Un livre génial (je pèse mes mots, dommage que celui-là soit si galvaudé), un récit extraordinaire et prophétique, à mi-chemin entre dystopie (mais une dystopie très, très réaliste!) et conte philosophique, qui nous alerte sur ce que nous sommes en train de vivre. A partager si possible. Je précise qu’il a été écrit en 1999, et traduit en français en 2018 (donc bien avant qu’on ne parle de covid, encore moins de vaccin et de Great Reset). C’est à travers un billet d’AM Valli, en février dernier, que je l’ai découvert. Je viens juste d’en finir la lecture, conclue en deux jours, et j’ai été scotchée. Je ne pourrais rien écrire d’aussi bien (et d’aussi fidèle) que la critique d’AMV.

Présentation de l’éditeur

Nathaniel Delaney reprend le journal The Echo fondé par sa grand-mère Anne.

Alors que des événements majeurs bouleversent le Nord de l’Amérique, Delaney voit son pays verser silencieusement de la démocratie dans le totalitarisme. Il est l’une des dernières voix des médias à tenter de dire l’entière vérité sur ce qui se passe.

Cherchant à protéger ses enfants et sauver ce qui reste de sa vie, il fait un choix qui va transformer l’avenir de chacun des membres de sa famille et de bien d’autres gens.

Tout au long de l’histoire il tient un journal d’observation, rapportant l’escalade des événements et analysant les motifs de ses opposants politiques, avec une effrayante transparence.

Tandis que son monde s’écroule, il est forcé de sonder en profondeur le sens de ses propres positions et compromis, de ses succès et de ses échecs.

Le journal de la peste raconte comme une chronique la lutte d’un homme profondément moderne éprouvé dans ses dernières ressources spirituelles et psychologiques, d’un homme qui, en se perdant, se trouve lui-même.

Ce « journal de la peste » parle de nous

(27 février 2021, ma traduction)

En fuite, avec ses enfants, accusé de meurtre, d’abus [sexuels] et d’autres méfaits. Seulement pour avoir pensé et écrit que le Nouvel Ordre Mondial et la pensée unique imposée par l’idéologie du politiquement correct emprisonnent tout le monde, nous rendant esclaves de la plus féroce des dictatures : celle qui s’impose sous forme de paternalisme, au point que les prisonniers sont amenés à remercier et même à aimer leurs geôliers.

Si en 1999, lorsqu’il a été écrit, le Journal de la Peste pouvait sembler fortement dystopique, aujourd’hui il photographie une réalité de plus en plus évidente. C’est ainsi que la traduction italienne du roman de Michael D. O’Brien, The Plague Journal, opportunément proposée par la maison d’édition Fede & Cultura, ressemble davantage à une chronique qu’à une prophétie tragique.

On pourrait objecter : mais nous n’avons pas, pas encore, d’avions et d’hélicoptères de la police qui patrouillent le ciel à la recherche de ceux qui pensent différemment. Oui, mais je ne sais pas si vous vous rappelez, lors du premier lockdown du coronavirus, l’hélicoptère de la Guardia di Finanza [les douanes] pourchassant (et tout cela en direct à la télévision) un homme surpris en train de courir, en toute solitude, sur une plage déserte. Ici, l’image de ce citoyen solitaire, poursuivi et mis en joue par les caméras de télévision parce qu’il était « coupable » d’avoir quitté la maison pour aller courir, recoupe à bien des égards celle du protagoniste du roman d’O’Brien. La différence est que dans le roman, les avions de reconnaissance tirent, mais nous savons que les balles des médias peuvent aussi faire beaucoup de mal.

Le protagoniste du journal d’O’Brien est un journaliste canadien qui, à travers son modeste journal de province, mène son courageux combat contre la pensée unique, et devient pour cette raison un réprouvé, un dangereux provocateur à discréditer et à éliminer. Sa « faute » ? Très simple : croire en la famille traditionnelle, dire non à l’avortement et à l’euthanasie, affirmer que la vérité existe, qu’il n’est pas vrai que la seule vérité est le relativisme, distinguer le bien et le mal dans un sens objectif et refuser de dire que ce qui est objectivement bon est mauvais et vice versa.

Nathaniel Delaney, le journaliste à contre-courant, aura pour allié dans cette bataille une famille de pauvres réfugiés vietnamiens, qui lui donnera refuge dans leur improbable maison-péniche sur les rives d’un lac gelé. Une famille catholique, aussi catholique que l’est Delaney. Ce qui préfigure cette église des catacombes dont nous parlons parfois, en imaginant quel pourrait être le sort de tous les catholiques qui ne veulent pas céder à la dictature mondialiste.

Lorsque les machines du journal The Echo sont détruites lors d’une attaque et qu’une campagne de diffamation est lancée contre le rédacteur en chef, Nathaniel (que ses amis vietnamiens appellent Natano) n’a d’autre choix que de fuir dans les neiges de sa région. Avec lui, ses deux enfants Tyler et Zöe et un adolescent que la famille Thu, avec une extrême générosité, met à la disposition des fugitifs.

Le roman d’O’Brien offre une série infinie de points de réflexion sur ce que nous vivons aujourd’hui. La foi de la famille vietnamienne pauvre et très croyante est émouvante, le rôle des grands-parents est déterminant, car ce sont des présences bénéfiques qui assurent le lien avec la tradition. Dure et désespérée, la confrontation entre Nathaniel et son père, un homme qui s’est totalement abandonné à l’idéologie dominante et qui non seulement ne voit pas ses dangers, mais croit que cette idéologie a créé le meilleur monde possible.

Le Canada raconté par O’Brien est un pays d’âmes mortes dont l’identité intérieure a été subvertie. « Là-bas, ils te tuent, mais ici, ils tuent ton cœur. Vous êtes déjà morts, vous êtes un peuple mort », dit un réfugié de l’ex-Union soviétique. Des mots qui décrivent non seulement la réalité imaginaire dessinée dans le livre, mais aussi, désormais, notre réalité. Et comment peut-on vérifier le fait que nous sommes morts ? Par l’absence, dit O’Brien à travers Nathaniel, de quatre éléments : l’art, la littérature, la prière et l’amour.

Ce n’est pas un hasard si l’aide, pour les fugitifs, en plus de la famille catholique vietnamienne, viendra d’un grand-père de sang indien et d’un mystérieux prêtre catholique qui s’habille encore en prêtre. Couper les racines, c’est ce que la dictature veut faire parce que c’est seulement de cette façon qu’elle peut imposer sa propre réalité idéologique, en la substituant à la réalité effective, c’est seulement de cette façon qu’elle peut appeler bien ce qui est mal et mal ce qui est bien.

Rendus sourds et aveugles par une propagande incessante qui se fait passer pour de l’information libre, les habitants de ce Canada riche mais sans âme sont éduqués, voire cultivés, mais ils ont été dépouillés de leur humanité. Et celui qui ose le dire est cloué au pilori, car la dictature molle, qui fait de la tolérance son drapeau, ne peut tolérer ceux qui, avec l’innocence d’un enfant, proclament apertis verbis que le roi est nu et aussi qu’il est mauvais.
En lisant le roman, on pense au livre de Tocqueville « De La démocratie en Amérique », qui décrit un appareil d’État qui maintient ses citoyens dans un état d’infantilisation perpétuelle, afin de leur épargner l’effort de penser. On pense également au « Discours sur la servitude volontaire » d’Étienne de La Boétie, notamment lorsque le penseur français écrit : « C’est le peuple qui se soumet, qui s’égorge et qui, ayant le choix entre être serviteur et être libre, quitte la liberté et prend le joug ; qui consent à son mal, ou plutôt le poursuit ». Et on ne peut s’empêcher de penser au « Meilleur des Mondes » d’Aldous Huxley, ce Nouveau Monde dans lequel l’État totalitaire n’a pas besoin de la force des matraques parce qu’il a formé une population d’esclaves qui aiment leur esclavage.

Père attentionné et aimant, Nathaniel (qui a été quitté par sa femme, une femme incapable d’ouvrir les yeux et de supporter le fardeau d’une vie non alignée parce qu’elle est « totalement imprégnée de toutes les perceptions déformées que notre siècle a pu produire ») raconte à ses enfants des contes de fées sur les dragons, expliquant que les dragons sont maléfiques et qu’il ne faut pas croire ceux qui disent que, au nom de l’inclusion, même les dragons ont leurs droits. Le mal existe. Le mal doit être reconnu et combattu avec courage. Parce que la vérité existe.

Nous ne dirons pas comment se termine le roman. Nous dirons seulement que Nathaniel, lors de sa fuite, porte dans son sac à dos la croix celtique qui appartenait à son grand-père d’origine irlandaise. Et nous terminerons par les mots que le mystérieux prêtre catholique adresse au fugitif : « N’aies pas peur. Tu ne seras pas seul ».

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