On doit se pincer en lisant la liste des signataires de l’Appel relayé par « Le Monde« . Mais on aurait tort de se focaliser sur ce seul aspect: au-delà de l’incongruité de voir une tribune accordée à des privilégiés (où des scientifiques, et mêmes des Prix Nobel côtoient des starlettes) pour donner leur avis sur des sujets qui excèdent trop souvent leurs compétences (*), il faut surtout retenir l’intention extrêmement inquiétante de ceux auxquels ils servent d’idiots utiles et qui entendent utiliser la pandémie pour faire avancer un agenda carrément « révolutionnaire », plus rouge que vert.

(*) A propos de starlettes, relire la sortie décapante du présentateur des Golden Globes 2020: Tranche de rire: Ricky Gervais

Les communistes verts pour un lockdown permanent

Stefano Magni
La NBQ
12 mai 2020
Ma traduction

Le « chapeau » de l’Appel, dans Le Monde, 6 mai 2020

L’épidémie de coronavirus est considérée comme une « opportunité » de redessiner la société. Comment? Selon les idéologies de l’écologisme et du néo-communisme. Ce sont les appels lancés par Le Monde (200 signataires VIP) contre le retour à la normale après le lockdown et par The Independent pour le salaire universel.

Le confinement prend fin aussi dans d’autres pays, en plus de l’Italie. Hier, la France en est sortie, elle a rouvert des écoles et la plupart des activités restées bloquées. Mais certains disent non. Non seulement pour une raison de prudence compréhensible (par crainte que la reprise d’une vie sociale puisse faire repartir la contagion), mais surtout parce que, idéologiquement, le lockdown est vécu comme un modèle de vie idéal. C’est le sens d’un « manifeste contre le retour à la normale », lancé par l’actrice Juliette Binoche et l’astrophysicien Aurelién Barrau, publié par Le Monde et signé par 200 personnalités, dont des artistes internationaux (comme la chanteuse Madonna, l’acteur Robert De Niro, le réalisateur Paolo Sorrentino, le mannequin et actrice Monica Bellucci), mais aussi de nombreux scientifiques.

Pourquoi ne devrions-nous pas revenir à une vie sociale normale, comme celle que nous avons vécue avant février 2020?

« Pour le bien de la Terre », déclarent les Vip signataires. Parce que maintenant, comme l’a écrit Gunter Pauli (consultant du gouvernement Conte), en l’absence d’activité humaine, la planète respire. Et comme l’a rappelé le père jésuite Benoît Mayaki (cf. Corona Virus: les délires écologistes de Vatican News, ndt), le coronavirus est « l’allié involontaire de la Terre ». La logique du manifeste du Monde n’est pas différente: « Il nous semble inimaginable de revenir à la normale », la pandémie est une « tragédie », mais « la crise a l’avantage de nous inviter à affronter les questions essentielles ». Les signataires estiment que « le problème est systémique », c’est-à-dire que « la catastrophe écologique actuelle s’inscrit dans une méta-crise (…) le consumérisme nous a conduit à nier la vie elle-même : celle des plantes et des animaux et celle d’un grand nombre d’êtres humains (…) La pollution, le réchauffement (global) et la destruction des espaces naturels amènent le monde à un point de rupture ».

L’appel demande aux gouvernements de « sortir de la logique insoutenable qui prévaut encore, pour travailler à une refondation profonde des objectifs, des valeurs et des économies ».

Le lecteur se demandera probablement ce que le Covid-19, qui est la dernière d’une très longue série de pandémies qui ont caractérisé toute l’histoire de l’humanité, a à voir avec les problèmes contemporains énumérés par les signataires du Vip. La réponse est celle qui est la plus simple: rien. Le virus, dans sa genèse et sa diffusion, n’est pas différent de ceux qui se sont répandus dans le monde entier à l’ère préindustrielle, lorsque le réchauffement climatique anthropique n’était même pas théoriquement concevable. L’alerte lancée dans Le Monde aurait pu être écrite en 2019, au plus fort de la campagne « Fridays for Future » de Greta Thunberg. Le coronavirus est-il juste un moyen d’attirer l’attention d’un peuple effrayé et de lui dire « au fait, n’oubliez pas le réchauffement climatique » ? Pas seulement. Il s’agit d’une tentative explicite de récupérer une vieille lutte que le virus a reléguée au second plan.

L’écologie était au centre de l’agenda européen du président français Emmanuel Macron et a caractérisé le programme politique d’Ursula von der Leyen, la nouvelle présidente de la Commission européenne. Aujourd’hui, c’est surtout l’Alliance européenne pour une Relance Verte, composée de 180 personnalités européennes (79 députés européens de 17 pays, 37 PDG de multinationales, 28 associations d’entreprises et 7 ONG, ainsi que des groupes d’experts), qui pousse dans cette direction. Son objectif est de relancer le Green New Deal annoncé par Ursula von der Leyen, mais temporairement mis en veilleuse en raison de la pandémie, qui a fixé d’autres priorités. Le but est de promouvoir une « sortie verte » de la crise économique: les énormes investissements nécessaires à la reconstruction devront donner la priorité aux critères écologiques, c’est-à-dire aux activités en rapport avec la lutte contre le réchauffement climatique. Un projet qui a bien peu à voir avec l’économie: il suffit de penser à la bulle des énergies renouvelables qui dépendent des subventions de l’État parce qu’elles ne produisent pas assez d’énergie ou de profit.

La « Global Mayors COVID-19 Recovery Task Force » du réseau C40 (1), qui rassemble les maires des métropoles du monde entier, pousse dans la même direction. Cette année, il est présidé par le maire de Milan, Giuseppe Sala. Son objectif est ouvertement écologique : « Créé dans le but de parvenir à une reprise qui, en même temps, améliore la santé publique, réduit les inégalités et lutte contre la crise climatique, grâce au partage des connaissances, des compétences et des expériences ».

Le renouveau éco-durable de Milan a été annoncé par Greta Thunberg, qui dans un tweet fin avril a défini la ville du nord de l’Italie comme un « laboratoire ». De quel type? Plus de voitures, seulement des transports publics (alors que les passagers devront nécessairement être réduits de moitié par la distanciation sociale) et des incitations pour les scooters et les vélos.

Sous le vert, il suffit de creuser un peu et vous retrouvez le rouge du communisme. Le manifeste du Monde, outre la promotion d’une vision de défense de l’écologie, vise un nouvel égalitarisme social. Les inégalités sociales et le réchauffement climatique sont fusionnés en un seul problème, par ces étranges alchimies idéologiques. Certains philosophes encore très écoutés, comme le Slovène Slavoj Zizek, espèrent un nouveau tournant communiste après la défaite historique de 1989 : « Le coronavirus nous obligera à réinventer un communisme fondé sur la confiance dans les hommes et la science ». Il ne sera pas centré dans une nouvelle Union soviétique, mais dans « une sorte d’organisation mondiale qui peut contrôler et réguler l’économie, ainsi que limiter la souveraineté des Etats-nations ».

En pratique, dans une variante plus modérée de ce nouveau communisme, cinq cents universitaires et politiciens de gauche ont rédigé leur propre lettre ouverte publiée dans le journal britannique The Independent, dans laquelle ils réclament un salaire universel de base [ndt: comme le Pape!!! cf. Un pontificat idéologique]. Beppe Grillo, co-fondateur du Mouvement 5 étoiles, fait lui aussi sien cet appel et relance une de ses idées qui l’ont rendu célèbre: « L’urgence que nous vivons pourrait favoriser un tournant révolutionnaire historique, qui a toujours été considéré superficiellement comme fou par beaucoup, et qui pourrait changer notre avenir en mieux ».

Benoît Hamon, leader de l’extrême gauche française, a écrit à propos du salaire universel : « Le salaire universel pour l’existence est un instrument d’émancipation incomparable. (…) En libérant chacun d’une dépendance exclusive du salaire gagné au travail, le salaire universel donne à chaque individu la capacité de négocier et de choisir. (…) L’émancipation sociale passe par cette pratique individuelle de la liberté. (…) La crise va donner naissance à un monde nouveau ». Selon un sondage publié par The Independent lui-même, le salaire de base universel est actuellement soutenu par 71% des citoyens européens. Ce serait la fin du travail productif tel que nous l’avons connu jusqu’à présent.


(1) En allant sur la page d’accueil du site ouvert pour l’occasion (parmi les maires, évidemment, Anne Hidalgo), on tombe sur ce manifeste an anglais basique que je laisse à mes lecteurs le soin de traduire, éventuellement via la traduction automatique: https://www.c40.org/other/covid-task-force

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