Ecole Ratzinger – Avec les « valeurs non négociables », c’est l’une des formules les plus célèbres de Benoît XVI. Il l’a prononcée le 18 avril 2005 en tant que doyen du collège cardinalice, devant ses confrères cardinaux, avant d’entrer en conclave et d’en sortir comme « Pape Benoît XVI ». Après des paroles aussi « radicales », beaucoup croyaient qu’il avait sapé toutes ses chances de devenir Pape. Et au contraire…

L’on est en train de mettre sur pied une dictature du relativisme qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs.


Le cardinal Ratzinger prend comme fil rouge de son homélie les lectures du jour: le livre d’Isaïe ch 61; la Lettre de Saint Paul aux éphésiens ch4; Jean ch 15).

Il commence:

En cette heure de grande responsabilité, nous écoutons avec une attention particulière ce que le Seigneur nous dit à travers ses paroles mêmes. Des trois lectures, je ne voudrais choisir que quelques passages qui nous concernent directement dans un moment comme celui-ci.

Pour plus de facilité, je reproduis la partie la plus immédiatement accessible à nous laïcs.
Le texte complet est disponible sur le site du Vatican, rubrique « Jean-Paul II »: www.vatican.va/gpII/documents/homily-pro-eligendo-pontifice

Passons à la deuxième lecture, à la Lettre aux Ephésiens. Il s’agit ici, en substance, de trois choses:  tout d’abord des ministères et des charismes dans l’Eglise, comme dons du Seigneur ressuscité et monté au ciel; puis, de la maturation de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, comme condition et contenu de l’unité dans le Corps du Christ; et, enfin, de la participation commune à la croissance du corps du Christ, c’est-à-dire de la transformation du monde dans la communion avec le Seigneur.

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Arrêtons-nous sur deux points.

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Le premier est le chemin vers « la maturité du Christ », c’est ce que dit, en simplifiant un peu, le texte italien. Pour être plus précis, nous devrions parler, selon le texte grec, de la « mesure de la plénitude du Christ », à laquelle nous sommes appelés à arriver pour être réellement adultes dans la foi. Nous ne devrions pas rester des enfants dans la foi, dans un état de minorité. Et en quoi consiste le fait d’être des enfants dans la foi?

Saint Paul répond:  « Ainsi nous ne serons plus des enfants, nous ne nous laisserons plus ballotter et emporter à tout vent de la doctrine » (Ep 4, 14). Une description très actuelle!

Combien de vents de la doctrine avons-nous connus au cours des dernières décennies, combien de courants idéologiques, combien de modes de la pensée… La petite barque de la pensée de nombreux chrétiens a été souvent ballottée par ces vagues – jetée  d’un  extrême  à  l’autre:  du marxisme au libéralisme, jusqu’au libertinisme; du collectivisme à l’individualisme radical; de l’athéïsme à un vague mysticisme religieux; de l’agnosticisme au syncrétisme et ainsi de suite. Chaque jour naissent de nouvelles sectes et se réalise ce que dit saint Paul à propos de l’imposture des hommes, de l’astuce qui tend à les induire en erreur (cf. Ep 4, 14). Posséder une foi claire, selon le Credo de l’Eglise, est souvent défini comme du fondamentalisme. Tandis que le relativisme, c’est-à-dire se laisser entraîner « à tout vent de la doctrine », apparaît comme l’unique attitude à la hauteur de l’époque actuelle. L’on est en train de mettre sur pied une dictature du relativisme qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs.

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Nous possédons, en revanche, une autre mesure:  le Fils de Dieu, l’homme véritable. C’est lui la mesure du véritable humanisme. Une foi « adulte » ne suit pas les courants de la mode et des dernières nouveautés; une foi adulte et mûre est une foi profondément enracinée dans l’amitié avec le Christ.

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C’est cette amitié qui nous ouvre à tout ce qui est bon et qui nous donne le critère permettant de discerner entre le vrai et le faux, entre imposture et vérité.

Cette foi adulte doit mûrir en nous, c’est vers cette foi que nous devons guider le troupeau du Christ. Et c’est cette foi, – cette foi seule – qui crée l’unité et qui se réalise dans la charité.

Saint Paul nous offre à ce propos – en contraste avec les tribulations incessantes de ceux qui sont comme des enfants ballotés par les flots – une belle parole:  faire la vérité dans la charité, comme formule fondamentale de l’existence chrétienne. Dans le Christ, vérité et charité se retrouvent. Dans la mesure où nous nous rapprochons du Christ, la vérité et la charité se confondent aussi dans notre vie. La charité sans vérité serait aveugle; la vérité sans charité serait comme « cymbale qui retentit » (1 Co 13, 1).

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