(c’est plus fort que lui, il espère ainsi s’attirer la sympathie des médias).
Si l’on veut suivre un tout petit peu l’actualité du Vatican – ce qui n’est pas facile car pour paraphraser le célèbre aria de Rigoletto, « Francesco è mobile » -, il vaut mieux avoir de la mémoire.
Une preuve supplémentaire en a été fournie ces jours-ci par la nomination d’une femme, sœur Brambilla (ou plutôt d’un tandem) à la tête d’un dicastère-clé. Il se trouve qu’il y a tout juste dix ans, lors d’une rencontre avec des religieuses à Turin, le Pape avait rejeté la nomination d’une femme à la tête d’un département comme « fonctionnalisme« , un de ces barbarismes dont il est friand pour désigner des choses qui n’existent pas, sinon dans sa tête.
Apparemment, il a changé d’avis.
Quand c’est le pasteur lui-même qui sème le désordre dans son troupeau…
Commentaire de Luigi Badilla.
Parfois, dans ma vie, j’ai trouvé des religieuses qui avaient une figure « vinaigrée » et ce n’est pas affable, ce n’est pas quelque chose qui aide à attirer les gens. Le vinaigre, c’est moche et les sœurs à la figure de vinaigre, n’en parlons pas !
François, 4 janvier 2025
Discours aux
PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DES SŒURS
DE L’UNION DE SAINTE CATHERINE DE SIENNE DES MISSIONNAIRES DES ÉCOLES
François change d’avis et nomme Sœur Simona Brambilla préfète.
Pour la première fois, une religieuse se trouve dans les hautes sphères du Vatican.
Sa mission est toutefois placée sous le contrôle d’un cardinal pro-préfet.
Luis Badilla
blog.messainlatino.it
13 janvier 2025
Le 6 janvier, en la fête de l’Épiphanie, le pape François a nommé Simona Brambilla, une religieuse italienne de 60 ans, préfète pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique. C’est la première fois dans l’histoire de l’Église catholique qu’un pape nomme une femme « ministre », en l’occurrence une religieuse des Sœurs Missionnaires de la Consolation. En même temps, et il faut le dire tout de suite car c’est un ajout dirimant [dont l’absence constituerait un empêchement absolu] le Pape a nommé le cardinal espagnol Ángel Fernández Artime, ancien recteur des Salésiens, comme Pro-préfet.
Selon la réforme de l’organigramme de la Curie du Pape Bergoglio (Praedicate Evangelium – mars 2022), il y a actuellement 16 préfets, dont 14 ecclésiastiques, plus un laïc et maintenant une religieuse. Rappelons que le canon 129 du Code de droit canonique stipule :
« §1 Ceux qui sont investis de l’ordre sacré, conformément aux dispositions du droit, sont qualifiés pour le pouvoir de gouvernement, qui appartient en propre à l’Église par institution divine et qui est aussi appelé pouvoir de juridiction ».
Un préfet réduit de moitié.
Ce type singulier de nomination, une méthode qui n’est pas nouvelle avec le pape François et qui est déjà appliquée depuis quelques années dans d’autres entités du sommet du Vatican, consiste à diviser les pouvoirs, les fonctions et les responsabilités, afin de séparer l’aspect médiatique de l’aspect réel pour que l’ensemble paraisse en harmonie, même si en vérité les personnes nommées savent qu’elles doivent s’intégrer dans un mécanisme qui impose un contrôle mutuel constant. C’est déjà le cas dans trois autres dicastères et dans la Commission pour l’Amérique latine (CAL).
Avec Sœur Brambilla, une limite spéciale est atteinte. Il ne s’agit pas simplement d’une personne qui assume toutes les responsabilités et d’une autre qui agit en tant que substitut ou proche collaborateur de confiance. Le couple Brambilla-Artime est au contraire une division qui tente d’amortir des doutes et des questions plutôt graves : elle est une femme consacrée, une religieuse, tandis que le cardinal Artime est un presbytre, une personne qui a reçu le sacrement de l’ordre. Il fait partie de la hiérarchie, ce qui n’est pas le cas de la religieuse. Dans ces conditions, le dicastère – avec un préfet réduit de moitié – sera finalement gouverné directement par le pape, seul à pouvoir trancher entre préfet ( religieuse) et pro-préfet ( presbytre).
La question est délicate. Il suffit de regarder ce que dit la Constitution Praedicate Evangelium sur ce dicastère, des articles 121 à 127.
Quand François pensait différemment au sujet de la femme Préfet
Le 21 juillet 2015, à Turin, le pape a rencontré de nombreuses religieuses salésiennes et n’a pas voulu lire le discours préparé, pourtant officiel [sur le site du Vatican].
Dans son allocution a braccio, le souverain pontife a déclaré :
Quand on me demande : « mais ne faut-il pas prendre des décisions plus fortes concernant les femmes dans l’Église ? ». Bien sûr. « Et pourquoi ne nommez-vous pas une chef de dicastère? ». Mais pensez-vous qu’il s’agit d’une décision forte ? C’est du fonctionnalisme. La femme dans l’Église a le même travail, pour ainsi dire, que celui qu’elle avait avec les apôtres le matin de la Pentecôte.
L’avenir dira le vrai. Pour l’heure, le pape François recueille les applaudissements de la presse et ajoute une nouvelle médaille à sa carrière de réformateur.
Quand le premier laïc de l’histoire de l’Église, Paolo Ruffini, a été nommé préfet pour la communication, les critiques au sein de la nomenklatura vaticane ont été nombreuses et acerbes. Le pape a tenté d’atténuer le problème en nommant un assistant ecclésiastique (aux côtés de Ruffini), pour contrebalancer le fait d’être laïc. Il le fit en la personne d’un prêtre, écrivain, journaliste et théologien, Luigi Maria Epicoco, qui fut également nommé – chose très rare – « éditorialiste » à l’Osservatore Romano. Au bout de deux ans, 2021 – 2023, Epicoco a disparu des organigrammes respectifs, sans aucune explication, et aucun remplaçant n’a jamais été nommé.
François “Il Picconatore” [le cogneur].
Près d’un an et demi après sa promulgation précipitée, dans la frénésie et le laisser-aller, la Constitution apostolique Praedicate Evangelium, élaborée durant 9 ans, dans le but de réformer l’organigramme curial, a été progressivement démantelée par ce même Pape François qui l’avait tant voulue.
Rien de nouveau. On l’a déjà vu. Le pontife argentin a toujours été un “Picconatore”. On l’a dit de lui il y a de nombreuses années en Argentine. Le pape Bergoglio, dans l’exercice du pouvoir (grand ou petit), a toujours imposé sa volonté comme un “Picconatore” et jamais, même pas aujourd’hui sur le trône de Pierre, personne n’a eu la capacité, la lucidité et le courage de lui signaler ces erreurs qui ont rendu incompréhensibles beaucoup de ses actions.
Le pape François et les femmes. Le défaut se trouve dans le système ecclésiastique
La théologienne bibliste Giulia Lo Porto analysant les paroles du Pape à Turin le 21 juin 2015, quelques jours plus tard [après la rencontre avec les religieuses salésiennes à Turin] a écrit des réflexions qui aujourd’hui, presque dix ans après la visite du Saint Père et surtout après la nomination de Sœur Brambilla, acquièrent une dimension différente : « la vraie question n’est pas de savoir s’il est approprié ou non d’inclure des femmes dans les mécanismes de la Curie romaine, mais plutôt le sens et le rôle de ces mécanismes eux-mêmes ».
(…)
[Ici, l’auteur mentionne les femmes qui occupent actuellement des postes de premier plan au Vatican, elles sont au nombre de 12, parmi elles, la Française Nathalie Becquart, Secrétaire du Synode des évêques]
Le Pape : « Les sœurs avec une figure de vinaigre, c’est moche, elles ne sont pas affables ». Encore des vannes de bar ?
Le samedi 4 janvier, au cours d’une audience accordée aux participants du Chapitre général de l’Union Sainte Catherine de Sienne des Missionnaires de l’École, le Pape François a prononcé un discours intéressant avec des réflexions qui peuvent s’appliquer à la vie des religieuses à travers le monde. Parmi ces pensées, et des citations de saint Jean-Paul II, malheureusement, comme cela arrive ponctuellement lorsque François rencontre des religieuses, on n’a pas échappé aux phrases douteuses et aux plaisanteries habituelles du pape « sympa », véritables chevaux de bataille bergogliens.
Voici le passage du discours:
Votre Fondatrice a proposé trois attitudes, que saint Jean-Paul II a résumées comme suit : “L’engagement constant pour sa propre sanctification, une préparation théologique et professionnelle sérieuse, et un style de vie affable et aimant envers tous, en particulier les jeunes” . Ce « style de vie affable et aimant », ça me plaît bien. Parfois, dans ma vie, j’ai trouvé des religieuses qui avaient une figure « vinaigrée » et ce n’est pas affable, ce n’est pas quelque chose qui aide à attirer les gens. Le vinaigre, c’est moche et les sœurs à la figure de vinaigre, n’en parlons pas ! En résumé : sainteté, préparation et affabilité. C’est ce que je vous demande
.
(Discours du Pape, 4 janvier 2025)
La question qui se pose dans ce cas, comme dans tant d’autres similaires depuis 2013, est directe : mais quel besoin le Saint-Père a-t-il de prononcer ces phrases banales et hors de propos, et le plus souvent offensantes ? En lisant la presse italienne en ligne samedi dernier, il semblerait que l’insulte de François ait été ajoutée à l’allocution pour attirer l’attention des médias. Mais quel est le rapport avec le magistère de l’évêque de Rome ?
Sœur Roberta Vinerba, théologienne franciscaine, commentant les paroles du pape dans La Repubblica du 4 janvier, rappelle que l’appel de François s’adresse aux femmes religieuses et à tous les chrétiens à vivre la joie chrétienne. La religieuse estime cependant que le ton des expressions papales est « un peu sec, direct, familier » mais que le Pape a « le mérite de se faire comprendre ».
On peut demander à la théologienne : mais faut-il vraiment pour cela faire des blagues de bistrot ?
Certes, le pape a été videur dans sa jeunesse, mais les temps ont changé, pour lui et pour l’Église.
Luis Badilla