Quand Benoît XVI encourageait les ordres religieux


En marge de l'article d'Hilary White sur le conflit larvé entre le card. Bergoglio et l'Institut du Verbe Incarné comme signe avant-coureur de la persécution contre les FFI, un article de Sandro Magister en 2008 évoquait "l'essor surprenant [de cette] nouvelle communauté" et citait un discours de Benoît XVI aux Supérieurs des ordres religieux (7/8/2016)

>>> Cf. François n'aime pas les ordres conservateurs

 


Anna a déniché dans l'irremplaçable site www.chiesa cet article daté du 23 février 2008.

Extraits:



LES RELIGIEUX AU RAPPORT CHEZ LE PAPE. ENTRE DÉCLIN ET RENAISSANCE
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Benoît XVI veut qu'ils mènent une vie plus austère et plus fidèle à l'Evangile. En particulier, il veut plus d'obéissance de la part des jésuites. L'essor surprenant d'une nouvelle communauté: l'Institut du Verbe Incarné

La rencontre avec le pape avait lieu à huis clos, dans la Salle du Consistoire.
C’était le matin du lundi 18 février. Le débat a duré deux heures, avec différentes interventions “sur les éléments positifs et les difficultés“ de la vie religieuse. A la fin, Benoît XVI a adressé aux personnes présentes un discours bref mais dense.

Benoît XVI donne clairement son jugement sur l’état actuel de la vie religieuse dans l’Eglise. Sur les crises graves que traversent les grands ordres. Sur leur retour difficile vers l’esprit des fondateurs. Sur la naissance de nouvelles communautés religieuses. Sur l’attrait qu’exerce une vie religieuse austère, pauvre, obéissante envers l’Eglise, consacrée au prochain, fidèle à l’Evangile “sine glossa“.

Benoît XVI n’a pas donné d’exemples précis.
(..)
Benoît XVI n’a pas non plus cité de cas précis concernant la floraison de “nouvelles expériences de vie consacrées“ fidèles à la doctrine et riches de spiritualités et de vocations.
Mais il y en a beaucoup et certains, peu connus, sont pourtant stupéfiants.
On peut citer, par exemple, l’Institut du Verbe Incarné.

Il a été fondé en 1984 à San Rafael, dans la province de Mendoza en Argentine, par le père Carlos Miguel Buela. Aujourd’hui, après un quart de siècle à peine d’existence, il compte dans sa branche masculine 302 prêtres, 21 diacres, 195 séminaristes qui suivent des cours de philosophie et de théologie, 51 novices, 95 séminaristes mineurs.
Sa maison généralice et son centre de formation se trouvent à Segni, à 60 kilomètres à l’est de Rome, dans les locaux du séminaire du diocèse restés vides. L’évêque de Segni, avec l’approbation du Saint-Siège, l’a reconnu en tant qu’institut de droit diocésain en 2004. Il n’en est pas moins présent dans quelque 32 pays du monde, dont l’Ethiopie, le Soudan, l’Egypte, la Jordanie, la Chine, le Tadjikistan et le Groenland.
Sa branche féminine, l’Institut des Servantes du Seigneur et de la Vierge de Matarà, compte 226 religieuses ayant prononcé des vœux perpétuels, 251 religieuses ayant prononcé des vœux temporaires, et autant de novices et de postulantes. Elle est présidée par une jeune sœur hollandaise, Maria de Anima Christi Van Eijk, et elle est présente dans 22 pays. Un autre Hollandais est un grand ami de l’Institut, l’évêque Johannes Baptist Gjisen.
En outre, un tiers-ordre est en train de naître, composé de laïcs ayant prononcé des vœux ou non, avec différents niveaux d’appartenance.
A l’institut, l’on peut choisir entre la vie active ou contemplative. Cette dernière se pratique dans cinq monastères: en Argentine à San Rafael, au Pérou à Arequipa, aux Canaries à Tenerife, en Jordanie à Anjarah et en Italie à Trivento.
La spiritualité est fondée sur l’incarnation du Verbe et elle s’exprime à la fois dans un fort élan missionnaire et dans l’“évangélisation des cultures“.
Au cœur de la formation qu’il dispense, l’institut place l’enseignement de saint Thomas d’Aquin, transmis par l’un des plus grands philosophes thomistes du XXe siècle, le père Cornelio Fabro (mort en 1995).
(...)
La revue philosophique de l’institut, intitulée “Tomismo essenziale“, s’inspire également de saint Thomas et du père Fabro.


Voici le discours du Pape, adressé aux "aux membres du Conseil pour les relations entre la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique, et les Unions Internationales des Supérieures et des Supérieurs Généraux" le 18 février 2008..
Inutile d'insister sur le contraste avec son successeur!


Chers frères et sœurs,

Au terme de cette matinée de réflexion commune sur certains aspects particulièrement actuels et importants de la vie consacrée à notre époque, je voudrais tout d'abord rendre grâce au Seigneur qui nous a offert la possibilité de cette rencontre très fructueuse pour nous tous. Nous avons eu l'occasion d'analyser ensemble les potentialités et les attentes, les espérances et les difficultés que rencontrent aujourd'hui les Instituts de Vie consacrée. J'ai écouté avec beaucoup d'attention et d'intérêt vos témoignages, vos expériences, et j'ai pris note de vos questions. Nous ressentons tous combien, dans la société moderne mondialisée, il devient toujours plus difficile d'annoncer et de témoigner l'Evangile. Si cela vaut pour tous les baptisés, c'est d'autant plus vrai pour les personnes que Jésus appelle à sa suite de manière plus radicale à travers la consécration religieuse. Le processus de sécularisation qui progresse dans la culture contemporaine n'épargne pas même, en effet, les communautés religieuses.

Il ne faut toutefois pas se laisser emporter par le découragement car si aujourd'hui, comme cela a été opportunément rappelé, un grand nombre de nuages s'amoncèlent à l'horizon de la vie religieuse, les signaux d'un réveil providentiel sont en train d'apparaître, et ils sont même en croissance constante, ce qui suscite des motifs d'espérance réconfortante. L'Esprit Saint souffle puissamment partout dans l'Eglise, en suscitant un nouvel engagement de fidélité dans les Instituts historiques, ainsi que de nouvelles formes de consécration religieuse en correspondance avec les exigences des temps. Aujourd'hui, comme à toutes les époques, il ne manque pas d'âmes généreuses disposées à tout abandonner pour embrasser le Christ et son Evangile, en consacrant à son service leur existence au sein de communautés marquées par l'enthousiasme, la générosité et la joie. Ce qui caractérise ces nouvelles expériences de vie consacrée, c'est le désir commun, partagé avec une prompte adhésion, de pauvreté évangélique pratiquée de manière radicale, d'amour fidèle à l'Eglise, de généreux dévouement envers son prochain dans le besoin, avec une attention particulière pour les pauvretés spirituelles qui caractérisent fortement l'époque contemporaine.

A plusieurs reprises, j'ai voulu moi aussi réaffirmer, comme mes vénérés prédécesseurs, que les hommes d'aujourd'hui ressentent un fort appel religieux et spirituel, mais ne sont prêts à écouter et à suivre que ceux qui témoignent avec cohérence de leur adhésion au Christ. Et il est intéressant de noter que ce sont précisément les Instituts qui ont conservé ou choisi un style de vie, souvent très austère, et quoi qu'il en soit fidèle à l'Evangile vécu "sine glossa", qui sont riches de vocation. Je pense aux nombreuses communautés de fidèles et aux nouvelles expériences de vie consacrée que vous connaissez bien; je pense au travail missionnaire de nombreux groupes et mouvements ecclésiaux où naissent un grand nombre de vocations sacerdotales et religieuses; je pense aux jeunes filles et aux jeunes garçons qui abandonnent tout pour entrer dans des monastères et des couvents de clôture. Il est vrai - nous pouvons le dire avec joie - qu'aujourd'hui aussi le Seigneur continue à envoyer des ouvriers dans sa vigne et à enrichir son peuple de nombreuses et saintes vocations. Nous lui en rendons grâce et nous le prions pour qu'après l'enthousiasme des choix initiaux - beaucoup de jeunes entreprennent le chemin de la perfection évangélique et entrent dans de nouvelles formes de vie consacrée à la suite de conversions bouleversantes -, pour que, disais-je, après l'enthousiasme des choix initiaux suive l'engagement de la persévérance sur un chemin authentique de perfection ascétique et spirituelle, sur un chemin de sainteté véritable.

En ce qui concerne les Ordres et les Congrégations ayant une longue tradition dans l'Eglise, on ne peut pas manquer de noter, comme vous l'avez vous-mêmes souligné, qu'au cours des dernières décennies presque tous ont traversé - qu'ils soient masculins ou féminins - une crise difficile due au vieillissement de leurs membres, à une diminution plus ou moins accentuée des vocations et parfois aussi à une "lassitude" spirituelle et charismatique. Dans certains cas, cette crise est même devenue préoccupante. Toutefois, à côté de situations difficiles, qu'il est bon de regarder avec courage et vérité, il faut également enregistrer des signes de reprise positive, en particulier lorsque les communautés ont choisi de revenir aux origines pour vivre de manière plus harmonieuse l'esprit du Fondateur. Dans la quasi totalité des Chapitres généraux des Instituts religieux, le thème récurrent a précisément été la redécouverte du charisme fondateur, qu'il fallait incarner et mettre en œuvre de manière renouvelée dans le temps présent. Redécouvrir l'esprit des origines, approfondir la connaissance du Fondateur ou de la Fondatrice, a aidé à imprimer aux Instituts un élan nouveau et prometteur dans le domaine ascétique, apostolique et missionnaire. Des œuvres et des activités séculaires ont été ainsi revitalisées par une nouvelle sève; l'on assiste de nouvelles initiatives de mise en œuvre authentique du charisme des fondateurs. C'est sur cette route qu'il faut continuer à avancer, en priant le Seigneur de porter pleinement à son accomplissement l'œuvre qu'Il a entamée.

En entrant dans le troisième millénaire, mon vénéré prédécesseur, le Serviteur de Dieu Jean-Paul II, a invité toute la communauté ecclésiale à "repartir du Christ" (Lettre ap. Novo millennio ineunte, nn. 29 sqq.). Oui! Les Instituts de Vie consacrée eux aussi, s'ils veulent conserver ou retrouver leur vitalité et leur efficacité apostolique, doivent continuellement "repartir du Christ". Il est le roc solide sur lequel vous devez construire vos communautés et chacun de vos projets de renouveau communautaire et apostolique.
Chers frères et sœurs, merci de tout cœur pour le soin que vous mettez à accomplir votre service difficile de conduite de vos familles religieuses. Le Pape est à vos côtés, il vous encourage et assure chacune de vos communautés de son souvenir quotidien dans la prière. Pour conclure notre rencontre, je voudrais encore une fois saluer avec affection le Cardinal-Secrétaire d'Etat et le Cardinal Franc Rodé, ainsi que chacun de vous. Je vous demande en outre de transmettre mon salut à tous vos confrères et vos consœurs, avec une pensée particulière pour les personnes âgées qui ont longuement servi vos Instituts, les malades qui contribuent à l'œuvre de la rédemption à travers leurs souffrances, les jeunes qui sont l'espérance de vos diverses familles religieuses et de l'Eglise. Je vous confie tous à la protection maternelle de Marie, modèle le plus élevé de vie consacrée, tout en vous bénissant de tout cœur.

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