagesse, leur vision des choses.