Ce n’est plus tout à fait un conte de Noël, date oblige, mais c’est une très jolie histoire vécue que nous raconte ici Aldo Maria Valli. Avec en bonus, « Lead, Kindly Light« , une sublime poésie-prière de John Henry Newman…


Un black-out providentiel


Aldo Maria Valli
30 décembre 2019
Ma traduction

Dimanche 29 décembre 2019. C’est-à-dire hier. Je vais à la messe à dix-huit heures, dans ma paroisse. Avant d’entrer, je lève les yeux vers le ciel et je vois la Lune et Vénus, très proches. La dernière conjonction non seulement de l’année, mais de la décennie. Je me rends compte que la croix illuminée au sommet du clocher forme avec les deux étoiles un triptyque à couper le souffle. Merveilleux. Mais le temps presse et je me hâte d’entrer à l’intérieur.
Je fais une génuflexion, le signe de la croix et… le noir! Le maudit noir. Que se passe-t-il? Alors que mes yeux s’habituent lentement à l’obscurité, il y a un petit point rouge de lumière là-bas. C’est la lumière devant le Saint-Sacrement. C’est la seule lumière qui reste, et c’est comme si elle disait:  » Ne vous inquiétez pas, je suis là. Et c’est tout ce qui compte! »

Spontanément, je m’agenouille à nouveau et je pense: mais voyez quels beaux cadeaux ce soir; d’abord le triptyque dans le ciel, puis cette obscurité qui a remis le Saint Sacrement au centre.

Pendant ce temps, un des prêtres de la paroisse arrive. Il a une torche et dit que le courant s’est éteint dans la moitié du quartier. Que va-t-on faire? Attendons le curé, c’est lui qui décidera.
Pendant que nous attendons, je savoure l’obscurité et la flamme rouge qui vacille devant le Saint Sacrement. Je me dis: en fait, d’habitude, il y a vraiment trop de lumière.
Qui sait pourquoi, dans l’obscurité, les gens baissent le ton de leur voix, et ainsi je rends grâce deux fois: pour l’obscurité et pour le silence. Si seulement c’était toujours comme cela!

Arrive le curé. Il gare sa voiture juste devant l’entrée de l’église et garde les phares allumés pour s’éclairer. Nous, fidèles, nous attendons les ordres.
L’absence de lumière n’est pas le problème principal: on peut la compenser avec des bougies et une torche. Le problème, c’est le micro. L’église est grande, et sans amplification il est difficile d’entendre ce que le célébrant et les lecteurs disent. Alors le curé propose: « Allons tous dans la chapelle! ».

Photo AMV

Aussitôt dit, à l’aide des lumières émises par les téléphones portables, nous nous dirigeons vers la chapelle latérale, celle utilisée pour les messes du matin. Mais ici, la lumière revient.

Je suis un peu dépité. L’enchantement est rompu. Quoi qu’il en soit, nous décidons de célébrer dans la chapelle, parce que nous sommes peu nombreux et parce que peut-être (je l’espère) la lumière s’éteindra à nouveau. Mais ce ne sera pas le cas. Le black-out est terminé. Et l’enchantement aussi.

Tenez, c’est mon histoire de fin d’année. Une chronique vraie, que je vous propose avec la photo que j’ai prise de la lumière rouge, à côté du tabernacle, plongé dans l’obscurité.
Comment dit-elle, cette poésie-prière du cardinal Newman? “Lead, kindly Light…” …

Lead, kindly Light, amid th’encircling gloom, lead Thou me on!
The night is dark, and I am far from home; lead Thou me on!
Keep Thou my feet; I do not ask to see
The distant scene; one step enough for me.

I was not ever thus, nor prayed that Thou shouldst lead me on;
I loved to choose and see my path; but now lead Thou me on!
I loved the garish day, and, spite of fears,
Pride ruled my will. Remember not past years!

So long Thy power hath blest me, sure it still will lead me on.
O’er moor and fen, o’er crag and torrent, till the night is gone,
And with the morn those angel faces smile, which I
Have loved long since, and lost awhile!

Conduis-moi, douce lumière, parmi l’obscurité qui m’environne, conduis-moi !
La nuit est sombre, et je suis loin du foyer, conduis-moi !
Garde mes pas ; je ne demande pas à voir
Les scènes éloignées : un seul pas est assez pour moi

Je n’ai pas toujours été ainsi : je n’ai pas toujours prié que tu me conduises ;
J’aimais choisir et voir mon chemin, mais maintenant conduis-moi.
J’aimais le jour éclatant, et, malgré mes craintes,
L’orgueil dominait mon vouloir : ne te souviens pas des années passées.

Aussi longtemps que Ta puissance m’a béni, aussi longtemps elle me conduira encore,
À travers landes et marécages, rochers et torrents, jusqu’à ce que la nuit s’achève
Et qu’avec ce matin sourient ces visages angéliques
Que j’ai longtemps aimés et perdus pour une heure.

(traduction wikipedia)

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