Le frère dominicain, qui fut supérieur de l’Ordre de 1992 à 2001, mais dont la réputation mondiale est surtout due à la quantité d’écrits, traduits dans de nombreuses langues, en claire opposition à la doctrine catholique (notamment sur le thème de l’homosexualité mais aussi sur d’autres sujets chauds, comme la communion aux divorcés remariés, le rôle des femmes, etc.), doit, à la demande du pape, diriger la retraite de prière en préparation à l’assemblée du Synode des évêques qui se tiendra au Vatican du 1er au 3 octobre 2023. (cf. ilsismografo.blogspot.com/2023/01/vaticano-pope-asks-fr-timothy-radcliffe).

En 2015 , François l’avait nommé consulteur au Conseil pontifical Justice et Paix, et j’écrivais à l’époque:

Quiconque a fréquenté le rayon « religions » (ou « spiritualité », car l’autre mot est passé de mode) d’une grande surface culturelle, connaît au moins le nom de Timothy Radcliffe, édité en France aux éditions du Cerf.

La Croix le présentait en ces termes:

Pédagogue hors pair, auteur de nombreux livres de réflexion et de spiritualité accessibles au grand public….

Sur l’autre bord, Rorate Caeli notait:

Radcliffe n’est pas le seul dominicain libéral et dissident qui a le vent en poupe en ce moment. Sa nomination vient quatre jours seulement après que le Père Gustavo Gutierrez ait été la vedette d’une conférence de presse au Vatican.

En tenant compte que cela remonte à presque 8 ans, je crois intéressant de relire l’article publié alors sur le site américain liberal « Crux », dans la traduction de mon ami Anna:


UN RÔLE AU VATICAN POUR TIMOTHY RADCLIFFE, PRÉDICATEUR ET ÉCRIVAIN CONTROVERSÉ.


Un prédicateur et écrivain de renommée internationale, connu pour repousser les limites de l’orthodoxie catholique, et allié solide du pape François, a eu samedi dernier une promotion par le Saint Siège.
En un geste qui va faire sourciller la garde traditionnelle de l’Église, le Pape François a nommé le Révérend Timothy Radcliffe consultant du Conseil Pontifical pour la Justice et la Paix, a annoncé le Vatican samedi.

Radcliffe, qui est né en Angleterre et a été à la tête de l’Ordre Dominicain pendant presque une décennie dans les années 90, dirige à présent un centre d’étude sur la justice sociale à Oxford et a contesté à plusieurs reprises les mentalités catholiques à l’égard des femmes, des gays et lesbiennes, et des divorcés.

L’année dernière il a été au centre d’une polémique au sujet de l’invitation à intervenir à la Conférence Internationale sur la Divine Miséricorde, le plus important rassemblement catholique en Irlande. La chaine de télévision américaine EWTN a annulé son projet de couvrir l’événement (cf. www.independent.ie/irish-news/), à cause de la participation de Radcliffe. Un des hôtes de la station a décrit les opinions de Radcliffe comme « s’écartant sensiblement de la doctrine catholique ».

Selon The Tablet, la querelle avait été provoquée par les commentaires faits par Radcliffe en 2013 au sujet de l’homosexualité, dans lesquels il affirmait:

« Elle peut être sans doute généreuse, vulnérable, tendre, réciproque et non-violente. À bien des égards, je pense donc qu’elle exprime le don de soi du Christ« ,

Il s’était déclaré surpris que ses opinions aient suscité une telle agitation, affirmant qu’elles étaient « en profonde résonance avec l’enseignement du Pape François. »,

Et toutefois, il a publiquement soutenu l’opposition de l’Église aux mariages du même sexe, bien que pour des raisons qui ne sont pas celles habituelles des responsables de l’Église.
Radcliffe a par exemple écrit dans un article de décembre 2012 sur le Guardian:

« Il est réconfortant de voir la vague de soutiens pour les mariages gays. Cela révèle une société qui aspire à une tolérance ouverte envers toutes sortes de personnes, un désir de vivre tous ensemble dans une acceptation réciproque« .


Toutefois, a-t-il dit, la notion hétérosexuelle de mariage ne devrait pas être imposée aux couple gays, bien que les différences devraient être acceptées.

La tolérance, selon lui,

« implique l’attention à la particularité de l’autre, le fait de savourer combien il ou elle est différent de moi, dans sa foi, son ethnicité, son orientation sexuelle. Une société qui fuit les différences et prétend que nous somme tous égaux, peut avoir proscrit l’intolérance dans une forme, et l’avoir instituée en d’autres. »

En tant que consultant du Conseil Pontifical pour la Justice et la Paix, Radcliffe est l’une des quelque 40 personnes au monde qui, d’après le Vatican aident à « tracer les lignes générales de l’action du Conseil, selon leur sensibilité et leurs engagements professionnels et pastoraux ».

Il est auteur de plus d’une demi-douzaine de livres et un orateur prisé au niveau international. Son livre « What is the point of Being a Christian? » (Pourquoi donc être chrétien?, éd. du Cerf, 2005) a obtenu en 2007 le prix Michael Ramsey qui est décerné par l’Archevêque anglican de Canterbury à « l’écrit de théologie contemporaine le plus prometteur de l’Église globale« .

Radcliffe, qui a été ordonné en 1971, est aussi promoteur de l’ouverture de la communion aux catholiques divorcés et remariés, sujet brûlant parmi les évêques qui participent au Synode sur la Famille.
Dans un essai paru en 2013 sur le magazine America, Radcliffe a écrit qu’il nourrit

« deux profonds espoirs. Qu’une voie soit trouvée pour admettre à la communion les divorcés remariés. Et, le plus important, que soit donnée aux femmes une véritable autorité et voix au sein de l’Église. Le Pape a exprimé son désir que cela se produise, mais quelle forme concrète cela peut-il prendre?« 

Au sujet du rôle des femmes dans l’Église il est dans la même ligne que le Pape François, qui a dit non à l’ordination des femmes mais qui veut néanmoins que les femmes aient des positions d’autorité. Radcliffe déplore ce qu’il considère comme une plus forte fusion entre l’ordination et les postes décisionnels dans l’Église.

Dans une interview de 2010 à US Catholic, il affirmait.

« Je pense que la question de l’ordination des femmes est devenue plus grave à présent parce que l’Église est devenue plus cléricale par rapport à ce qu’elle était dans mon enfance »


Radcliffe réclame une Eglise plus ouverte, suivant l’affirmation du Pape François que l’Église doit « mettre partout la pagaille » (make a mess of things). En 2013, dans une interview, il déclarait

« Jésus a donné une large hospitalité, a mangé et bu avec toute sorte de personnes. Nous devons incarner son cœur ouvert, plutôt que de nous retirer dans un ghetto catholique »

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