Benedetta de Vito est une journaliste italienne, hôte régulière du blog de Marco Tosatti et surtout admiratrice passionnée de Benoît XVI. L’article qui suit, rebondissant sur la théorie d’Andrea Cionci, de Benoît XVI, « pape empêché » et de François, pape illégitime, est un petit bijou de délicatesse et de sensibilité, mais aussi d’érudition. A savourer.

Je ne sais pas si Cionci a raison, mais mon Pape est Ratzinger

Benedetta de Vito
Via Stilum Curiae (Marco Tosatti)

Au troisième siècle, le pape Pontien, le XVIIIe pontife romain, se retrouva prisonnier en Sardaigne, peut-être en vue de Tavolara même, qui surplombe ma maison, ou peut-être sur l’île de Molara, juste au sud. C’est là, au milieu des vagues et des eaux bleues, se déclarant en « siège empêché », qu’il transmit l’Anneau du Pêcheur à celui qui lui succéda pendant deux mois seulement, Saint Anterus, un Calabrais d’origine grecque. Saint Pontien, comme je l’ai déjà écrit, mourut de privations et de mauvais traitements en Sardaigne, et c’est Saint Fabien, le successeur d’Antérus sur le trône papal, qui ramena la dépouille de Saint Pontien à Rome, où il fut enterré dans les catacombes de Saint Callistus. Aujourd’hui, il repose, avec de nombreux autres martyrs, dans la magnifique église de Sainte Praxède (Santa Prassede) [à l’intérieur de la ville de Rome], transférée là par le pape Pascal Ier [au IXe siècle], où je vais de temps en temps lui rendre visite. Oui, le « siège empêché » était à l’époque la Sardaigne, lointaine, une « île nuisible » pour les Romains, un endroit sauvage, rustique et indomptable. Certes, cela n’avait rien à voir avec le petit couvent où vit Benoît XVI au Vatican…

J’admets que je n’ai pas lu [le livre d’Andrea Cionci] Codice Ratzinger, et je ne suis pas qualifiée pour émettre une opinion théologique nuancée sur l’identité du pape régnant aujourd’hui, alors que j’écris ces lignes en cette veille de la fête de Notre-Dame des Douleurs. La seule chose qui parle à travers moi est le sensum fidei et l’immense amour que j’ai pour le Seigneur.

J’aime Benoît XVI : pour moi, il est et sera toujours la douce présence du Christ ici sur terre. J’aime sa tendresse, sa voix calme, son cœur plein d’amour pour Jésus. Cela me console de savoir qu’il est vivant et qu’il prie avec nous, ici dans la sombre vallée dans laquelle l’orgueilleux Bergoglio nous a jetés. Cela me soulage de regarder de temps en temps des vidéos de sa catéchèse ; cela m’émeut de le voir à Munich, sur la Marienplatz, chantant les hymnes bavarois sous un ciel bleu clair. … Pour moi, pour mon cœur, il est le seul Pape et Pasteur, et parfois je l’appelle, quand je suis seul et que personne d’autre n’écoute, « Benny » …

Et je l’ai aimé bien avant qu’il ne devienne pape, grâce aux histoires que me racontait presque tous les après-midi Arcangelo Paglialunga, le vaticaniste du quotidien italien Il Gazzettino, qui était un ami proche du futur pape, sur le cardinal Ratzinger. Tous deux aimaient la musique. Paglialunga, qui écrivait ses articles sur une machine à écrire antédiluvienne (bien après l’invention de l’ordinateur), était non seulement un vaticaniste mais aussi un romaniste, dans le sens où il écrivait pour une revue consacrée à tout ce qui était romain, Romanaccia. Il était dévoué à sa foi et à sa femme Caterina ; il parlait toujours avec une profonde sympathie et une grande estime du cardinal Ratzinger. Je les voyais, ensemble, dans mon imagination, marchant côte à côte sur la place Saint-Pierre, parlant de Bach et de Buxtehude, avec la brise d’Elie dans l’air, remplie des notes sublimes des deux grands musiciens allemands (si vous n’avez jamais entendu le « Membra Jesu Nostri » de Buxtehude, je vous conseille de l’écouter au plus vite). Il était un « Archange » de nom [Arcangelo, ndt] et de fait. Il était expert en chant grégorien, et il m’a raconté une de ses années les plus formidables, où il n’avait assisté qu’à des messes avec du chant grégorien. J’ai senti mon cœur se soulever. Oh, comme j’aurais aimé faire cela moi-même ! Lorsque j’ai appris que le cardinal Ratzinger serait le successeur de Jean-Paul II, j’ai écrit un courriel à une amie australienne, qui est en fait mon ancienne nounou, qui m’a vu grandir et m’a appris à parler anglais comme une mère apprend à sa fille. Le reste appartient à l’histoire…

J’ai l’honneur suprême d’avoir reçu cinq lettres de « mon » Benny, même si elles étaient signées par son secrétaire. Dans l’une, il évoque notre ami commun Arcangelo, qui, je le crois et l’espère, veille sur nous depuis le Ciel. Le contenu des autres lettres me tient à cœur et est gardé dans le secret de mon âme, qui brûle d’amour pour le Seigneur et sourit toujours à la moindre pensée de Benoît XVI.

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