Congédié en août 2019 à la suite d’un « remaniement » – opéré par Mgr Paglia mais certainement décidé plus haut – de sa chaire de théologie morale à l’Institut Jean Paul II pour le mariage et la famille dont il était l’un des piliers, et très apprécié de Benoît XVI qui l’a reçu ponctuellement jusqu’à la fin, l’éminent théologien a accordé une interview au quotidien La Verità.
Il revient sur la polémique suscitée à l’époque par l’audience accordée par le Saint-Père dans la foulée de cette « épuration ».
Et il affirme que Benoît XVI considérait la défense du mariage et de la famille comme une tâche essentielle pour protéger l’identité personnelle et la société humaine de la manipulation idéologique.
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Selon Livio Melina, il était essentiel pour Benoît XVI que l’Église ait le courage de dire « non » aux propositions de mariage entre personnes de même sexe
infovaticana.com
12 septembre 2024
Livio Melina a accordé une interview à La Veritá, il revient sur sa purge à l’Institut Jean-Paul II et sur sa relation avec Benoît XVI.
Melina est un éminent théologien italien qui a été professeur à l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille à Rome, une institution créée par saint Jean-Paul II en 1981 pour approfondir la théologie du mariage et de la famille.

Mais sa relation avec l’institut a été écourtée en 2019, lorsqu’il a été révoqué avec d’autres professeurs, suite à la réforme promue par le pape François, qui a transformé l’institution en Institut théologique pontifical Jean-Paul II pour les sciences du mariage et de la famille.
Cette restructuration, que Melina considère comme une rupture avec la mission originelle de l’institut, a suscité une controverse au sein de l’Église, notamment pour l’élimination de la référence à l’encyclique « Humanae vitae », considérée comme une pierre angulaire du magistère sur la morale sexuelle et la famille.
La fermeture de l’Institut pontifical Jean-Paul II
La fermeture de l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille a marqué un moment de grande controverse au sein de l’Église. Melina décrit cette décision comme une rupture significative avec la vision de saint Jean-Paul II, notant que « le changement de titre est presque imperceptible, mais le changement substantiel est radical ». Selon le théologien, la nouvelle orientation de l’institut, fondé en vertu du Motu Proprio Summa familiae cura de 2017, a supprimé la référence explicite à l’encyclique Humanae vitae de Paul VI et a entraîné le départ de nombreux universitaires et la fermeture de plusieurs sections internationales de l’institut.
Pour Melina, cela représente une « discontinuité » avec la mission originale de l’institut, qui a été conçu comme un rempart pour défendre l’anthropologie chrétienne dans la théologie morale.
Selon Melina, le pape Benoît XVI a profondément apprécié le rôle de l’institut dans la mission de l’Église. « Il considérait le rôle de l’institut, tant à Rome que dans ses différentes sections internationales, comme central dans la mission de l’Église en faveur du mariage et de la famille », souligne le théologien italien.
Pour Ratzinger, l’Institut était essentiel pour relever les défis contemporains à partir d’une anthropologie chrétienne, basée sur la catéchèse de Jean-Paul II sur la « Théologie du corps » et l’encyclique Veritatis splendor. Benoît XVI a vu dans la dissolution du concept chrétien de moralité, de sexualité et de famille l’une des causes profondes de la crise des abus dans l’Église, soulignant la nécessité d’une réponse qui réconcilie la liberté humaine avec la nature et le Créateur.
Rencontres avec Benoît XVI
Livio Melina se souvient avec une grande reconnaissance des rencontres qu’il a eues avec le pape émérite Benoît XVI, les décrivant comme des moments d’intense lumière théologique et humaine.
« Les rencontres avec Benoît XVI, d’août 2019 à janvier 2021, ont été pour moi un don unique de la grâce », commente Melina, qui souligne que, malgré les limitations physiques du pape émérite, ses réflexions sont restées profondément lucides.
Au cours de ces rencontres, ils ont abordé des thèmes anthropologiques et théologiques d’une grande actualité, dans lesquels Benoît XVI a réitéré sa préoccupation pour l’absence de Dieu dans la vie quotidienne de l’humanité contemporaine. Le pape émérite a souligné la nécessité pour l’Église de réaffirmer la primauté de Dieu et d’affronter les défis modernes avec une solide anthropologie chrétienne.
Dans l’interview, il déclare qu’un point central pour Benoît XVI était celui de la responsabilité de l’Église, « qui doit avoir le courage de prononcer un non ferme et clair aux propositions de mariage homosexuel, tout en démontrant en même temps un amour maternel pour toutes les personnes, en suggérant des chemins d’amitié moralement légitimes, pour surmonter la solitude, pour guérir les blessures, pour éliminer le risque de désespoir ».
La différence sexuelle et la mission de l’Église selon Benoît XVI
Selon Melina, un thème récurrent dans les réflexions de Benoît XVI est l’importance de la différence sexuelle en tant qu’élément du dessein de Dieu pour l’humanité. Inspiré par l’Écriture, Benoît XVI a soutenu que la différence sexuelle est un reflet de l’image de Dieu dans l’être humain, liée à la vocation à la communion et à la transmission de la vie.
« Il s’ inquiétait du silence de l’Église et des confessions chrétiennes sur cette question, intimidées par la prédominance de la censure idéologique », note Melina, ajoutant que Benoît XVI considérait la défense du mariage et de la famille comme une tâche essentielle pour protéger l’identité personnelle et la société humaine de la manipulation idéologique.