Mgr Gänswein vient de publier un livre au titre bienvenu en ce moment précis, « Témoigner la vérité », et les manchettes des journaux insistent sur le fait qu’y figure noir sur blanc la phrase tant attendue de Benoît XVI et jamais prononcée par lui: « Il n’y a qu’un seul Pape, ET C’EST FRANÇOIS« . Elle y est effectivement, mais pas dans la bouche du Saint-Père, et au prix d’un petit tour de passe-passe qu’Antonio Socci dévoile ici, tout en restant habilement dans la suggestion. Pour comprendre, il faut se souvenir de la conférence « explosive » donnée par le secrétaire de Benoît XVI le 21 mai 2016 à l’occasion de la présentation du livre « Oltre la crisi della Chiesa » de Roberto Regoli (dossier complet sur ce site:  Une nouvelle conception du ministère pétrinien?). Mystérieusement, le paragraphe-clé a disparu. A l’instigation (ou sur l’ordre) de qui?

Sur la renonciation et sur la papauté émérite de Benoît XVI : Mgr Georg Gänswein précise…

Le principal collaborateur de Benoît XVI, l’archevêque Georg Gänswein, a rassemblé dans le livre “Testimoniare la Verità. Come la Chiesa rinnova il mondo”, certains de ses discours publics, des textes de conférences, des interviews et des homélies.

C’est un livre riche et précieux à lire pour comprendre la grandeur de la pensée et du pontificat de Benoît XVI. Il y a aussi une « perle cachée » à la page 59.

Sous le titre « La papauté renouvelée », Mgr Gänswein publie le texte de la conférence retentissante qu’il a donnée, à l’Université Grégorienne de Rome, le 20 mai 2016, à l’occasion de la présentation du livre de Roberto Regoli « Au-delà de la crise de l’Église ».

Dans cette conférence, le secrétaire particulier de Benoît XVI a tenté d’expliciter la réflexion de Joseph Ratzinger sur la « renonciation » et le choix de la « papauté émérite ».

Le livre contient certains passages importants de la conférence : lorsqu’il définit comme « irrévocable » pour Benoît XVI « l’acceptation de la charge de Pierre en avril 2005 » ou lorsqu’il affirme que « le ministère pontifical n’est plus ce qu’il était auparavant » parce que Benoît XVI « l’a profondément et durablement transformé au cours de son pontificat d’exception ». Ou lorsqu’il affirme que l’Église « continue à n’avoir qu’un seul pape légitime ». Et pourtant, depuis trois ans, nous vivons avec deux successeurs de Pierre qui vivent parmi nous ».

PAGE MANQUANTE

Mais il manque au livre la partie la plus « explosive » de ce discours (disponible en ligne sur Acistampa), celle où Gänswein parlait du « munus petrinum »:

Avant et après sa démission, Benoît a compris et comprend sa tâche comme une participation à un tel « ministère pétrinien ». Il a quitté le trône papal et pourtant, avec la démarche du 11 février 2013, il n’a nullement abandonné ce ministère. Au contraire, il a complété la fonction personnelle par une dimension collégiale et synodale, presque un ministère en commun.

Puis il poursuivait:

Depuis l’élection de son successeur François le 13 mars 2013, il n’y a donc pas deux papes, mais de facto un ministère élargi – avec un membre actif et un membre contemplatif. C’est pourquoi Benoît XVI n’a renoncé ni à son nom ni à la soutane blanche. C’est pourquoi l’appellation correcte pour s’adresser à lui, aujourd’hui encore, est « Sainteté » ; et c’est aussi pourquoi il ne s’est pas retiré dans un monastère isolé, mais au sein du Vatican, comme s’il s’était seulement effacé pour laisser la place à son successeur et à une nouvelle étape de l’histoire de la papauté.

Dans le livre, il y a aussi une fin, qui n’apparaît pas dans Acistampa, qui parle du « ministère pétrinien étendu autour des successeurs de l’apôtre Pierre ».

PRECISION

Dans une interview ultérieure, rapportée dans le livre, Gänswein écrit « puisque j’ai déduit de nombreuses réactions que des choses m’ont été attribuées que je n’ai pas dites« , et il précise

à l’évidence, le pape François est le pape légitime, légitimement élu. Ceux qui parlent de deux Papes, l’un légitime et l’autre illégitime, ont donc tort. Ce que j’ai dit en réalité – et ce que Benoît XVI dit aussi – c’est qu’il continue à être présent dans « l’enclos de Saint-Pierre » (c’est-à-dire dans le district du Vatican) par la prière et le sacrifice, apportant des fruits spirituels à son successeur et à l’Église. C’est ce que j’ai dit. Pendant trois ans, nous avons eu deux papes vivants… il est très clair que le pape François détient la plenitudo potestatis (les pleins pouvoirs). C’est lui qui détient la succession de Pierre.

Antonio Socci

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