Le séisme, la guerre, les sanctions. Le terrible témoignage d’une religieuse d’Alep. Et le jugement sans appel du Custode de Terre Sainte, Francesco Patton:

L’aide qui arrive provient de pays islamiques, comme l’Égypte, l’Iran, l’Algérie… L’Occident rate une fois de plus le train… il semble que la plupart des aides internationales aillent à la Turquie et que la Syrie soit coupée du circuit international précisément à cause des sanctions décidées par les États-Unis et l’Union européenne.

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Syrie, une triple tragédie : le tremblement de terre, la guerre et les scandaleuses sanctions

Nicola Scopelitti

https://lanuovabq.it/it/siria-una-tragedia-triplice-il-terremoto-la-guerra-e-le-scandalose-sanzioni

« La situation était déjà très difficile en raison d’un conflit qui dure depuis douze ans maintenant. Les gens sont désespérés », explique à La Bussola Sœur Siba al Khoury d’Alep. De nombreuses régions touchées par le tremblement de terre sont sous le contrôle des rebelles et donc inaccessibles. Et puis il y a les sanctions occidentales : « Les sanctions sont inhumaines », déclare le père Francesco Patton, Custode de Terre Sainte. « et je trouve scandaleux qu’en un moment aussi tragique, nous soyons incapables de lever ou de suspendre les sanctions. Des gens meurent en Syrie ».

Siria, le rovine di Jinderis, provincia di Aleppo
Syrie, les ruines de Jinderis, province d’Alep

« La situation était déjà très difficile en raison d’un conflit qui dure maintenant depuis douze ans. De nombreuses maisons avaient déjà été détruites par la guerre. Aujourd’hui, avec le violent tremblement de terre du 6 février, de nombreux autres bâtiments se sont effondrés ou ont subi de nouveaux dégâts importants. Les gens sont désespérés. Ils demandent de l’aide, mais sur leur visage, en plus d’une grande souffrance, il y a de l’abattement et du désespoir. Quand nous parlons aux gens, nous entendons cette question : pourquoi cette terrible tragédie nous est-elle encore arrivée? Il est difficile de répondre, mais, en tant que sœurs, en plus de l’aide matérielle, nous avons également le devoir d’offrir une aide psychologique et spirituelle. Le Seigneur nous donnera la force d’affronter aussi cette grave situation ».

Sœur Siba al Khoury, une religieuse des Sœurs enseignantes de Sainte Dorothée-Filles des Sacrés Cœurs de Vicence, qui vit à Alep, s’adresse à La NBQ.

« Nous étions au lit quand nous avons senti la secousse du tremblement de terre. Nous sommes immédiatement descendues dans la rue et sommes restées sur la route pendant plus de quatre heures, jusqu’à ce que les autorités nous donnent la permission de rentrer, pour récupérer nos affaires les plus essentielles ».

Leur maison a été endommagée et l’administrateur apostolique, le père Raimondo Girgis o.f.m., les a emmenées avec d’autres religieuses dans les locaux du vicariat.

De nombreux bâtiments se sont effondrés à cause de la forte secousse. D’autres, jugées dangereux à cause des dégâts, sont en cours de démolition.
Sœur Siba explique:

« De nombreux Syriens qui se sont retrouvés sans abri abandonnent leur pays et cherchent refuge ici, à Alep. Des églises ont été ouvertes pour accueillir les personnes déplacées. Mais aussi des jardins d’enfants et des écoles. De même, les couvents accueillent de nombreuses familles. Un grand nombre de personnes ont passé les nuits dans des lieux de culte. Il fait très froid et nous sommes occupés, avec d’autres volontaires, à apporter de la nourriture et des couvertures ».
« Il y a un besoin d’assistance médicale, en particulier pour les personnes âgées, les femmes et les enfants ».

À Alep, comme dans le reste de la Syrie, il y a énormément de pauvreté causée par l’embargo et les sanctions internationales. Et maintenant, il y a la difficulté de recevoir des aides.
Sœur Siba poursuit:

« L’électricité est fournie de manière aléatoire, quelques heures par jour. Les hôpitaux sont peu nombreux, et malheureusement, il y a beaucoup de blessés. Les gens errent dans les rues, confus et cherchant de l’aide. Ils ont peur de rentrer chez eux. Ils vivent des heures d’angoisse car ils ne savent pas s’il y aura d’autres secousses, peut-être de forte intensité comme le prédisent les experts ».

À Alep, il y a l’hôpital catholique Saint-Louis qui fournit des soins médicaux gratuits aux Syriens les plus pauvres et les plus vulnérables. Il a reçu la visite du cardinal Mario Zennari, nonce apostolique.

« Sa présence parmi nous est un signe fort de la proximité du pape et nous sommes particulièrement émus », dit le père Bahjat Karakach, curé de la paroisse latine. Le cardinal a également pu voir de près les destructions causées par le tremblement de terre. Un vrai drame ».

En Syrie, entre autres, 90 % de la population se trouve en dessous du seuil de subsistance, et cette énorme catastrophe a rendu la population encore plus pauvre. Il est plus que jamais nécessaire que l’aide internationale parvienne à la population épuisée. Malheureusement, il y a tellement d’accrocs. Difficultés d’acheminement des marchandises, difficultés d’acheminement des produits de première nécessité dans les endroits touchés par le tremblement de terre.

« À Alep, poursuit Sœur Siba, les gens continuent de creuser avec leurs mains à la recherche de survivants. Dans la partie orientale de la ville, la plus bombardée pendant la guerre, de nombreux bâtiments étaient déjà précaires, maintenant avec les répliques, beaucoup se sont effondrés ».

Une partie des zones touchées par ce tremblement de terre est sous le contrôle des rebelles opposés au régime de Bashar al Assad, d’autres zones sont sous le contrôle du gouvernement d’Assad. Outre les difficultés causées par le conflit, toujours en cours, les routes, endommagées par le tremblement de terre, sont aussi partiellement inutilisables en raison des chutes de neige de ces derniers jours. Les équipes de secours peinent à atteindre les localités, notamment dans les territoires du nord-ouest de la Syrie, où opère le groupe djihadiste « Hayat Tahrir al Sham » (HTS), dirigé par Mohammad al Jolani et défini par les Nations unies comme un mouvement terroriste.

« Les sanctions sont inhumaines », a déclaré le père Francesco Patton, o.f.m, Custode de Terre Sainte – la Custodie est en effet présente en Syrie avec les communautés de la vallée de l’Oronte, d’Alep et de Lattaquié -, « et je trouve scandaleux qu’en un moment aussi tragique, nous soyons incapables de lever ou de suspendre les sanctions. Des gens meurent en Syrie. L’aide qui arrive provient de pays islamiques, comme l’Égypte, l’Iran, l’Algérie… L’Occident rate une fois de plus le train ». Le père Patton poursuit en soulignant qu’il semble que la plupart des aides internationales « aillent à la Turquie et que la Syrie soit coupée du circuit international précisément à cause des sanctions décidées par les États-Unis et l’Union européenne ».

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