Un beau portrait de Joseph Ratzinger


par un ancien condisciple, prêtre gréco-catholique ukrainien, aujourd'hui disparu. Cet article date de 2005, au lendemain de l'élection de Benoît XVI, et il est repris aujourd'hui par un site espagnol consacré au Pape émérite (7/11/2016)

>>> Texte en espagnol ici: www.benedictogaenswein.com
Traduction de Carlota



« Ratzinger ne s’est jamais mis en avant et n’a jamais cherché à être le centre de l’attention ».


Michael Hesemann
6 septembre 2005

Pavlo Kohut (1926 - 2006) a été compagnon de chambre du futur Pape Benoît XVI à Freising.
Gréco-catholique ukrainien, il s’est vu obligé de fuir les Russes. Il voulait être prêtre.
Quand je me suis entretenu avec le P. Kohut, durantl’été 2005, il ne se rappelait pas exactement quand il avait vu Joseph Ratzinger pour la première fois, si c’était dans la salle d’études ou lors d’un repas. Cependant il se rappelait encore vivement l’impression qu’il avait de lui :
« J’ai su immédiatement qu’il s’agissait d’un homme qui n’était pas seulement un camarade, mais quelqu’un de très spécial. Immédiatement il s’est intéressé à moi et m’a écouté avec attention. Cela a beaucoup signifié pour moi dans la situation dans laquelle je me trouvais à ce moment-là. Avec le temps nous nous sommes mieux connus et nous nous sommes souvent promenés ensemble. Je lui ai parlé de ma jeunesse, de mon oncle, de mes parents et de mon impossibilité d’avoir de leurs nouvelles à cause de la situation politique. Le rideau de fer était fermé; il était impossible d’envoyer des lettres et de recevoir des informations de la presse. Il s’offrit immédiatement à m’aider dans ma situation difficile, ce dont je lui suis encore reconnaissant aujourd’hui. À cette époque j’avais quelques problèmes avec la langue allemande. Il m’a aidé à écrire des lettres, à compléter des devoirs, et il corrigeait les résultats. Il s’occupait toujours de moi et l’on peut dire qu’il le faisait de bonne grâce. Il ne s’imposait jamais, il a toujours été discret. Il n’était jamais ms en avant, comme cela se produit parfois avec les jeunes, et il ne s’est jamais fait le centre de l’attention… En tout ce qu’il faisait, il montrait la plus grande concentration, - autant lorsqu’il travaillait que lorsqu’il étudiait ou parlait avec moi, jamais il ne laissait distraire par une autre chose. Il apprenait constamment et il était sans cesse assoiffé de nouvelles connaissances. Chaque fois qu’on le voyait il lissait, utilisant chaque minute pour apprendre. Et chaque fois il était très ordonné, très bien organisé. Comme on le voit, sa diligence a donné de bons fruits.

Mgr Georg Ratzinger se rappelait aussi P. Kohut, avec respect :
« Je n’ai pas eu beaucoup de contact avec Pavlo Kohut, mais mon frère avec une très grande amitié avec lui. C’était un homme très sociable, agréable et tout le monde savait qu’il venait de l’Église d’Orient, de cette église dont il pouvait nous dire beaucoup de chose. Il a été en général très aimé et nous avons tous de très bons souvenirs de lui » (cf. « Mon frère le Pape », Michael Hesemann/Georg Ratzinger)

 

Un ami du Pape Benoît

6 septembre 2005
Sources: <day.kyiv.ua>

Le P. Pavlo Kohut, un ami proche du Pape Benoît XVI. Non seulement ils se sont assis à la même table au séminaire, mais ils ont aussi partagé la même chambre, révèle-t-il à des journalistes ukrainiens.

Le P. Pavlo Kohut est né en 1926 dans le village de Koniukhy, dans le district de Koziv de la région de Ternopil (ndt à l’époque Tarnopol en Pologne et capitale de la Voïvodie/province polonaise du même nom). Il finit par se retrouver en France après la Seconde Guerre Mondiale, après avoir quitté sa terre natale pour consacrer sa vie au service du Seigneur. Aujourd’hui le P. Pavlo se rappelle les jours d’autrefois comme d’un rêve incroyable.

Priant journellement avec ses parents, l’amour de Dieu lui fut inculqué dès l’enfance. Afin de devenir prêtre, le jeune homme dut passer par un chemin semé d’épines.
« Je revois ma mère à la sortie du village, dans le bois », dit le P. Pavlo, se remémorant son difficile voyage vers l’Europe [occidentale] : « Quand nous nous sommes dit au revoir, elle ne savait pas ce que j’allais devenir, si j’allais pouvoir traverser les bois. Ma mère n’a eu aucune nouvelle de moi pendant 10 ans. C’est après la mort de Staline (ndt 5 mars 1953) que j’ai pu écrire une lettre à la maison en disant que j’étais sain et sauf et que j’étais prêtre en Lorraine, en France ».

En 1944, de nouveau, des chemins inconnus menèrent Pavlo Kohut jusqu’en Allemagne où il compléta son éducation secondaire. Plus tard il devait étudier au séminaire, en France et en Allemagne. Et en Allemagne il fit la connaissance du futur Pape Benoît XVI dont le nom dans le siècle était Joseph Ratzinger. « Nous nous sommes connus en 1950, quand je suis arrivé à Freising pour terminer mes études théologiques. J’ai partagé une chambre avec Ratzinger sans jamais imaginer qu’un jour il serait Pape » commente le P. Kohut.
« Nous étions assis à la même table dans la salle de classe et nous avons été immédiatement amis, ce qui n’est pas surprenant car Joseph était très bon, simple et intelligent. Souvent nous avions l’habitude de marcher et de travailler ensemble. Dans sa jeunesse le Pape était un garçon beau, bon et généreux, - il écoutait toujours avec attention les autres, et il était évidemment très pieux. Il est toujours le même aujourd’hui. Au début nous étions logés à quatre dans une chambre. Il n’y avait pas de services particuliers à notre usage. Pour laver notre linge, nous devions chercher une cuvette d’eau dans la nuit et laver le matin. En hiver l’eau était gelée en raison du froid extrême de la chambre et nous devions piquer la glace ».

Le P. Pavlo Kohut décrit Joseph Ratzinger comme une personne modeste et digne, un excellent théologien, avec un caractère limpide, qui ne va jamais transiger avec le mal ou dire que ce qui est noir est blanc. C’est pour cela que certaines personnes ne l’aiment pas et lui collent toutes sortes d’étiquettes.

Grâce à son amitié avec le P. Pavlo, Joseph Ratzinger, est arrivé à connaître l’Ukraine et ses problèmes. Il a su, de cette façon, que l’église ukrainienne vivait des moments difficiles. « Par exemple, j’ai parlé à Joseph du frère cadet de ma mère, qui avait été torturé jusqu’à sa mort en prison en 1941 », rappelle le P. Pavlo.

Après avait été ordonné en 1951, les deux amis se sont séparés. Ils ne se sont pas revus jusqu’à ce que Ratzinger devienne archevêque de Munich. « Quand nous nous sommes de nouveau retrouvés, j’ai commencé à parler comme si nous nous étions dit au revoir la veille », commente le P. Pavlo avec surprise. Joseph Ratzinger a commencé à rappeler chaque détail des événements qui avaient eu lieu 25 ans auparavant. Il a demandé si Pavlo avait réussi à se mettre en contact avec ses parents.

« Il était très attentif et avait une très bonne mémoire. La dernière fois que nous nous sommes vus c’était à l’occasion des célébrations du 50ème anniversaire de notre ordination. Nous étions revenus à Freizing. J’ai célébré l’anniversaire avec mes paroissiens en Alsace, et ensuite à Munich, pour servir la Sainte Liturgie dans l’Église où j’avais été ordonné. Ce dimanche-là Ratzinger célébra une messe dans la Cathédrale de Munich. Nous nous sommes retrouvés le jour suivant au séminaire de Freising.
Récemment j’étais à Rome et j’ai eu une courte audience avec Benoît XVI ; bien qu’il y eût beaucoup d’autres personnes qui attendaient pour voir le Pape, nous nous sommes salués avec une grande joie. Joseph m’a invité à venir Vatican pour que nous puissions avoir une plus longue conversation. C’était un grand honneur pour moi. Je suis sûr que Benoît est digne du siège de Saint Pierre et qu’il sera capable de guider les chrétiens parce que Dieu l’aidera ».