Ce quatrième volet de l’enquête de José Antonio Ureta et Frederico Abranches Viotti analyse, documents précis à l’appui, la catastrophe économique, certes limitée par les aides accordées par les gouvernements mais qui a créé de fait une situation explosive en termes d’impact social. Et surtout, il dessine les contours cauchemardesques « du monde d’après », imaginant – sans grand effort, à vrai dire – que les mesures prises aujourd’hui à la faveur du covid pourront être appliquées à la prétendue « urgence écologique », ou toute autre urgence décrétée. Bref, bienvenue dans le socialisme du XXIe siècle.

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IV/ La récession économique et les plans pour le Great Reset

(José Antonio Ureta et Frederico Abranches Viotti)

En avril 2020, l’Institut Plinio Corrêa de Oliveira a prédit un impact économique désastreux à la suite des confinements et a cité le cas de l’Italie en particulier.
En réalité, la contraction de l’économie mondiale, le nombre de faillites d’entreprises et l’augmentation du chômage ont été, du moins pour le moment, nettement moins importants qu’annoncés initialement. Mais tout cela est le résultat des aides pharaoniques accordées par les gouvernements, qui n’ont pas tenu compte de l’explosion de la dette publique. Une situation extrêmement précaire qui peut brutalement s’aggraver, en raison de la prolongation de la récession, de l’explosion d’une bulle financière, de la hausse des taux d’intérêt sur la dette, ou simplement de la méfiance des marchés, provoquant l’effondrement du fragile château de cartes de l’économie actuelle.

Le fait de contenir la dépression a empêché l’explosion des bouleversements sociaux, car les personnes les plus touchées reçoivent encore une aide d’urgence et, surtout, s’inquiètent de leur survie au quotidien. Mais la situation peut s’aggraver – comme l’a reconnu Jacques Attali, conseiller de tous les présidents français de Mitterrand à Macron, dans une récente interview au quotidien Clarín de Buenos Aires : « Ce qui m’inquiète le plus, c’est que l’humanité n’a pas encore compris que la crise à venir sera très, très profonde en termes de récession, de chômage et de misère » [64].

En revanche, l’impact social n’a pu être évité dans les pays pauvres. S’appuyant sur un rapport de l’Organisation internationale du travail, le document de l’Ipco prévoyait une perte globale de 6,7 % du temps de travail, soit l’équivalent de la journée complète de 195 millions de travailleurs, ce qui signifiait un nombre beaucoup plus important de chômeurs, puisque beaucoup d’entre eux travaillaient à temps partiel. La réalité était bien pire : 8,8 % du temps de travail global a été perdu, ce qui équivaut à 255 millions d’emplois à temps plein. Cela s’est traduit par une baisse de 8,3 % du revenu global du travail, partiellement compensée par les aides publiques. Malgré tout, selon une étude récente de la Banque mondiale [65], en 2020, entre 119 et 124 millions de personnes sont tombées dans l’extrême pauvreté ou ont été empêchées d’en sortir par la crise mondiale (au cours des deux dernières décennies, 54 millions de personnes étaient sorties de la pauvreté chaque année). L’augmentation exponentielle de la pauvreté dans les pays pauvres a, en fait, conduit à l’aggravation attendue de la faim aiguë et des décès dus à la malnutrition dans les zones les plus démunies de la planète.

Ce que l’Ipco ne pouvait pas prévoir, c’est que les principaux représentants du macro-capitalisme mondialisé profiteraient de la situation économico-financière précaire pour proposer une grande remise à zéro (qu’ils appellent « Great Reset ») visant à transformer radicalement le système économique capitaliste actuel, fondé sur la propriété privée et la libre entreprise.

Lors de l’édition 2019 du Forum économique mondial, à Davos, la militante écologiste Greta Thunberg a ouvert la piste sur laquelle les hommes d’affaires allaient skier :  » Je ne veux pas que vous espériez, je veux vous voir paniquer  » [66]. C’est au tour du président fondateur du Forum, le Dr Klaus Schwab, de réaliser le souhait de la jeune militante : « La pandémie représente une fenêtre d’opportunité rare et étroite pour réfléchir, réimaginer et tout réinitialiser et créer un avenir plus sain, plus juste et plus prospère » [67]. De jolis mots en apparence, mais qui cachent l’énorme changement social en cours qui a été baptisé « nouvelle normalité » et « Great Reset ».

Une fenêtre d’opportunité qu’ils entendent exploiter sans tarder et efficacement, comme le préconise Jacques Attali dans son interview à Clarín :

« Ce qui m’a le plus surpris, c’est que, presque du jour au lendemain, plus de 2,5 milliards de personnes ont commencé à travailler à distance. Cela montre que l’humanité, sous pression, peut changer très rapidement » [68].

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https://www.clarin.com/opinion/jacques-attali-crisis-avecina-profunda-terminos-recesion-desempleo-miseria-_0_2F3acamEi.html
Ida Auken

Pour avoir une meilleure idée de ce à quoi pourrait ressembler l’avenir du monde après la grande réinitialisation imaginée par Thunberg, Schwab & Co, il suffit de citer quelques passages d’un article publié sur le site WeForum, l’une des plateformes de débat du Forum économique mondial. Son auteur, Ida Auken, ancienne ministre danoise de l’environnement et actuelle députée sociale-démocrate, sous le titre « Voici comment la vie pourrait changer dans ma ville d’ici 2030« , commence par souligner que ses propos ne doivent pas être interprétés comme « un rêve, une utopie » : « C’est un scénario qui montre où nous sommes dirigés ».
Il s’agit d’un futur écologique, communiste et robotique, où tout est contrôlé par des caméras, à la chinoise:

Bienvenue en 2030. Bienvenue dans ma ville, ou devrais-je dire « notre ville ». Je ne possède rien. Je n’ai pas de voiture. Je ne possède pas de maison. Je ne possède pas d’appareils ménagers ni de vêtements. Cela peut vous sembler étrange, mais pour nous, dans cette ville, tout est parfaitement logique. Tout ce que vous considériez comme un produit est désormais devenu un service. Nous avons accès aux transports, au logement, à la nourriture et à tout ce dont nous avons besoin dans notre vie quotidienne. Petit à petit, toutes ces choses sont devenues gratuites, il n’est donc pas logique que nous en ayons autant. […] Lorsque l’énergie propre est devenue gratuite, les choses ont commencé à bouger rapidement. Le prix du transport s’est effondré. Cela n’avait plus de sens pour nous de posséder une voiture, car en quelques minutes, nous pouvions appeler un véhicule à conduite autonome ou une voiture volante pour les longs trajets. […] Dans notre ville, nous ne payons pas de loyer car lorsque nous n’en avons pas besoin, quelqu’un d’autre utilise notre espace libre. Mon salon est utilisé pour des réunions de travail quand je ne suis pas là.

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https://www.weforum.org/agenda/2016/11/how-life-could-change-2030/

[…] Le shopping ? Je ne me souviens pas de ce que c’est. Pour beaucoup d’entre nous, il s’agit maintenant de choisir les choses à utiliser. Parfois je trouve ça amusant, parfois je veux que l’algorithme le fasse pour moi. Il connaît mes goûts mieux que moi. Lorsque l’IA (intelligence artificielle, ndlr) et les robots nous ont remplacés dans la plupart de nos emplois, nous avons soudainement eu le temps de bien manger, de dormir et de passer du temps avec d’autres personnes. […] Pendant un certain temps, tout s’est transformé en pur divertissement et les gens ne voulaient plus se préoccuper de questions complexes. Ce n’est que finalement que nous avons découvert comment utiliser toutes ces technologies à de meilleures fins et pas seulement pour tuer le temps.

[…] De temps en temps, je suis agacée de ne pas avoir de véritable vie privée. Je ne peux aller nulle part sans être enregistrée. Je sais que quelque part, tout ce que je fais, pense ou rêve est enregistré. J’espère juste que personne ne l’utilisera contre moi. Dans l’ensemble, c’est une bonne vie. C’est bien mieux que la route que nous suivions lorsqu’il est devenu évident que nous ne pouvions pas continuer à suivre le même schéma de croissance [69].

Les forces « progressistes » rêvent effectivement d’imposer cette dystopie au monde entier, en suivant la même méthode de peur induite par laquelle elles ont déjà imposé la dictature sanitaire. Lors d’une réunion des présidents des parlements des pays du G7, organisée par Mme Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants aux États-Unis, Sir Lindsay Hoyle, actuel président de la Chambre des communes britannique, a demandé: « Si la grande leçon de la pandémie était que la clé est d’entreprendre des actions sérieuses au moment opportun, pourquoi cela ne serait-il pas tout aussi vrai pour le changement climatique?« . Et il a ajouté : « Personne n’aurait pu imaginer que nous porterions des masques aussi facilement et que nous serions aussi accommodants » [70].

Mariana Mazzucato, professeur d’innovation économique à l’université de Londres, prévoit que « la protection de l’avenir de la civilisation nécessitera des interventions dramatiques » et que « dans un avenir proche, le monde pourrait devoir recourir à nouveau aux lockdowns, cette fois pour faire face à une urgence climatique« . Elle a ajouté : « Dans le cadre d’un ‘verrouillage climatique’, les gouvernements restreindraient l’utilisation des véhicules privés, interdiraient la consommation de viande rouge et imposeraient des mesures d’économie d’énergie extrêmes, tandis que les entreprises de combustibles fossiles devraient cesser leurs activités de forage. » Et, adoptant une position similaire à celle de Klaus Schwab, elle suggère que « pour éviter un tel scénario, nous devons remodeler nos structures économiques et rendre le capitalisme différent », en nous dirigeant vers « une transformation économique verte. » Pour ce faire, les États devraient conditionner l’octroi d’aides économiques importantes aux entreprises bénéficiaires au respect d’obligations sociales et écologiques strictes. Et « puisque les marchés ne conduiront pas seuls une révolution verte », cela « nécessitera un État entrepreneur qui innove, prend des risques et investit aux côtés du secteur privé » [71].

Bienvenue dans le socialisme du XXIe siècle qui a conduit le Venezuela à la banqueroute et six millions de citoyens à émigrer.

A suivre

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