Sur les sites catholiques c’est un concert de louanges unanimes pour saluer la mémoire de Michael Lonsdale: non pas le grand comédien, au phrasé inimitable et aux manières aristocratiques, vaguement inquiétantes (voir La Mariée était en noir), mais « l’homme d’une foi profonde » (qu’il était sans doute). Le mainstream, en leur faisant, pour une fois, écho, s’offre ainsi à peu de frais « son » catholique pour justifier une prétendue absence de préjugés cathophobes.
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En réalité, Michael Lonsdale n’était pas du tout du genre « poil à gratter » pour eux, mais au contraire, un catholique selon leurs vœux (grand fan de François, pour le mariage des prêtres, l’immigration incontrôlée, l’Eglise « en sortie », contre les catholiques traditionalistes, les « fastes » de la liturgie », proche de l’islam, « anticlérical », etc.), et ils veulent uniquement se souvenir de son rôle dans « le magnifique film Des Hommes et des Dieux de Xavier Beauvois » (sic!), véritable icône de « l’esprit d’Assise ». Au risque d’être accusée de mesquinerie, et tans pis, j’ai retrouvé quelques articles anciens, qui justifient mes réserves, tout en étant convaincue que je n’ai aucun titre à porter un jugement sur sa catholicité (j’épargne à mes lecteurs la célébrissime phrase du Pape dans l’avion de retour des JMJ De Rio.
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En même temps, comme je ne veux pas être injuste, je renvoie au Salon Beige, qui crédite Michael Lonsdale des mérites qui lui sont certainement légitimement dûs.

En 2011, alors qu’il est « nominé » aux Césars pour son rôle dans « Des hommes et des dieux », Michael Lonsdale explique au JDD pourquoi il croit et ce qu’il aimerait voir changer dans le catholicisme.

Un récent sondage montre que moins de 4% des Français croient en Dieu, cela vous étonne?
– Il y a une forme d’Eglise qui est beaucoup trop surannée, cela ne peut plus durer, il faut que cela bouge. La médiocrité « bondieusarde » réduit le Christ à une espèce d’obligation sévère. On parlait encore il n’y a pas si longtemps du tribunal de Dieu. C’est effroyable. Il faut par ailleurs arrêter avec tous ces déguisements de cardinaux, d’évêques, ce faste qui impose une représentation riche de Dieu, ce qui est contraire à son message. Il faut évincer tous ces signes extérieurs.
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Vous entendez-vous avec tous les catholiques?
– Non, j’ai été approché par les intégristes, ceux de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, les fanatiques. C’est une folie de vouloir retourner à une messe quasi médiévale, en latin. Le prêtre est avec nous, avec les fidèles, il ne doit pas être tout seul sur son autel à faire sa petite cuisine. Et puis avec leurs soutanes noires ils sont tristes comme des corbeaux! Ces traditionalistes ont peur de l’inconnu, du changement. Prenez le Christ, lui, il a tout chamboulé dans la religion juive!

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Comment avez-vous vécu les scandales de pédophilie qui ont éclaboussé l’Eglise catholique?
– On a étouffé tout cela pendant des années, c’est scandaleux. Benoît XVI a commencé à faire le nettoyage. Ce n’est pas la première fois que l’Eglise est déshonorée. J’espère que l’on va autoriser le mariage des prêtres un jour, il y aura moins de misère chez eux. Le tempérament humain est trop fort pour accepter cette vie-là sans que cela pose problème, que cela crée des déviances fâcheuses. Les apôtres étaient mariés, les prêtres l’étaient aussi jusqu’au XIe siècle. Ce n’est pas encore pour aujourd’hui, peut-être avec le prochain pape, plus moderne, plus jeune. Benoît XVI n’a pas envie que cela change de son vivant.
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www.lejdd.fr/Culture/Cinema/Michael-Lonsdale-se-confie-au-JDD-sur-le-role-de-la-foi-dans-sa-vie-de-tous-les-jours…

En mars 2013, au lendemain de l’élection de François, il confie au Parisien son enthousiasme pour le nouveau Pape:

Le comédien Michael Lonsdale, qui a récemment publié un recueil de prières « Et ma bouche dira ta louange », est « émerveillé » par le pape François. « C’est un pape moderne, qui parle des choses nécessaires, de la pauvreté. Je suis très content de son élection », souligne l’acteur de 82 ans. « Benoît XVI était un homme de bonne volonté, mais il était plus âgé et davantage dans la réflexion », note le comédien qui reste marqué par le début du pontificat de François. « Dès qu’il est apparu au balcon, il a parlé de tendresse. Ça devait bien être la première fois que ce mot était prononcé à cet endroit. » Michael Lonsdale apprécie surtout la simplicité du souverain pontife. « C’est un homme qui vit modestement, loin du faste qui accompagne souvent cette fonction. »
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www.leparisien.fr/archives/pourquoi-ils-aiment-ce-pape…

En 2017, toujours dans le JDD, il est interviewé à l’occasion de la sortie d’un livre sur Charles Péguy dont il est l’auteur « Entre Ciel et terre, Péguy ».
Je regrette de dire que ses réponses sont un concentré de lieux communs politiquement corrects (je n’exclus pas qu’il ait pu être trahi par la transcription de ses propos)
Extraits:

Michael Lonsdale est de ces chrétiens qui ne supportent pas les traditionalismes, qui prônent une Église ouverte sur le monde, c’est pourquoi il s’enthousiasme pour le pape François. Pour lui déjà, l’Église était trop souvent repliée sur elle-même, recroquevillée. Péguy, comme le pape François d’ailleurs, refuse les catholiques qui mettent une barrière stérile entre l’Église et le monde, ce besoin d’ouvrir l’Église au monde est un appel urgent et pressant, une Église servante et pauvre, comme disait Congar…

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C’est exactement la vision partagée par le pape François…
– Oui, François est formidable, parce qu’il s’attaque de façon frontale à l’argent, au matérialisme, aux dérives de la société de consommation. Il souhaite une Église pauvre parmi les pauvres. Le Christ a dit : « Je suis venu pour les pauvres et les prostituées… » Quand je l’ai entendu le jour de son élection prononcer ses premières paroles : « Priez pour moi », j’ai compris à qui nous avions affaire, c’est la première fois qu’un pape dit cela. Je ne connaissais pas ce Bergoglio, il est tombé du ciel. François est un cadeau pour l’Église. Puis il est devenu François, comme François d’Assise. Saint François est celui qui s’est le plus rapproché du Christ, c’est vraiment un signe de modestie.
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Quels sont les temps forts de ce début de pontificat?
– Je ne connais pas toutes les paroles et homélies du pape, mais pour moi tout a commencé quand il est apparu à la fenêtre place Saint-Pierre. On a découvert un pape venu du bout du monde, sa voix m’a touché, et je me suis dit : ça y est, on passe à autre chose, quelque chose de très simple et de très pauvre… Je l’attendais depuis longtemps. Son absence de solennité m’a tout de suite plu.
Mais je ne cherche pas à le comparer avec les autres papes, chaque pape a sa personnalité, son temps, sa façon d’être.
Puis, lors de son premier déplacement, il s’est rendu à Lampedusa. Il va là où l’on ne s’attend pas à voir un pape, là où il y a de la misère, de la tragédie. Il est tout de suite concerné. C’est très enthousiasmant. La présence du pape sur cette île sicilienne où il y a tant de naufrages de clandestins revêt une dimension essentielle. Cela veut dire que l’Église est solidaire de ces gens qui ont fui dans la désolation et la peur pour sauver leur vie : il faut entendre ces cris. Il faut retrouver le partage et l’amour du prochain.
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Le pape n’est pas tendre envers le clergé…
– François veut faire sortir l’Église de son image surannée. Il faut arrêter avec les apparats et les déguisements des évêques, tout ce faste qui impose une représentation riche de Dieu, François veut en finir avec tous ces signes extérieurs de richesse. Il a déjà rectifié le tir en écartant par exemple cet évêque allemand qui s’était fait construire un palais avec une baignoire en marbre de 15.000 euros… J’ai souvent dit aux évêques qu’il était temps d’arrêter les mitres et les beaux costumes ; cela valait du temps où il fallait impressionner les foules, mais l’Église n’a pas besoin de se donner ainsi en représentation : ce n’est ni du théâtre ni du spectacle.

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Un pape qui tweete, cela vous plaît?
– Oui il a raison, il est vraiment moderne, en accord avec l’époque.

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Le pape est-il un révolutionnaire?
– Non, cela me gêne, la révolution c’est pour abattre quelque chose, le pape François n’est pas un guerrier, ou alors sa guerre à lui c’est l’amour.

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Benoît XVI aussi a quelque part bouleversé l’Église en renonçant…
– Benoît XVI a bien fait, il y avait tellement de secousses au Vatican, et tous ces scandales de pédophilie. On a étouffé cela pendant des années, c’est honteux. Benoît XVI avait commencé à faire le nettoyage. Mais il ne tenait plus physiquement. C’est un homme avant d’être un pape. François a dit tout récemment qu’il se donnait le droit de renoncer, cela me semble normal, quelle responsabilité vous vous rendez compte!

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www.lejdd.fr/Societe/Michael-Lonsdale-temoigne-de-son-admiration-pour-le-pape-Francois-est-un-cadeau-pour-l-Eglise-682086

Enfin, je ne peux pas ne pas terminer par un souvenir personnel, que j’ai déjà raconté ici.
Le 15 septembre 2009, de retour chez moi, après un week-end intense à Paris où j’avais eu le bonheur d’être parmi les centaines de milliers de Français venus assister à la messe célébré par Benoît XVI sur l’Esplanade des Invalides, voici ce que j’écrivais;

Avant de trier mes propres photos [pour mon site], j’ai recherché sur le site de Yahoo celles qui me paraissaient les plus significatives.
Je retiens particulièrement celles avec les bébés, pour une raison très simple.
Les gens qui consultent régulièrement ces pages savent comment il se comporte avec les petits, mettant réellement en application, et sans affectation, les paroles du Christ.
Mais les arguments de ceux qui le prétendent froid ont besoin de s’appuyer sur des mensonges, destinés évidemment à formater l’opinion..
Illustration: le comédien Michael Lonsdale, ayant la réputation de « catholique fervent » était parmi les invités qui ont eu le privilège de l’écouter au couvent des Bernardins.
Invité à décrire son expérience sur une station de radio périphérique, il s’en est plutôt pas mal tiré, refusant le piège de la comparaison avec Jean-paul II dans lequel il sentait qu’on voulait l’attirer. Pour expliquer ce qu’il percevait comme différence de personnalité, il a fini par lâcher, en substance: tout le monde n’est pas capable de prendre des bébés dans ses bras, et de les embrasser. Jean-Paul II le faisait, mais lui, je ne l’imagine pas en train de le faire…

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Eh bien si, justement, non seulement il en est capable, mais il le fait (*), et il l’a toujours fait, et il le faisait déjà quand il était cardinal.
Dommage que Michael Lonsdale ne me lise pas!
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beatriceweb.eu/BenoitEnFrance

(* )Très nombreuses photos sur ce site, par exemple: benoit-et-moi.fr/2014-II/benoit/benoit-xvi-et-les-enfants...

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