Reprise: j’ai déjà publié en juillet dernier ce formidable « coup de gueule » (je n’aime pas cette expression, mais là…) d’un prêtre italien missionnaire en Afrique, le père Mauro Armanino (*) qui commente la présence de François au dernier G7 en Italie, et décrit mieux que mille discours les contradictions de ce pontificat (qui ne sont des contradictions qu’en apparence, car sans être complotiste, on perçoit un fil rouge de plus en plus épais que seuls les aveugles peuvent ne pas voir).
Tout y passe (de la crise du covid aux courbettes devant les puissants) et tout est dit.
C’est une trahison d’utiliser les visages et le silence des pauvres pour ensuite s’asseoir à la table des riches et des puissants.
(*) Le texte du missionnaire italien (sa photo ci-contre témoigne qu’il ne ‘agit pas d’un de ces prêtres vêtus de dentelles de grand-mère, qui peuplent l’imagination de François et dont il aime se moquer, mais que je n’ai personnellement jamais rencontrés) avait été repris sur le blog de Giorgio Agamben, puis aujourd’hui sur celui d’AM Valli, sous le titre « Le pape, de signe de contradiction à chapelain de cour ».
Je publie dans ma chronique ce texte de Mauro Armanino, missionnaire à Niamey (Niger), une voix d’Église avec laquelle je ne peux qu’être entièrement d’accord.
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Giorgio Agamben (https://www.quodlibet.it/c-u2019-empre-una-prima-volta)
Il y a toujours une première fois
Le 14 juin après-midi, le pape François s’est rendu à Borgo Egnazia, une station balnéaire des Pouilles, en Italie, pour assister au sommet du G7, qui réunit les sept principales puissances économiques du monde. Il s’agit d’une première historique puisqu’aucun pape n’avait jusqu’à présent assisté au G7. (Agence Zenit du Vatican)
Il est difficile de dire quelle est la part d’évangile dans cette présence et quelle est la part de la diplomatie vaticane qui, comme on le sait, apparaît comme l’une des plus éprouvées et des plus clairvoyantes.
Ce qui est néanmoins étonnant, c’est d’abord le fait même que le pape, représentant de l’Église catholique, soit invité à ce type de sommet qui réunit quelques-uns des » puissants » de la politique et de l’économie mondiales.
L’invitation du pape, pour des raisons qu’il n’est pas difficile de discerner, est déjà un signe et un message dont le choix tragique ne peut pas ne pas marquer le présent et l’avenir de la papauté et de l’Église elle-même.
Être invité au sommet de certains des pays les plus riches et les plus puissants de la planète, c’est donner suffisamment de » garanties » au système pour qu’il se perpétue ou du moins qu’il continue à se légitimer.
Accepter l’invitation (ou plutôt la proposition venue du Vatican et acceptée par les diplomates du sommet), comme l’a fait le pape, n’est qu’une énième et pathétique tentative d’accompagner, en tant qu’ « aumônier de cour », le système actuel qui, comme le capitalisme dont il est l’expression, est né et s’est développé sans cœur. N’oublions pas que les membres de ce sommet sont coresponsables ou soutiens de la production, de la vente et de l’utilisation d’armes dans les zones de guerre. Ce sont donc des personnes qui ont du sang sur les mains.
D’autre part, il est apparemment typique de ce pontificat insondable et ambigu de jouer sur tous les fronts avec la même désinvolture éhontée.
Rencontrer et valoriser les mouvements sociaux. Considérer les pauvres comme un élément transformateur du système (selon les leçons bien assimilées de l’Amérique latine). Protéger les migrants dans leur recherche d’un avenir et parler des « périphéries » d’où devraient jaillir un monde nouveau et une Église à l’écoute : tout cela et bien d’autres choses encore étaient à l’ordre du jour, sans oublier les innombrables fois où il a fallu clarifier, rectifier, contredire ce qui avait été dit la veille dans l’un des nombreux discours lus ou improvisés.
Dans le même temps, le pontife lui-même (vrai pont entre des rives différentes) accompagne et célèbre une alliance du Vatican avec le « capitalisme inclusif » dont les membres et les promoteurs comprennent les magnats les plus en vue du capitalisme mondialisé.
Avec la crise manipulée de Covid, le pape actuel a donc touché au pire de ce que l’on pouvait attendre d’un politicien à la petite semaine. L’obligation pour tout le personnel de l’État du Vatican de se faire vacciner sous peine de renvoi sans préavis, l’invitation ferme aux fidèles chrétiens à se faire vacciner « par amour », les rencontres plus ou moins « secrètes » avec le boss de l’industrie de la vaccination, Bourla.
Malgré les dégâts occasionnés et constatés, l’augmentation de la mortalité dans les pays qui ont le plus administré les « vaccins », jamais le pape n’a eu un seul mot de sollicitude pour ceux qui ont souffert de sa ferme invitation à vacciner, encore moins une demande officielle de pardon pour avoir raté le coche. Jamais il n’a demandé vengeance pour le manque de respect des droits de ceux qui auraient pu choisir ou non de se faire vacciner en toute liberté de conscience, comme le soulignent depuis longtemps les documents de l’Église et de la médecine officielle.
La façade « démocratique » de ce pontificat est ensuite contredite par un premier rôle quotidien dans la vie publique, affiché de manière asphyxiante au point de se demander s’il existe encore une conférence épiscopale italienne digne de ce nom. Partout et sur tous les sujets, on attend un mot, une allusion et surtout une confirmation. Même dans les programmes de télévision regardés par un large public où l’on a le droit et le plaisir d’entendre ce que le Pape Bergoglio dit, soutient, propose et surtout ce à quoi il fait allusion.
Et, enfin, la participation y compris physique au sommet du G7 qui comptait d’autres invités de marque, mais pas la Russie et la Chine par exemple. Invité, accueilli et finalement assimilé aux puissants, parmi ceux qui ont le droit d’être présents, entendus et écoutés. Pour parler de l’intelligence artificielle pour laquelle, semble-t-il, le Vatican a assumé un rôle non négligeable et naturellement apprécié.
Une Église comme signe de contradiction pour les empires d’aujourd’hui semble être passée de mode.
S’asseoir à côté du pouvoir en place et en même temps défendre les pauvres soulève des soupçons quant à l’authenticité et à la sincérité de ceux qui jouent pour le public.
Lors du sommet en question, aucun pauvre n’a été invité. Dans un passé pas si lointain, par exemple le G8 à Gênes, il était présenté comme une fierté du sommet d’inviter des personnes de certains pays pour aider à ne pas oublier qu’il y a aussi et surtout un autre monde. Celui auquel le pape fait souvent allusion et qui devient visible dans les guerres, les migrations et les terres rares… à exploiter pour des raisons écologiques bien rappelées par la dernière exhortation, elle aussi à la solde d’une version du monde.
La présence du pape parmi les » grands » du système peine, inquiète et fait honte à ceux qui pensaient que choisir les pauvres et leur voie n’était pas se frayer un chemin parmi les puissants pour devenir leur » aumônier » et finalement leur garant. C’est une trahison d’utiliser les visages et le silence des pauvres pour ensuite s’asseoir à la table des riches et des puissants.