Que votre oui soit oui, que votre non soit non, tout le reste est l’œuvre du diable (Matthieu 5, 37). François et son gardien de la foi le cardinal Fernandez semblent préférer le « oui mais », le « si… ».
Quelques jours à peine après la publication de la note sur les apparitions de la Sainte Vierge (cf. Medjugorje: la norme qui met la Sainte Vierge sous tutelle), il a jugé nécessaire de faire une mise au point.
La note, avec ses limites et les critiques qu’elle a pu susciter, était malgré tout à peu près claire, avec la décision de nihil obstat. Après les « clarifications » de Fernandez, c’est au contraire la confusion et le doute qui s’installent.
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Reste ce qui est probablement la vraie raison de la note: la critique sévère par son accolyte, le père Cecchin OFM, président de l’Académie pontificale mariale, qui dénonce
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L’action de l’Esprit Saint et les tentatives « mafieuses » contre le Pape
Précisions romaines sur Medjugorje et d’autres phénomènes
Giuseppe Nardi
26 septembre 2024
Les prises de position sur la décision romaine concernant Medjugorje se multiplient et de nouvelles informations viennent s’y ajouter. Ce qui devrait apporter plus de clarté ne le fait cependant pas toujours.
Lundi, à l’université pontificale Antonianum de l’ordre franciscain , s’est tenue à Rome une conférence sur les Nouvelles normes relatives à la procédure d’évaluation des phénomènes surnaturels présumés.
L’événement a été organisé par l’Observatoire international des apparitions et des phénomènes mystiques de l’Académie pontificale mariale internationale en collaboration avec la Antonianum, la Faculté pontificale de théologie Saint Bonaventure et de la Faculté de théologie pontificale Marianum.
L’orateur principal était le cardinal Victor Manuel « Tucho » Fernández, préfet de la foi. Ce n’est pas seulement pour cette raison que l’attention s’est concentrée sur la décision concernant Medjugorje du Dicastère de la Foi, annoncée quelques jours auparavant.
Le père Stefano Cecchin OFM, président de l’Académie pontificale mariale, a souligné que depuis sa fondation en 1946, l’Académie « s’occupe particulièrement du thème des apparitions mariales qui ont marqué de manière décisive l’histoire de l’Eglise ».
Selon le franciscain, Marie, qui apparaît également aux non-chrétiens, est « porteuse du dialogue entre les religions et inculturatrice de l’Evangile ».
L’évènement a été organisée pour dissiper les « malentendus ».
Dans son intervention, le cardinal Fernández a pris position sur certaines parties du document « La Reine de la Paix » concernant Medjugorje. Il avait présenté ce document seulement quatre jours auparavant lors d’une conférence de presse avec le jugement du Vatican sur la localité herzegovienne . Mais manifestement, peu de temps après, il était déjà nécessaire d’apporter des « précisions » :
« Le nihil obstat pour le culte publiqc dans le sanctuaire de Medjugorje signifie qu’il y a quelque chose de surnaturel, que l’Esprit Saint y est à l’œuvre (…) même si l’authenticité surnaturelle des apparitions n’est pas déclarée. Certains messages de la Vierge peuvent être surnaturels, mélangés à d’autres qui ne le sont pas. Nous ne disons pas que l’Esprit agit ‘à travers’, car cela reviendrait à affirmer le surnaturel, mais ‘au milieu’, et cela signifie déjà une action particulière de l’Esprit en ce lieu ».
Pourquoi Medjugorje n’a pas été reconnu comme « surnaturel »
Le cardinal Fernández, considéré dans l’Eglise comme un « poids plume » théologique et comme la « plus profonde chute » à la tête de l’ancien Saint Office , s’est efforcé lundi de « clarifier » la situation. Il répondait aux nombreuses demandes des « adeptes de Medjugorje », selon le dictionnaire des médias du Vatican, sur les raisons pour lesquelles le caractère surnaturel des événements de Medjugorje n’a pas été reconnu.
La commission Ruini n’aurait pas exclu une telle possibilité, du moins pour une partie d’entre eux. Cependant, le rapport de la commission Ruini est encore aujourd’hui classé. ;
Tucho Fernández a déclaré à ce sujet que la déclaration de surnaturel était « toujours possible ».
Il est intéressant de noter que cette possibilité ne figure pas dans les nouvelles normes dont Fernández est responsable. Le préfet de la foi a expliqué pourquoi cette déclaration sur Medjugorje n’a pas eu lieu en indiquant qu’ « après 45 ans » du phénomène, pendant lesquels « on n’a jamais proposé aux fidèles une clarification des messages », il était important de leur donner la certitude « d’être dans l’Eglise » [prière de ne pas rire!!! ndt] et de leur offrir « un accompagnement et l’autorisation de célébrer le culte public ».
Le pape François aurait jugé cela « suffisant » pour le moment.
Le cardinal a réaffirmé l’enseignement de l’Eglise selon lequel « Dieu est présent et à l’œuvre dans notre histoire » et qu’il est « possible que Dieu soit présent de manière extraordinaire », notamment par des apparitions et des miracles. Il a qualifié de « très laborieux » le cheminement de son dicastère vers les nouvelles normes. En 45 ans, depuis que le phénomène de Medjugorje existe, l’Eglise a procédé à 3500 canonisations, qui présupposent toutes un miracle. Mais dans le même temps, seules « trois ou quatre déclarations de surnaturalité » ont été faites, et même sur celles-ci, il y a quand même des « doutes ».
L’action de Rome concernant Medjugorje est devenue nécessaire parce qu’il n’est « pas bon » que « les gens continuent pendant des années sans orientation et se rendent sur les lieux des prétendues apparitions sans autorisation ». Les « problèmes » qui se posent sont « souvent » liés, selon Tucho Fernández, au fait que « les présumés voyants sont encore en vie ». On ne sait pas comment leur expliquer « qu’ils doivent attendre pour annoncer de nouvelles visions tant que les précédentes n’ont pas été évaluées « .
Le danger des messages « voulus par Dieu ».
Le préfet de la foi a qualifié non seulement de problème, mais aussi de « danger » les « messages » présentés comme « voulus par Dieu » et « transmis par la Vierge ». Avec un certaine ironie, il a demandé : « Qui lira encore les Pères de l’Eglise qui n’ont pas dit qu’ils avaient eu des visions ? »
Tucho Fernández a insisté sur le fait que « déclarer le caractère surnaturel de certains phénomènes ne fait pas partie du magistère infaillible du pape » et que les fidèles « ne sont pas obligés d’y croire. C’est pourquoi nous ne les considérons pas non plus comme indispensables ». Après tout, il existe dans le monde entier de nombreux et importants sanctuaires mariaux pour lesquels « il n’y a jamais eu de déclaration de surnaturalité ». Le cardinal a cité comme exemple concret le sanctuaire argentin de Lujàn près de Buenos Aires.
C’est pourquoi Tucho Fernández n’a pas parlé de « reconnaissance » à propos de Medjugorje, mais toujours de « nihil obstat », cette formule tirée des nouvelles normes. Ce nihil obstat signifie, selon le cardinal, « trois choses » pour le lieu en Herzégovine :
- « La paix de l’esprit pour les fidèles qui savent que l’Église m’accompagne désormais ».
- « L’autorisation de célébrer des offices publics, et pas seulement des pèlerinages, ce qui signifie qu’une église ou une chapelle peut désormais être construite partout dans le monde avec cette invocation».
- « Des clarifications utiles pour les fidèles, afin que ceux qui lisent les messages soient accompagnés et qu’il y ait des éléments pour les interpréter correctement ».
A Medjugorje, selon Fernández, les « fruits spirituels sont importants ». En revanche, à Chandavila, en Estrémadure, « où la voyante a senti le baiser et l’étreinte de la Vierge », la dévotion à Notre-Dame des Douleurs l’a impressionné – le cardinal Fernández a écrit un livre entier sur « le baiser« .
Chandavila avait reçu fin août du Dicastère de la foi le Nihil obstat. – Comme il ne s’agit pas d’une reconnaissance de surnaturel, il faut écrire au conditionnel: Dans cette localité espagnole, la Vierge Marie serait apparue en 1945 à deux jeunes filles, Marcelina Barroso Exposito, dix ans, et Afra Brigido Blanco, dix-sept ans, indépendamment l’une de l’autre. A partir de 1947, on commença à y construire un sanctuaire, qui fut élevé en 2014 au rang de sanctuaire diocésain par l’archevêque compétent de Mérida-Badajoz ;.
A l’Antonianum, le Préfet de la foi a précisé, à l’aide des six niveaux d’évaluation, pourquoi le nihil obstat a été accordé à Medjugorje et aucun des autres niveaux. Le niveau Prae oculis habeatur n’a pas été appliqué parce que les messages de Medjugorje contenaient déjà des « clarifications ». Il a cité un exemple d’un message :
« Pourquoi cherchez-vous des choses extraordinaires, dans l’Evangile il y a tout ».
Abus « mafieux » de Marie contre le pape François
Les recherches menées au cours du dernier demi-siècle ont mis en évidence un problème majeur : le « manque de connaissance véritable de la doctrine catholique sur la Mère du Seigneur », alors qu’elle est la « clé de la compréhension exacte du mystère du Christ et de l’Eglise ». Le Concile Vatican II enseigne que Marie « est le modèle de l’Eglise ».
Cette « méconnaissance » entraîne « aujourd’hui » une rupture entre la pensée de l’Eglise et un « certain marianisme populaire » de certains « groupes et associations » qui, « surtout en Amérique », « utilisent Marie pour diffuser des messages et des usages non conformes au message de l’Evangile et presque toujours fondés sur de prétendues révélations privées ».
Le père Cecchin a critiqué particulièrement sévèrement « la diffusion croissante de phénomènes, de visions, de prophéties qui utilisent la figure de Marie pour attaquer le pape, l’Église, les autorités ecclésiastiques, le magistère, les institutions avec des messages apocalyptiques, non pas pour susciter l’espoir du triomphe du Cœur Immaculé de Marie, mais pour attiser la peur ». Il a qualifié ce phénomène de « mafieux », car il vise à « diviser l’Église ». Il faut se méfier de ceux qui « essaient d’utiliser Marie à leurs propres fins ».
Le mot-clé « mafieux » est surprenant, car le P. Cecchin ne faisait pas allusion à la présence du crime organisé italien en Herzégovine, évoquée un jour par l’archevêque Hoser, premier délégué pontifical pour Medjugorje, mais à des groupes de fidèles. Le choix des mots ne peut sans doute s’expliquer que par le fait que le père Cecchin voulait se montrer particulièrement « bergoglien », puisque le pape François a déclaré que la mafia était un péché (l’un des nouveaux péchés dans le monde par ailleurs apparemment sans péché du pontificat actuel). Cecchin se présente comme le défenseur de François contre les groupes de croyants rebelles et veut manifestement blâmer de manière particulièrement virulente leurs critiques du pape.
Sœur Daniela Del Gaudio, directrice de l’Observatoire international, a expliqué pourquoi Rome se concentre sur « les fruits ».
« Cela nous permet de nous concentrer davantage sur l’impact pastoral que les apparitions mariales ont dans une région donnée, dans une Eglise locale et dans l’Eglise universelle, et donc dans le monde entier ».
Les médias modernes permettent une diffusion rapide et mondiale des « messages » et atteignent « également les non-croyants ». L’Église doit donc s’efforcer de « guider et même d’orienter avec sagesse la dévotion à Marie ». La dynamique des apparitions mariales « montre comment la Vierge Marie parvient à inculturer l’Évangile dans toutes les parties du monde.
Cela favorise, selon le souhait du pape François, un style marial d’évangélisation qui, par la foi, la tendresse et la miséricorde de Marie, est un modèle pour l’Eglise en marche ».