Qu’on le veuille ou non, l’accident de voiture provoqué par l’ « humoriste » bourré de came, au terme d’une nuit de débauche, et qui a dévasté la vie d’une famille qui a eu le malheur de croiser sa route, n’est pas un fait divers quelconque (comme il en arrive tous les jours sans qu’on en parle, ai-je lu quelque part: ah bon?) et ne relève pas de sa vie privée. Il n’y a plus de vie privée quand, par volonté même de la personne, on l’étale dans les médias à coups d’interviews, de sketchs où l’on se confie plus ou moins à demi-mots et de livres de « confession », espérant bien profiter de la bienveillance des médias envers tous les comportements déviants pour en tirer un profit de notoriété et de succès, sinon pécuniaire.

A propos de bienveillance des médias, on ne peut s’empêcher de comparer la modération de leurs commentaires avec la hargne déployée envers – par exemple – Pierre Ménès ou Noel Le Graët. La différence de gravité entre les faits reprochés est abyssale. Mais eux ne sont que des « mâles blancs hétéro », ce qu’on ne peut certes pas reprocher à Palmade.

On m’objectera que ce drame n’a aucun rapport avec le sujet de mon site. Pas si sûr. Le diable porte pierre, dit l’adage: le fait que la femme de 27 ans grièvement blessée dans l’accident, était enceinte de 7 mois et ait perdu son bébé va peut-être permettre de réfléchir sur le statut (juridique, mais pas seulement) du fœtus, dans un cadre plus général. Car ce qui est en jeu ici n’est rien de moins que la possibilité d’inculper Palmade d’homicide involontaire, comme l’explique cet article sur Midi Libre:

L’homicide peut-il être retenu ?

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Mais peut-on parler d’homicide involontaire dans le cas d’un bébé encore dans le ventre de sa mère ? La question très particulière a du mal à être tranchée par la justice. Cela révèle d’un choix sociétal, personnel et surtout philosophique. Explications.
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En droit pénal, le fœtus n’est pas une personne, comme le rapporte Lextenso.
« L’homicide involontaire est le fait de causer la mort de quelqu’un sans le vouloir », or quand (sic!) est-il dans le cas d’un fœtus qui n’est pas une personne ?
À plusieurs reprises, la Cour de cassation a estimé que l’incrimination d’homicide involontaire d’autrui ne pouvait être étendue à l’enfant à naître.
Et notamment avec son dernier arrêt sur le sujet datant de 2002 qui vient confirmer des arrêts de 1999 et de 2001, et ce « malgré la résistance de certaines cours d’appel ».
Dans cet arrêt, la Cour affirme que « les décisions de la Cour de cassation se fondent sur le principe de l’interprétation stricte de la loi pénale, qui ne prévoit pas que la mort du fœtus puisse être qualifiée de mort d’autrui ».
Avant d’ajouter : « La non-application de la loi pénale au décès du fœtus, même si celui-ci intervient quelques secondes avant l’accouchement, alors qu’elle sera applicable à l’enfant qui décède quelques secondes après l’accouchement aboutit à des incohérences et à des inéquités. Seule une intervention du législateur pourra y mettre fin ».

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En 2014 pourtant, un automobiliste a été condamné par le tribunal correctionnel de Tarbes pour homicide involontaire sur un fœtus dont il avait renversé la mère enceinte, comme le rapporte Le Figaro.
La décision rendue s’appuie sur des expertises médicales, considérant que le fœtus était « viable » et qu’il n’était « mort que du fait de l’accident », à cause « du choc du fœtus contre la paroi utérine ».
L’automobiliste qui a été condamné a refusé délibérément d’invoquer la jurisprudence de la Cour de cassation pour que la victime puisse faire son deuil.

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Et dans l’affaire Palmade ?
Pour l’instant, le procureur de la République de Melun a annoncé que l’enquête était ouverte pour homicide involontaire.
Tout va dépendre désormais de savoir si le fœtus présent dans le ventre de sa mère était viable et surtout s’il était encore vivant au moment où il a été extrait du ventre de sa mère.
Car si une femme enceinte blessée dans un accident de la circulation donne naissance à un enfant même s’il n’a que quelques secondes de vie, le bébé est alors considéré comme une personne. Dans ce cas précis, l’enfant est alors considéré comme un être vivant. 
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Il faut désormais connaître les circonstances précises de la perte du bébé.
Me Rémy Josseaume, avocat spécialiste en droit routier expliquait sur Franceinfo : « Les médecins vont vérifier si lorsque l’enfant a été extrait, celui-ci respirait, s’il est né vivant, la qualification juridique d’homicide involontaire pourra éventuellement prospérer. »
Avant d’ajouter : « En revanche, s’il est mort-né, il n’a pas le statut de personne, donc la qualification juridique d’homicide involontaire ne sera pas possible. »

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Une autopsie qui devrait être effectuée dans les prochaines heures, devra déterminer si le bébé a respiré ou non, avant de mourir.

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https://www.midilibre.fr/2023/02/12/foetus-tue-dans-laccident-de-pierre-palmade-pourquoi-lhomicide-involontaire-pourrait-ne-pas-etre-retenu-10993801.php

Pendant ce temps, aujourd’hui, on nous dit, avec des trémolos dans la voix que le sinistre humoriste regrette son acte (c’est le moins! et de toute façon c’est une affaire entre lui et sa conscience, privée, celle-là!) et prie pour ses victimes. Le pauvre, il a succombé une fois de trop à ses « démons », mais promis juré, il ne recommencera pas, et il assumera toutes les conséquences de ses actes (à mon avis, il n’aura pas le choix)

Je conclus en laissant la parole à l’excellente Marie Delarue sur le site Boulevard Voltaire. Je souscris à 100%

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