Vif échange épistolaire (au moins en apparence) entre le cardinal Marx, président de la Conférence épiscopale allemande, et le cardinal Ouellet, préfet de la congrégation pour les évêques: les évêques allemands (au moins ceux qui suivent Marx) ont bien l’intention de poursuivre leur « chemin synodal » singulier, passant outre aux injonctions vaticanes et créant une « église » locale.

Au sujet du « Chemin synodal » de l’Eglise allemande, voir sur « Benoit-et-moi »:

Le cardinal Marx dit que le « Synode » allemand ira de l’avant malgré les objections du Vatican

Ed Condon/CNA
NCR
16 septembre 2019
Ma traduction

La semaine dernière, le chef de la conférence épiscopale allemande a informé les responsables du Vatican que le fait d’aborder, lors du « chemin synodal contraignant » proposé par les évêques allemands, des sujets théologiques controversés sera un service pour l’Église universelle.

« Nous espérons que les résultats de la formation d’une opinion [sur ces questions] dans notre pays seront également utiles pour guider l’Église universelle et les autres conférences épiscopales au cas par cas. Quoi qu’il en soit, je ne vois pas pourquoi les questions sur lesquelles le magistère s’est déterminé devraient être retirées de tout débat, comme vos écrits le suggèrent« , a écrit le cardinal Reinhard Marx dans une lettre du 12 septembre au cardinal Marc Ouellet, qui dirige la Congrégation des évêques du Vatican.

« D’innombrables croyants en Allemagne considèrent que [ces questions] ont besoin d’être discutées « , a ajouté le cardinal Marx.
La lettre du cardinal Marx informait le Vatican que le processus synodal allemand se poursuivrait comme prévu, malgré les instructions récentes de la Curie vaticane et du Pape, et traiterait de questions universelles d’enseignement et de discipline.
Cette lettre faisait suite à une semaine de médiatisation des projets des évêques allemands de créer une Assemblée synodale avec un « pouvoir délibératif » pour aborder des questions telles que la séparation du pouvoir dans l’Église, la vie sacerdotale, l’accès des femmes au ministère et aux offices dans l’Église et la morale sexuelle.
Cette lettre était une réponse à la dernière intervention du Vatican à propos des préparatifs allemands d’un processus synodal, dans laquelle le cardinal Ouellet envoyait au cardinal Marx une évaluation juridique de quatre pages des projets allemands, concluant que l’Assemblée synodale est contraire aux instructions du Pape François et « non ecclésiologiquement valide ».
L’analyse juridique critiquait particulièrement le projet allemand de discuter des questions de discipline et de doctrine déjà tranchées par l’enseignement universel de l’Église ou la loi universelle.
« Il est facile de voir que ces thèmes n’affectent pas seulement l’Eglise en Allemagne mais l’Eglise universelle et – à quelques exceptions près – ne peuvent faire l’objet de délibérations ou de décisions d’une Eglise particulière sans contrevenir à ce qui est exprimé par le Saint-Père dans sa lettre », concluait l’évaluation juridique, signée par l’archevêque Filippo Iannone, qui dirige le Conseil pontifical pour les textes législatifs.

Le 5 septembre, CNA rapportait qu’en août, le comité exécutif de la Conférence épiscopale allemande avait approuvé un projet de statuts pour la création d’une Assemblée synodale, en partenariat avec le Comité central des catholiques allemands, un groupe laïc qui réclame l’ordination des femmes, la fin du célibat clérical et la bénédiction des unions homosexuelles dans les églises.
Lors de la même rencontre, le comité exécutif des évêques allemands avait rejeté un plan synodal alternatif rédigé selon les instructions du Pape François, qui avait été adressé aux évêques dans une lettre transmise en juin à tous les fidèles d’Allemagne. Ces instructions avertissaient les évêques de ne pas tomber dans un « nouveau pélagisme » et insistaient sur le fait que la synodalité ne pouvait servir d’excuse pour réduire la gouvernance et l’enseignement de l’Église à un processus démocratique.

Dans sa lettre du 12 septembre au cardinal Ouellet, le cardinal Marx a fait part de sa désapprobation apparente face à la décision du Vatican de présenter son avis juridique sans le consulter préalablement: « Une conversation avant d’envoyer ces documents aurait peut-être été utile », a-t-il écrit.
Dans un rejet apparent (!!) de l’évaluation juridique du Vatican, le cardinal Marx a ajouté que l’Église en Allemagne « mènera une consultation à notre manière, non couverte par le droit canon ».

L’avis juridique de la Commission pontificale pour les textes législatifs, envoyé aux Allemands par le cardinal Ouellet, conclut que les évêques semblent vouloir convoquer un concile particulier « sans utiliser le mot » comme moyen d’adopter des résolutions contraignantes sans l’approbation de Rome (la différence entre un concile et un synode est que le premier, avec l’approbation du Vatican, est en mesure d’engager de nouvelles politiques pour l’Église sur un sujet spécifique). Mais le cardinal Marx a dit que les projets de l’Allemagne ne concernent pas un concile, ou même un synode dans le sens traditionnel, mais quelque chose d’unique et non prévu par le droit canon. « La Voie synodale est un processus sui generis« , a-t-il écrit. « Le projet de statuts ne doit donc en aucun cas être lu et interprété à la lumière d’instruments canoniques tels qu’un conseil plénier. Ce n’est pas un Concile Particulier! ».

La lettre du cardinal Marx insistait aussi sur le fait que l’évaluation juridique du Vatican est basée sur une ébauche des plans allemands « dépassée depuis longtemps », qui a été « encore développée en juillet et août ». Alors que le cardinal Marx notait que les statuts incluent une reconnaissance de l’autorité de l’évêque diocésain et de la conférence épiscopale, l’article 2 des statuts actuels dit que l’Assemblée synodale « a un pouvoir délibératif ».
Bien que le cardinal Marx insiste auprès du cardinal Ouellet sur le fait les statuts ont subi des changements ultérieurs en août, la CNA a obtenu des documents internes de la conférence épiscopale allemande qui montrent que les statuts les plus récemment votés par le comité exécutif ont été rédigés le 1er août et sont demeurés inchangés jusqu’à la fin du mois.
La CNA a confirmé auprès des responsables de la Congrégation pour les évêques et du Conseil pontifical pour les textes législatifs que le Vatican était déjà en possession du projet le plus récent des statuts synodaux allemands au moment où la lettre du cardinal Ouellet a été envoyée au cardinal Marx, le 4 septembre.

La version actuelle a été considérée par le cardinal Marx comme suffisamment finalisée pour qu’il charge les responsables de la conférence de préparer les traductions autorisées des statuts en plusieurs langues après la rencontre du 19 août. De hauts responsables de la conférence ont dit à la CNA que les évêques allemands ont l’intention de créer un exemple qui puisse être « exporté » vers d’autres parties du monde.
Les résultats seront « utiles pour la direction de l’Église universelle et pour d’autres conférences épiscopales », a écrit le cardinal Marx.

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