Décidément, malgré la fermeture de son blog, le responsable de feu Il Sismografo n’en finit pas de faire entendre sa voix (et avec une liberté de plus en plus grande). Cette fois, il réagit à la lettre quasiment comminatoire adressée par François au collège des cardinaux (cf. Le Saint-Siège au bord du dépôt de bilan? Le pape écrit aux cardinaux). Et comme précédemment, à propos des voyages papaux (Voyages apostoliques et conférences de presse en vol: copie à revoir), il se sert du canal, très conservateur, du blog Messa in Latino.
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Je relève ce passage très significatif, qui soulève un problème récurrent dans tous les états dits « démocratiques »: la mainmise du pouvoir profond à travers les cabinets de consulting (en France, on parle régulièrement de Mc Kinsey, mais l’affaire retombe systématiquement dans l’oubli: vous avez dit bizarre?)
blog.messainlatino.it/2024/09/luis-badilla-osservazioni-sulla-lettera
a) Pourquoi ne pas convoquer un Consistoire ?
Nous n’avons pas souvenir d’une lettre similaire du Saint-Père aux cardinaux pour traiter en public ce type de question. Si la situation était si délicate, comme on peut le déduire des paroles de François, pourquoi le pontife ne convoque-t-il pas un Consistoire ordinaire, public ou non ?
Le pape n’a jamais rencontré l’ensemble des cardinaux. Les seuls cardinaux collaborateurs proches du pontife (parmi les plus de 200 du Collège des cardinaux) sont ceux du Conseil des Neuf et quelques autres. Parmi ces derniers, il y en a un certain nombre qui ont été des conseillers proches, mais qui ont ensuite été écartés (ceux qu’on appelle “consiglieri a turno” – conseillers intérimaires ).
b) Comment l’argent des fidèles sera-t-il dépensé ?
En 2024 – c’est-à-dire au XXIe siècle – le pape et le Saint-Siège ne peuvent plus se contenter de parler de « mission » lorsqu’il s’agit du budget, des recettes et des dépenses. Dans ce contexte, « Mission » est un mot qui peut tout dire, mais aussi rien dire. Il faut être clair comme de l’eau de roche.
Dépenser sans expliquer de manière transparente comment les ressources des fidèles sont utilisées n’est plus acceptable.
Ces questions deviennent encore plus complexes si l’on tient compte du fait que, sous ce pontificat, plusieurs entiutés ont été créées sans que l’on sache exactement comment elles tiennent debout, telles que : Scholas Occurrentes, Università del Senso, Fondations diverses, les dépenses synodales monstrueusement augmentées, la multiplication des porte-parole et des salles de presse, les ruisseaux ou petits fiefs bureaucratiques des nouveaux Dicastères, les milliers et milliers de livres invendus qui s’entassent dans les entrepôts de la Maison d’édition du Vatican, etc.
A mentionner, en passant, un ajout spécial : dans certains bureaux où l’on achète des biens matériels, il arrive qu’ils restent ensuite inutilisés, parfois sans même que l’on enlève l’emballage. Bref, corruption et gaspillage.
Et ce n’est pas tout : dans de nombreux dicastères du Saint-Siège, avant et après Praedicate Evangelium (nouvel organigramme de la Curie), de nombreuses embauches d’experts et/ou de consultants ont été effectuées avec des salaires ou des honoraires plutôt « hors normes », pour ne pas dire plus.
c) Consulting, audits et autres.
Depuis quelques années, le Vatican multiplie les autorisations de prestations de services, payants bien sûr, du type consulting audit ou rapport, commandés à des cabinets extérieurs.
Une sorte d’externalisation de pas mal de tâches qui pourraient être réalisées au sein du Vatican avec ses propres employés, spécialement ceux de haut niveau professionnel. Un cas récent et frappant est celui du Synode de l’année dernière, qui se répétera probablement sous peu.
Ce type de délocalisation comporte, entre autres, le risque de révéler ou de transmettre des informations sensibles du Saint-Siège.
Le coût de ces opérations est très élevé et il semblerait que d’autres nouvelles prestations externes aient déjà été signées dans le cadre du Jubilé 2025.
d) Clarté sur les réformes entreprises.
Quels sont les premiers résultats ? En substance, l’appel du Pape aux cardinaux est une chose juste et nécessaire et devrait être soutenu même avec un euro donné lors de la messe dominicale. Toutefois, la question qui mérite une réflexion approfondie et honnête est la suivante : le saint et fidèle Peuple de Dieu du XXIe siècle veut savoir comment l’argent est dépensé, où il est investi, d’où il vient et comment il est administré. Dans ce contexte, ce saint et fidèle Peuple de Dieu veut savoir comment les dites « réformes » mentionnées dans la lettre du pontife aux cardinaux progressent réellement.
Luis Badilla