Quelle force et quel courage extraordinaires, encore, chez ce vieil homme de 94 ans! Une réflexion puissante qui risque de lui attitrer les foudres de la bien-pensance actuelle. Anticipation de l’ouvrage “La vera Europa. Identità e Missione” fraîchement sorti des presses de l’éditeur Cantagalli (cf. Le dernier appel de Benoît XVI à l’Europe: heureusement qu’il est là). Le plus incroyable, c’est que François préface le livre et prétend en faire siennes les idées, alors que tout ce qu’il dit et fait en est l’antithèse frontale! Nous y reviendrons.
- Voir aussi: Loi bioéthique: relire Benoît XVI
Rendre justice devant Dieu de la tâche qui nous a été confiée pour l’homme
par Sa Sainteté Benoît XVI
(ma traduction)
Avec la légalisation du « mariage homosexuel » dans seize États européens, la question du mariage et de la famille a pris une nouvelle dimension qui ne peut être ignorée. Nous sommes témoins d’une distorsion de la conscience qui a manifestement pénétré profondément dans certains secteurs de la population catholique. Nous ne pouvons pas répondre à cela par un peu de moralisme ou même des références exégétiques. Le problème est profond et doit donc être abordé en termes de fond.
Tout d’abord, je pense qu’il est important de noter que le concept de « mariage homosexuel » est en contradiction avec toutes les cultures de l’humanité qui se sont succédé jusqu’à présent, et signifie donc une révolution culturelle qui s’oppose à toute la tradition de l’humanité jusqu’à aujourd’hui. Il ne fait aucun doute que la compréhension juridique et morale du mariage et de la famille diffère extraordinairement dans les cultures du monde. On peut y voir non seulement la différence entre la monogamie et la polygamie, mais aussi d’autres différences profondes. Et pourtant, la communauté de base, le fait que l’existence de l’homme – en tant que mâle et femelle – est ordonnée à la procréation, et le fait que la communauté du mâle et de la femelle et l’ouverture à la transmission de la vie déterminent l’essence de ce qu’on appelle le mariage, n’ont jamais été remis en question. La certitude fondamentale que l’être humain existe en tant que mâle et femelle ; que la transmission de la vie est une tâche assignée à l’homme ; que c’est précisément la communauté du mâle et de la femelle qui remplit cette tâche ; et que c’est là, en dehors de toute différence, l’objet essentiel du mariage – est une certitude originelle qui a été jusqu’à présent une évidence pour l’humanité.
Un bouleversement fondamental de cette certitude humaine originelle a été introduit lorsqu’avec la pilule, il est devenu possible en termes de principe de séparer fertilité et sexualité. Il ne s’agit pas d’une question de casuistique, de savoir si et quand, le cas échéant, l’utilisation de la pilule peut être moralement justifiée, mais de la nouveauté fondamentale qu’elle signifie en tant que telle : à savoir la séparation de principe entre sexualité et fertilité. Cette séparation signifie en effet que de cette manière toutes les formes de sexualité sont désormais équivalentes. Il n’y a plus de critère de base. Ce nouveau message, contenu dans l’invention de la pilule, a profondément transformé la conscience des gens, lentement d’abord, puis de plus en plus clairement.
Une deuxième étape suit : tout d’abord, si la sexualité est séparée de la fécondité, alors, à l’inverse, la fécondité peut naturellement aussi être pensée sans sexualité. Il semble donc juste de ne plus confier la procréation de l’homme à la passion occasionnelle du corps, mais de planifier et de produire l’homme rationnellement. Ce processus, par lequel les hommes ne sont plus générés et conçus mais faits, est pendant ce temps en plein essor. Mais cela signifie alors que l’homme n’est plus un don reçu, mais un produit planifié par notre action. D’autre part, ce qui peut être fabriqué peut aussi être détruit. En ce sens, la tendance croissante au suicide comme fin programmée de la vie fait partie intégrante de la tendance décrite.
De cette façon, cependant, il est clair que, en ce qui concerne la question du « mariage homosexuel », il ne s’agit pas d’être un peu plus large et plus ouvert. La question fondamentale est plutôt : qui est l’homme ? Et avec elle, la question de savoir s’il existe un Créateur ou si nous ne sommes pas tous les produits d’un processus. Cette alternative se pose : soit l’homme est la créature de Dieu, l’image de Dieu, le don de Dieu, soit l’homme est un produit que lui-même sait créer. Quand on renonce à l’idée de création, on renonce à la grandeur de l’homme, on renonce à son indisponibilité et à sa dignité, qui est au-dessus de toute planification.
Cela peut également être exprimé à partir d’une autre perspective. Le mouvement écologique a découvert les limites de ce qui peut être fait et a reconnu que la « nature » nous impose une norme que nous ne pouvons ignorer impunément. Malheureusement, l’ « écologie de l’homme » ne s’est pas encore concrétisée. L’homme aussi a une « nature » qui lui a été donnée, et la violer ou la nier conduit à l’autodestruction. C’est précisément ce dont il est question dans le cas de la création de l’homme en tant que mâle et femelle, qui est ignorée dans le postulat du « mariage homosexuel ».
Il me semble qu’il est important de réfléchir à la question selon cet ordre de « grandeur » [grandezza]. C’est seulement ainsi que nous rendrons justice devant Dieu du devoir qui nous a été confié pour l’homme.