Sur les apparitions mariales dans le village de Bosnie Herzégovine, je n’avais jusqu’à présent pas d’opinion vraiment tranchée, faute d’informations sur cette affaire très compliquée (*) qui dure désormais depuis plusieurs décennies (les premières apparitions remontent à 1981) . Et je n’en ai guère plus aujourd’hui, même et surtout après la récente note du Vatican: ambigüe, soucieuse de ne pas trancher, elle soulève un vrai problème quant à la relation au surnaturel, et à ses vraies motivations; émanant de CE pape, contresignée par l’ineffable Tucho, elle ne peut susciter que la méfiance. Une méfiance confortée par plusieurs témoignages, dont celui-ci, d’une lectrice de Duc in Altum, que je trouve personnellement très émouvant et qui respire la sincérité.

(*) Dans le dernier volet de l’émission « Le Club des Hommes en noir », le Père Danziec, jeune prêtre de la « Génération Benoît XVI », figure du traditionalisme sur les réseaux sociaux et chroniqueur à Valeurs actuelles fait en 5 minutes une chronologie et une synthèse remarquable qui permettent de se repérer un peu dans un labyrinthe d’incertitudes et de perplexité.


Lettre d’Autriche

Comment j’ai ouvert les yeux sur Medugorje

En ce qui concerne Medjugorje, j’aimerais pouvoir décrire mon expérience personnelle, mais la lettre que vous avez publiée à ce sujet [ici] est déjà très complète et très claire. Merci aussi au prêtre pour son analyse impeccable [ici].

Pour ma part, je ne peux que dire que Medjugorje, en tant que phénomène, avec toutes ses annexes et ses à-côtés, m’a causé tant de souffrances et de blessures douloureuses que je ne suis pas encore prête à en parler.

Je vis en Autriche et c’est ici que j’ai connu les différentes entités (toutes charismatiques) liées à Medjugorje, dont j’ai fait partie et avec lesquelles j’ai également fait un pèlerinage.

Je voudrais ici lancer un appel à ceux qui, par la grâce divine, commencent à nourrir des doutes : écoutez-les, renseignez-vous sur les sites officiels du diocèse de Mostar, parlez à quelqu’un… connaître la vérité rend libre !

Sortir d’un système comme celui de Medjugorje, qui a désormais étendu ses puissants tentacules partout, n’est pas facile.

J’ai vu un jour un documentaire dans lequel étaient interviewées des personnes sorties d’une communauté chrétienne que nous, catholiques, appellerions une « secte » : tout ce qu’elles racontaient ressemblait terriblement à ce que je vivais. Vous perdez l’estime de ceux qui venaient toujours chez vous pour manger ou dormir… Vous perdez tout et vous devez repartir de zéro. On reçoit des mots durs, de lourdes condamnations.

Mais aujourd’hui, je suis libre, même si je panse encore mes plaies.

J’aimerais, si vous me le permettez, enlever un seul petit caillou de ma chaussure, celui qui a fait que mes doutes ont vaincu mes peurs.

  • Cathédrale de Vienne, automne 2018 : un spectacle (Jedermann reloaded) qualifié par le diocèse de « programme évocateur au début de l’Avent », organisé par Gery Keszler (créateur de la première Gay Pride autrichienne en 1996) avec le cardinal Schönborn, est à l’antenne. Pendant le spectacle (de mauvais goût), les acteurs sautent littéralement par-dessus les balustrades de la cathédrale, crient, fument et se déplacent d’une manière très peu liturgique autour de l’autel. La cathédrale avec ses espaces sacrés est devenue une scène [ici et ici].
  • Cathédrale de Vienne, automne 2018 : une apparition de Notre-Dame de Medjugorje « passe à l’antenne ». L’événement a fait l’objet d’une publicité efficace sur les sites internet du diocèse et des différents groupes charismatiques gravitant autour de Medjugorje. Au programme : chants, témoignages, catéchèse par Ivan Dragicevic, chapelet, apparition, messe célébrée par le cardinal et adoration eucharistique. Tout est prévu. Cet « événement » est également présidé par le cardinal Schönborn.
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    Après l’apparition, la voyante rapporte que la Vierge était très heureuse et qu’elle a prié de manière spéciale pour tous les prêtres présents, appelant également les familles à vivre dans la sainteté.
  • Cathédrale de Vienne, automne 2019 : Marija Pavlovic-Lunetti a eu son apparition en présence du cardinal de Vienne, Christoph Schönborn, et de milliers de fidèles.
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    Dans une interview accordée au diocèse local et lors d’une émission de Radio Maria, Marija a déclaré qu’il existait une amitié de longue date entre elle et le cardinal Christoph Schönborn, qui s’est renforcée lorsque le cardinal s’est rendu à Medjugorje. Marija décrit ce lien en ces termes : « Je ressens une grande chaleur pour lui. Je remercie Dieu pour cette amitié » […]
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    Nous savons que l’Esprit Saint souffle où il veut et quand il veut, et le cardinal Schönborn se laisse guider par cet Esprit Saint. Le cardinal Christoph Schönborn est aussi un don et une grâce, avec son cœur ouvert et les portes ouvertes de ses églises. Et cela ne va pas de soi, car beaucoup d’autres cardinaux et diocèses sont souvent fermés ou effrayés par la nouveauté ».

Oui, le cardinal Schönborn a vraiment un cœur aussi ouvert que les portes de « ses » églises… en effet, quelques jours après cette apparition programmée, dans cette même cathédrale, en présence du cardinal lui-même, une commémoration, évidemment interconfessionnelle, a été organisée pour les victimes du SIDA, au cours de laquelle la « crème » homosexuelle viennoise s’est produite. Le promoteur de l’événement, aux côtés du cardinal, était en fait Gery Keszler (aujourd’hui marié à sa compagne) et parmi les invités spéciaux figurait l’artiste transgenre Conchita Wurst, qui a également lu une sorte de Notre Père mal prononcé du haut de l’ambon.

Quoi qu’il en soit, cet événement se répète chaque année, détruisant pierre par pierre le caractère sacré du Locus iste, inestimable sacramentum a Deo factus est. Chaque année, même date, même lieu, même parrain : le cardinal Schönborn, l’homme au cœur ouvert et guidé par l’Esprit Saint.

Pourtant, juste à côté de la balustrade foulée par des acteurs à moitié nus, la Vierge de Medjugorje revient elle aussi chaque année pour apparaître, toujours très heureuse, remerciant tout le monde d’avoir écouté son appel et appelant les familles à vivre dans la sainteté.

On peut se demander à qui elle s’adresse. De quelles familles s’agit-il ?

Et tandis que des voyants satisfaits et souriants font des catéchèses devant des milliers de personnes, racontant la joie de la Vierge apparaissant là où d’autres ont accompli des actes pour le moins blasphématoires, nous, parents, nous nous retrouvons à combattre la violence du genre sur nos enfants avec des larmes et du sang. Même un prêtre catholique (un seul) d’Autriche semble avoir été plus attentif que la « Reine de la Paix » et, avec une extrême amertume, a écrit publiquement : « J’ai honte devant Dieu de ce spectacle dans la cathédrale.

Est-il possible que Notre Dame ne remarque pas comment ils traitent l’autel sur lequel son Fils s’immole à chaque messe ?

Déconcertée et blessée, j’ai moi aussi écrit à Radio Maria pour demander des explications, car à chaque fois que j’écoutais ses programmes, il était question de Medjugorje et de ses voyants.

« Comment se fait-il que Marija parle toujours si bien de Schönborn en public, vantant sa ‘sainteté’ malgré ses dérives homoérotiques ? C’est un scandale pour nous, parents, pour nos enfants… ».

Telle était plus ou moins ma question. Et la réponse du Père Livio a été littéralement la suivante : « Parce que Schönborn croit en Medjugorje ».

Point final ! Pas un mot de plus !

Aujourd’hui, je remercie Dieu pour cette gifle retentissante, car elle m’a réveillé et j’ai pu sortir de la boue qui m’étouffait.

  • Cathédrale de Vienne, automne 2021 : Marija est accueillie avec plus de ferveur et de chaleureux applaudissements, car en 2020, à cause de Covid, elle n’avait pu se connecter qu’en ligne. Moi, encore indécise, tiraillée par les doutes et la culpabilité, je décide d’écouter sa catéchèse. Certaines de ses paroles m’ont frappé (je les retranscris mot pour mot) :
  • « Je suis unique et ma vie est précieuse. Je n’ai jamais vu de défaut dans cette Marija, parce que je me suis toujours vue comme une image de Dieu. Je n’ai jamais vu qu’une chose n’était pas à sa place, parce que Dieu m’a voulue ainsi et quand je pense, je dis que ma vie est un don et c’est ainsi que je me vois comme un reflet de Dieu, comme un reflet en petit de la Madone […] Dieu s’est servi de moi pour vous dire que Dieu vous aime à travers la présence de la Gospa et pour cela, je remercie profondément Dieu ».

Vous connaissez ce jeu où il faut relier les points ? Eh bien, à ce moment-là, dans ma tête, j’ai relié les célébrations diocésaines de la gay pride, les sourires suffisants et les homélies homoérotiques du cardinal dans « son » église, les mots et les gestes des voyants (« Je n’ai jamais rien vu qui ne soit pas à sa place, parce que Dieu m’a voulu ainsi ») dans cette même église, jusqu’aux messages émanant de la direction du Vatican… Quel est le schéma ? Quelle image apparaît ?

Le directeur de Missio Austria, le père Karl Wallner, l’un des nombreux enthousiastes de Medjugorje, qualifie ce phénomène de « point chaud de la mission pour l’Europe » et espère que les Viennois (et toute l’Europe) se convertiront parce que, comme il le dit, Medjugorje est le lieu où le « charisme contemporain va au-delà des sacrements ».

Il ne pouvait pas mieux définir : sans le vouloir, il a démasqué, à mon avis, le projet diabolique de remplacer la vraie et unique Pentecôte par la fameuse « nouvelle Pentecôte ». Le diable, c’est bien connu, s’inspire de tout ce que Dieu crée.

Medjugorje est l’apparition parfaite pour la nouvelle Eglise conciliaire qui se renouvelle continuellement en suivant le souffle de l’Esprit. D’après mon expérience, cette église semper reformanda ressemble à des sables mouvants, alors que cette église rigide, ancrée dans la Tradition (selon laquelle la Révélation s’est terminée avec la mort du dernier apôtre), est le rocher qui m’a sauvé des sables mouvants !

Je ne sais pas comment décrire ce que j’ai vécu : dans les groupes que je fréquentais, tous étroitement liés à Medjugorje, j’étouffais dans la boue charismatique.

Les sacrements eux-mêmes sont empreints de sentimentalisme (danses, applaudissements, soupirs, évanouissements, chaînes humaines) et de vedettariat, ce qui ne fait que banaliser, voire annuler, la véritable dévotion à la transcendance.

Maintenant que je suis revenue à l’âge de pierre, en assistant aux sacrements comme mes arrière-grands-parents, je suis sereine et je suis guérie de la dépression qui me détruisait vraiment. Jésus, dans le don de l’Eucharistie silencieuse, nous a laissé le « don des dons », c’est-à-dire tout lui-même, l’Hostie immolée, pour rester avec nous tous les jours jusqu’à la fin des temps (Mt 28, 20).

De nombreux fidèles de Medjugorje, face à mes demandes d’éclaircissement sur des erreurs flagrantes, ont toujours répondu à la manière d’un perroquet, sans jamais commencer à raisonner : « il y a Marie, j’entends Marie. Point final ».

Alors aujourd’hui, après bien des souffrances, je voudrais leur répondre à tous : la Vierge est à l’autel comme une présence réelle, mystique, pendant chaque Messe !

La Vierge est là, réellement présente, contemplant l’Hostie consacrée, fixant les yeux sur le Saint Sacrement et accomplissant des actes d’adoration.

Ce n’est pas moi qui le dis, mais les saints ! Un exemple : saint Padre Pio de Pietrelcina, à ceux qui lui demandaient si la Vierge était présente lors de sa célébration de la messe, a répondu : « Et vous ne voyez pas la Vierge à l’autel pendant la messe ? »

Saint Jean Chrysostome affirme que « tout l’espace autour de l’autel est rempli par les puissances célestes » et s’adressa un jour à un prêtre en ces termes : « Pensez à la personne à côté de laquelle vous vous placez, à la compagnie de laquelle vous invoquez Dieu : à la compagnie des chérubins ! »

Au lieu de suivre les voyants, d’essayer de capter les pseudo-miracles du soleil avec un smartphone, il faut retourner baiser les mains des prêtres après la messe et penser qu’à leurs côtés, pendant la Consécration, plus près encore que les chérubins, il y a Marie !

Si vous voulez entendre Marie, il n’est pas nécessaire d’aller à Medjugorje, il suffit de participer avec crainte et tremblement à une messe célébrée comme Dieu l’ordonne. La Mère de Dieu est là pour nous aider à recevoir Jésus, qui est présent en Corps, Sang, Âme et Divinité, comme en témoigne l’Ange qui est apparu aux enfants bergers à Fatima. Dans la prière qu’il leur a enseignée, en effet, il est récité « …je t’offre le très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ, présent dans tous les tabernacles de la terre… ».

Un appel aux prêtres : avant d’organiser des pèlerinages ou de partir pour Medjugorje, asseyez-vous dans le confessionnal de votre paroisse chaque jour, du matin au soir, comme l’a fait le saint Curé d’Ars. Pendant les Messes, au lieu de concélébrer, soyez disponibles pour les confessions jusqu’au moment de la Consécration, afin que le plus grand nombre possible de fidèles puisse recevoir dignement la Communion. Le confessionnal allumé est un véritable témoignage de la miséricorde de Dieu ! Peu importe que peu de personnes le remarquent au début ! Je comprends que le fait de pouvoir concélébrer des messes bondées de fidèles ou confesser des milliers de personnes, assis sur une chaise au milieu d’un pré, puisse vous donner plus de satisfaction, mais ce n’est pas votre vocation. Dieu vous appelle à sauver les âmes là où vous êtes, dans la clandestinité et avec une persévérance héroïque, en offrant votre vie en holocauste, comme le Christ.

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