Le terrible constat de Luis Badilla , directeur du site (souvent qualifié de « para-vatican », mais qui l’est de moins en moins) « Il Sismografo »: le Pape ne confirme pas ses frères dans la foi, et il ne convertit pas les autres. Il COMMUNIQUE. Peut-être à son insu, dans un article formidable (qui devrait servir un jour futur aux historiens), Luis Badilla nous fait toucher du doigt la vacuité et même la fausseté de ce pontificat. Il n’y a rien de vrai, rien de spontané, tout est calculé. Déjà, la Parole de Dieu doit certes être communiquée (c’est-à-dire transmise, annoncée) mais certainement pas au sens teinté de marketing que l’on donne à ce mot aujourd’hui. Si en plus il y a un organe de communication « de l’ombre » qui double celui officiel dans le seul but non pas d’informer de l’activité du Pape mais de le présenter sous un jour le plus favorable possible (façon très charitable de voir les choses), alors là, on touche le fond.

Les deux salles de presse du pape : l’une au Saint-Siège, l’autre à Santa Marta

Luis Badilla
ilsismografo.blogspot.com/2023/04/vaticano-le-due-sale-stampa-del-papa

Les communications vaticanes, celles que le pape François gère personnellement, sont aujourd’hui une réalité très liquide et indéchiffrable. Il est certain, cependant, qu’elles créent une grande confusion et une grande désorientation
Il n’est pas nécessaire de prouver quoi que ce soit. Les faits parlent d’eux-mêmes ainsi que certains protagonistes. Il est désormais acquis que le pontificat de François, depuis le tout début, en mars 2013, a comporté deux salles de presse. L’une a vu le jour dans les années 1960, anticipée par un Bureau d’information de l’Osservatore Romano (créé le 20 février 1939) et dans ce cas nous parlons du Bureau de presse du Saint-Siège, qui a eu 8 directeurs, y compris l’actuel, Matteo Bruni.

Les décennies d’existence du Bureau de presse du Saint-Siège

Cette liste comprend des personnes aussi prestigieuses que le premier directeur, Angelo Fausto Vallainc, Federico Alessandrini, Romeo Panciroli, Joaquín Navarro-Valls et Federico Lombardi.

Aujourd’hui, après la Constitution ‘Praedicate Evangelium’ (19 mars 2022), ce Bureau de presse fait évidemment partie du Dicastère pour la Communication, mais il est en même temps sous la dépendance directe de la Secrétairerie d’Etat, en particulier du Substitut Mgr Edgardo Peña Parra, qui assure normalement la liaison avec le directeur par l’intermédiaire de l’UID [Ufficio d’Informazione e Documentazione] qui fonctionne à quelques mètres du bureau de l’archevêque vénézuélien Peña Parra, sous la supervision de l’Assesseur pour les affaires générales de la Secrétairerie d’État, Mgr Roberto Campisi, en fonction depuis le 26 novembre 2022.

Le Bureau de presse du Saint-Siège est le moyen de communication du Saint-Siège avec le public de manière officielle, formelle et institutionnelle. Son directeur est le chef opérationnel et exécutif et non le porte-parole du Pape, terme couramment utilisé mais erroné. Le Bureau de presse et son directeur, à la tête d’un team, n’opèrent qu’avec l’autorisation préalable du sommet. Au cours des dix années du pontificat de François, il y a eu quatre directeurs : le père Federico Lombardi et trois laïcs, Greg Burke, Alessandro Gisotti et Matteo Bruni.

Le bureau de presse de Santa Marta

Pendant la même période, les informations du Vatican, en particulier celles concernant la personne du pape, les moments ou les passages de son magistère et les affaires de son gouvernement, ne passaient pas par les mécanismes classiques et éprouvés de la Salle de presse du Saint-Siège. Dès le début, le pontife argentin a choisi une modalité alternative ou complémentaire en établissant, en cultivant et en renforçant – de manière toujours plus importante – une sorte de Bureau de presse de Santa Marta, qu’il dirigeait personnellement.

Cela ne s’était jamais produit avec les papes précédents, mais dès les premiers mois du pontificat de Bergoglio, alors que le Bureau de presse était dirigé par le jésuite Federico Lombardi, il y a eu des signes à plusieurs reprises que certains passages étaient traités et exécutés à Santa Marta, le Bureau de presse du Saint-Siège étant laissé à l’écart.

Les nombreuses situations médiatiques singulières

Dix ans plus tard, la liste de ces circonstances singulières est assez longue.

A de nombreuses reprises, entre le Bureau de presse du Saint-Siège et le Bureau de presse de Santa Marta, on a enregistré des décalages flagrants, des contradictions majeures et surtout des silences assourdissants imposés par Santa Marta.

Dans ce mécanisme actuel pas facile, quasi-impossible à décoder, le pape François a tissé un réseau d’amitiés journalistiques, de rédacteurs en chef et d’opérateurs disposés à prêter main forte aux besoins médiatiques du pontife, qui fonde une bonne partie de son gouvernement sur l’amitié et la bienveillance de ce réseau dit de la « presse Bergoglio-friendly« .

Une douzaine de journalistes de nationalités et de titres différents se distinguent dans ce réseau : ils ont établi une relation personnelle avec le Saint-Père, qu’ils entendent au téléphone ou qu’ils rencontrent en personne périodiquement.

Des relations similaires ont également été établies entre d’autres journalistes et collaborateurs proches du Saint-Père, et c’est là un autre mode de fonctionnement du Bureau de presse de Santa Marta.

Certains de ces professionnels sont invités à faire des interviews avec des questions pré-établies, ou à transmettre ou diffuser de manière informelle des pensées, des décisions ou des prises de position du Saint-Père qui sont en contradiction avec les communications officielles de l’institution.

Communication liquide.

Deux cas sensationnels, pas récents, sont à signaler.

  1. Après la publication du Responsum du Dicastère pour la Doctrine de la Foi interdisant la bénédiction des couples de même sexe (publié le 15 mars 2021), certains journaux européens et américains, pour défendre le Pontife des critiques suscitées par le document, sont allés jusqu’à écrire que le Pape n’avait pas vu le document en toute sérénité parce qu’il lui avait été remis presque sur les marches de l’avion peu avant de s’envoler pour l’Irak (6 – 8 mars 2021).
  2. Après la publication surprise de la Constitution « Praedicate Evangelium », il y a eu de nombreuses erreurs, coquilles, phrases échangées entre traducteurs, incohérences dans la numérotation, etc. dans le document mis en ligne sur le web. L’un de ces journalistes amis est allé jusqu’à écrire dans un hebdomadaire que le pontife avait été contraint de publier à la hâte le document, avec de nombreuses imperfections, parce qu’il craignait que des sections de la Secrétairerie d’État n’en bloquent la diffusion.

Aujourd’hui, sur le conflit entre ces deux salles de presse, on peut se demander quelle est la vérité dans l’affaire de l’hospitalisation récente du Saint-Père. S’agissait-il vraiment d' »examens planifiés », comme le disaient les deux premiers communiqués institutionnels, ou bien la vérité est-elle celle que le Pontife lui-même a racontée, quelques jours plus tard, à son ami Michele Ferri de Pesaro : « Je suis arrivé à l’hôpital inconscient » ?

La vérité est que les communications du Vatican – même celles menées par le Pape François personnellement – sont désormais une réalité complexe et très liquide et que, par conséquent, la frontière entre le Bureau de presse du Saint-Siège et le Bureau de presse de Santa Marta est mobile, comme une barrière qu’on peut déplacer selon les occasions.

Bien sûr, il n’y a rien de censurable là-dedans [!!!]. Le pape est le souverain.
L’important pour tous, croyants ou non, est de savoir et de garder à l’esprit qu’il existe deux canaux différents et parallèles dans les communications du Vatican.

Share This