Benoît XVI est l'espoir
Au milieu de tous les soubresauts qui agitent l'Eglise, il reste le point ferme qui l'empêche de faire naufrage, et auquel les catholiques peuvent se raccrocher, et sa présence reste pour François un "facteur disuasif". Très bel article d'Antonio Socci (4/7/2019)
Il répond avec sincérité et conviction aux arguments de "Super Ex" (ICI: Benoit XVI redoute-t-il un schisme?) et aux doutes qu'ils avaient fait naître chez certains, et j'avoue que sa lecture m'a procuré un certain soulagement.
Antonio Socci est aussi le seul observateur, au moins à ma connaissance, qui ait relevé l'incongruité absolue, pour ne pas dire l'indécence d'associer les noms de Benoît XVI et de François dans un livre consacré aux scandales de pédophilie (cf. Pierre parle d'une seule voix).
Un montage éloquent!
L'"Eglise sortante" de Bergoglio est sortie du catholicisme.
Le cardinal Brandmuller dénonce "hérésie" et "apostasie" dans le document vatican du prochain synode.
La crise la plus grave en 2000 ans d'histoire.
Le Pape (Benoît XVI) est l'espoir.
www.antoniosocci.com
4 juillet 2019
Ma traduction
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Avec le document du Vatican pour le Synode sur l'Amazonie, le pontificat de Bergoglio a son manifeste officiel d'extrême gauche. Un manifeste de «socialisme surréaliste».
Après Trump et Salvini, le président brésilien Bolsonaro fait désormais lui aussi partie des ennemis: tous trois emblèmes de l'Occident détesté des peuples de tradition judéo-chrétienne qui ne renient pas leurs racines et leur identité.
Cet "Instrumentum laboris" du Vatican - a écrit José Antonio Ureta - «représente l'ouverture en grand des portes du Magistère à la théologie indienne et à l'écothéologie, deux dérivés latino-américains de la théologie de la libération, dont les coryphées, après la chute de l'URSS et la faillite du "socialisme réel", attribuèrent aux peuples indigènes et à la nature le rôle historique de la force révolutionnaire, selon une clé marxiste». (Synode Amazonie: revoilà la "Teologia india")
Les catholiques sont déconcertés. Il semble que l'«Eglise sortante» voulue par Bergoglio sorte vraiment, mais du catholicisme. Le cardinal Walter Brandmüller - ami personnel de Benoît XVI - est un éminent historien de l'Église et pourtant, contre cet "Instrumentum laboris", il n'a pas hésité à utiliser les termes les plus durs: «hérétique» et «apostat» (La Grosse Bertha du cardinal Brandmüller).
Brandmüller parle du synode comme «d'une intrusion agressive dans les affaires purement mondaines de l'Etat et de la société brésilienne». Il condamne ensuite les absurdités théologiques du document (par opposition aux textes du Concile Vatican II) et le «rejet anti-rationnel de la culture "occidentale" qui souligne l'importance de la raison».
Cet "Instrumentum" vatican - tonne le cardinal - «charge le synode des évêques et finalement le pape d'une grave violation du depositum fidei, ce qui signifie en conséquence l'autodestruction de l'Église ou le changement du "Corpus Christi mysticum" en une ONG laïque à vocation écologique, sociale et psychologique».
Le prélat conclut «avec force» que le document du Vatican «contredit l'enseignement contraignant de l'Église sur des points décisifs et doit donc être qualifié d'hérétique. Puisque le fait de la révélation divine est également remis en cause ici, ou mal compris, il faut aussi parler d'apostasie». Il constitue «une atteinte aux fondements de la foi... et doit donc être rejetée avec la plus grande fermeté».
La position du cardinal, ami de Benoît XVI, est celle des catholiques. Et on peut penser qu'elle est avant tout partagée par le Pape Ratzinger qui, pendant des années, a défendu la foi de l'Église de la théologie de la libération et de tous ses dérivés qui aujourd'hui remplissent le document du Vatican.
Malgré mille pressions, la cour bergoglienne n'a jamais obtenu de Benoît XVI un désaveu des quatre cardinaux des Dubia (dont Brandmüller lui-même). Elle n'a jamais non plus obtenu un désaveu de Mgr Carlo Maria Viganò, auteur d'un mémoire historique sur les scandales.
En avril dernier, le pape Ratzinger a même publié un texte - précisément sur les scandales - dont la réflexion s'inscrit dans la droite ligne de celle des pasteurs mentionnés plus haut et l'enrichit (Notes de Benoît sur le scandale des abus sexuels).
Et on peut dire qu'il y avait déjà rejeté à l'avance le document du Vatican sur l'Amazonie. En effet, il condamne toute tentative de remplacer l'Église du Christ en créant «une autre Église, inventée par nous», parce qu'une Église qui - au lieu du salut de l'homme - s'occupe de politique, d'économie, d'écologie (et le fait selon les idéologies du monde) est «une expérience déjà faite et qui a échoué».
Ce texte de Benoît XVI est en cours de publication dans un livre des éditions Cantagalli avec d'autres textes de Bergoglio sur le problème des scandales et le chœur clérical accrédite cette opération éditoriale comme un signe de l'harmonie entre les deux papes (cf. Pierre parle d'une seule voix).
Mais quelle harmonie? D'ailleurs, un certain cercle bergoglien avait réagi rageusement, en avril dernier, quand Benoît XVI a rendu ses "notes" publiques. Certains ont même insinué qu'elles n'étaient pas de lui.
Bergoglio s'était du reste bien gardé de diffuser le document, que Benoît XVI lui avait remis, lors du sommet du Vatican sur les scandales auquel il était destiné.
Aujourd'hui, il contribue à ce livre avec ses textes pour nous faire oublier son échec en la matière (souligné par Mgr Viganò). Bergoglio se réfugie derrière l'autorité de Benoît XVI. Mais il suffit de lire pour comprendre combien les deux positions sont opposées.
Ces dernières années, le pape Ratzinger a une tâche dramatique.
D'une part, il doit conjurer les déchirures bergogliennes qui arrachent l'Église à la doctrine catholique (et sa présence même est un facteur dissuasif qui «met en garde» l'Argentin).
D'autre part, il doit encourager les catholiques égarés dans le désastre actuel (y compris les évêques et les cardinaux) et les inviter à défendre la foi de l'Église en évitant toutefois des ruptures irréparables.
Les signaux qu'il donne sont toujours discrets, mais clairs et réconfortants. Pas seulement avec des interventions puissantes comme le document d'avril dernier. Mais aussi en rappelant que lui - c'est-à-dire le Pape - il est là et que les catholiques ne doivent pas se sentir orphelins.
Le dernier (très beau) livre de Ratzinger, "Per amore" (cf. Une homélie inédite de Joseph Ratzinger ), porte sur sa couverture non pas le qualificatif de "Pape émérite", mais la signature manuscrite "Benedetto PP XVI". Ce sigle "PP" signifie "Pastor pastorum" (ou Pater Patrum) et est le titre (et la prérogative) du pape régnant (cf. Où est Pierre et qui est Pierre?).
C'est le énième petit signal d'une situation dramatique du Siège Apostolique qui ne peut pas (pas encore) être clarifiée, mais qui confirme ce que Benoît XVI a dit dans sa dernière audience du 27 février 2013 : «Le "toujours" est aussi un "pour toujours" - il n'y a plus de retour à la vie privée. Ma décision de renoncer à l'exercice actif du ministère ne révoque pas cela».
Dans certaines de ses lettres récentes - comme celle du 23 novembre 2017 au cardinal Brandmuller, dans laquelle il se montre très préoccupé par la situation de l'Église actuelle - Benoît XVI salue en écrivant: «Avec ma bénédiction apostolique» (cf. Des lettres surprenantes de Benoît XVI , 20/9/2018). Mais seul le pape régnant peut donner la bénédiction apostolique (directement ou par délégation). Si Benoît n'était plus Pape, il commettrait un abus.
Du reste, beaucoup d'autres signes devraient faire réfléchir. Pas seulement la soutane, le nom, le titre, les armoiries. Bergoglio lui-même l'appelle "Sainteté" (parce qu'il se définit officiellement "Sa Sainteté Benoît XVI").
Depuis six ans - dans les cercles bergogliens - ils veulent obtenir de Benoît XVI une déclaration dans laquelle il dit qu'il n'a plus rien à voir avec la papauté et qu'il est seulement évêque. Mais ces paroles, Benoît ne les dit pas.
Un journaliste du "Corriere" a écrit que des anonymes (dans des circonstances non précisées) auraient entendu Benoît dire «Il y a un seul Pape, François». Mais ce même journaliste a récemment pu rencontrer Ratzinger, lui poser des questions et Benoît XVI ne lui a pas dit cette phrase (Une présence lucide qui veille sur l'Eglise).
La pensée de Benoît XVI s'est plutôt exprimée par les mots que son bras droit, Mgr Georg Gänswein, a prononcés dans une conférence historique à la Grégorienne (benoit-et-moi.fr/2016):
Avant et après sa démission Benoît a entendu et entend sa tâche comme participation à un tel "ministère pétrinien". Il a quitté le trône pontifical et pourtant, avec le pas du 11 Février 2013, il n'a pas abandonné ce ministère. Il a au contraire intégré l'office personnel dans une dimension collégiale et synodale, presque un ministère en commun... C'est pour cela que Benoît XVI n'a renoncé ni à son nom, ni à la soutane blanche. C'est pour cela que l'appellation correcte pour s'adresser à lui est encore aujourd'hui "Sainteté"... il n'a pas abandonné l'Office de Pierre - chose qui lui aurait été tout à fait impossible à la suite de son acceptation irrévocable de l'office en Avril 2005.
Gänswein parle de «pontificat d'exception».
Il y en a qui croient que par un mystérieux plan de la Providence, l'Église est aujourd'hui soumise à une épreuve très dure, son Vendredi Saint, mais que la présence de Benoît garantit qu'elle ne fera pas naufrage.
A coup sûr, Benoît XVI est aujourd'hui central dans l'Église. Et un jour, tout s'éclaircira.
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