L’ancien président de la République tchèque, qui a toujours affiché son respect, son admiration et son amitié pour le saint-Père (on se souvient de la visite triomphale de Benoît XVI en 2008, dans un pays pourtant largement non-catholique, cf. benoit-et-moi.fr/2009), était présent aux obsèques, et il les compare à toutes les autres auxquelles il a assistées. Sur le ton modéré qu’impose la diplomatie, il n’en dit pas moins sa surprise devant la frugalité extrême de la célébration. Les progressistes ne vont quand même l’accuser de faire partie du « clan » anti-Bergoglio!!!

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Vaklav Klaus

Pour moi, et certainement pour beaucoup d’autres d’entre nous, l’événement le plus marquant de cette semaine a été les funérailles du pape Benoît XVI, jeudi à Rome.

Immédiatement après l’annonce de sa mort, j’ai décrit son décès comme une grande perte. J’ai ajouté qu’il était « le dernier des grands hommes du XXe siècle qui se sont battus pour les bonnes vieilles valeurs » et qu’il était pour moi « le principal symbole de la lutte entre le monde normal et le progressisme moderne ». J’ai également dit que cela « marque la fin d’une étape dans l’évolution de la société humaine ».

J’ai eu l’honneur d’assister à ses funérailles à Rome. Les funérailles de Benoît XVI, un grand pape, un grand théologien, un grand administrateur de l’Église, qui ont eu lieu sur la place Saint-Pierre le 5 janvier 2023, étaient particulières. Je ne suis pas un expert des tenants et aboutissants des funérailles des papes, ni de ce qu’il faut ou ne faut pas faire, de ce que l’on doit ou ne doit pas faire, de ce que l’on peut ou ne peut pas faire lors de telles funérailles, mais j’ai eu le sentiment pendant ces funérailles – dans le froid inattendu de janvier à Rome – que Benoît XVI n’a pas eu droit à toute la pompe.

On n’a pas dit un mot sur lui, si ce n’est des généralités. Il n’y avait aucun portrait ou photographie de lui nulle part (du moins depuis mon siège VIP, mais il n’y avait rien dans la cathédrale Saint-Pierre ou à Rome). Il y avait un silence étrange, je n’ose pas dire un silence sacré. Je ne me souviens pas du tout que les cloches de Saint-Pierre aient sonné. Il y avait – sans aucun rapport avec ce qui se passait – les applaudissements timides d’une poignée de pèlerins. Il y a eu des applaudissements polis de la tribune VIP des politiciens lorsque le cercueil est passé devant eux. Je dirais que c’était une messe « normale ». Mais je dois dire que je ne suis certainement pas allé à Rome pour cela.

Se pourrait-il que le Vatican d’aujourd’hui ne l’ait pas aimé ? Ou pas seulement le Vatican, mais l’Église catholique d’aujourd’hui, qui – contrairement au pape Benoît – ne veut pas se mettre à dos le monde d’aujourd’hui, même si cela est tellement contraire à l’enseignement millénaire de l’Église ? Le Pape Benoît (et l’après-Pape Benoît) n’était-il pas la mauvaise conscience de l’Eglise d’aujourd’hui ? Les gens m’écrivent qu’il n’y a pas de livre de condoléances dans leur église, pas d’intercessions nulle part. L’Église aurait-elle été mécontente que Benoît XVI soit devenu le symbole d’une époque révolue – à l’exception de la reine d’Angleterre – même dans le monde non ecclésiastique ? Et qu’il ait vivement protesté contre sa fin ? Pourquoi n’entendons-nous pas la même voix d’avertissement de la part d’autres dirigeants de l’Église ? Je ne suis pas appelé à juger, mais c’est triste.

Ce voyage m’a rappelé que je me trouvais au même endroit en avril 2005, pour les funérailles du pape Jean-Paul II, mais que ces funérailles étaient bien différentes. Lui aussi était un symbole de la fin d’une époque, un symbole de la fin du communisme, à la chute duquel le pape polonais a largement contribué.

Ce sont là quelques-uns de mes voyages aux funérailles de grandes figures de l’histoire mondiale. J’étais à Londres pour les funérailles de Margaret Thatcher et à Washington pour celles de Ronald Reagan. J’étais à Jérusalem pour les funérailles extrêmement impressionnantes du Premier ministre israélien Yitzhak Rabin, qui a été assassiné par un sioniste radical (c’est-à-dire pas un terroriste palestinien). J’ai assisté aux funérailles du roi saoudien Faisal Saud à Riyad. Ces funérailles ont eu la particularité inattendue pour moi que les infidèles (selon l’Islam), bien qu’invités aux funérailles, n’ont pas été autorisés à assister aux funérailles, mais seulement à féliciter le nouveau roi.

J’ai assisté aux funérailles extrêmement tristes du président polonais Kaczyński, qui était très proche de moi, à Cracovie. Ces funérailles étaient particulières, car aucun avion ne survolait l’Europe à cause du volcan islandais en activité. Il y avait donc très peu d’invités du monde entier, et notre délégation est arrivée en train. J’ai assisté aux funérailles du président Trajkovski de Macédoine, dont l’avion s’est écrasé dans une montagne près de Skopje peu après le décollage. J’ai assisté aux funérailles du premier Premier ministre hongrois de l’après-guerre froide, József Antall, et je me suis assis à côté du Premier ministre Thatcher (et nous aurions pu geler) pendant trois heures à la mi-décembre sur la place du Parlement de Budapest. J’ai également assisté aux funérailles du président slovaque Kovacs, du président autrichien Klestil et des présidents allemands Weizsäcker et Rau. J’espère n’avoir oublié personne.

Chacun d’entre eux a marqué l’histoire, chacun d’entre eux a laissé son empreinte. Celle laissée par le pape Benoît XVI ne doit pas être oubliée. Cependant, elle semble être, à l’heure actuelle, la plus menacée.

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