Plaidoyer de The Wanderer pour la messe traditionnelle (entre autre).
Qu’on le veuille ou non, l’élection de Donald Trump a signé un basculement, et pas seulement géopolitique, ou économique, ou même sociétal, dans la marche du monde: en témoigne visiblement l’adoration eucharistique, il y a deux semaines, à Mar-a-lago, la résidence privée de Donald Trump.
Les dernières décisions de la hiérarchie de l’Eglise, à commencer par le surréaliste et surtout chaotique « chemin synodal » engagé par la CEI sous l’égide des autorités vaticanes et en l’absence du pape, semblent prouver que l’Eglise persiste à se retrancher dans le monde ancien (ancien dans tous les sens du terme, car les derniers défenseurs de l’idéologie post-Vatican II ont plutôt des têtes chenues…).
Que se passerait-il si les évêques synodaux donnaient la liberté à des rassemblements [comme celui de Mar-a-lago] ? Quelle serait l’impression sur les catholiques, et sur le monde, si une centaine de prêtres se réunissaient dans un monastère, chacun célébrant sa propre messe privée en même temps ?
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Comme l’a dit le cardinal Ratzinger lorsqu’il a visité Fontgombault et vu ce même spectacle : « C’est l’Église catholique ». Le sensus fidelium dirait la même chose, sensus auquel les évêques ont renoncé.
Les évêques ne le voient toujours pas
Ces derniers mois, j’ai consacré quelques articles à commenter la résistance ou l’aveuglement de certains à reconnaître que nous vivons un changement d’époque, ce qui, dans le langage de Javier Milei, se dit: “No la ven” (ils ne le voient pas). Je ne sais pas combien de temps il durera (des mois, des années, des décennies ?) ni quelle sera sa profondeur, mais ce qui est certain, c’est que l’Occident est en train de voir un changement. Et ce qui est également certain, c’est qu’au Vatican, on est réticent à voir ce changement. Oui, le Vatican ne le voit pas.
Sandro Magister, dans son article de la semaine dernière [La rébellion des masses contre l’idéologie « woke » a valu la victoire à Trump] a fait référence à ce fait. Il cite les propos d’un certain nombre d’hommes politiques italiens progressistes, aujourd’hui vieux, qui reconnaissent qu’ils sont allés trop loin. Et que l’exagération des politiques progressistes a eu pour conséquence négative – pour eux – que le monde « régresse » vers des positions plus à droite. Nous assistons, comme le dit l’un d’entre eux, à une « rébellion des masses » contre les élites culturelles de la gauche.
La même chose se produit-elle dans l’Église ? Théoriquement, nous devrions répondre par la négative. En fait, aucun géronte revêtu de pourpre et protagoniste de la débâcle post-conciliaire ne reconnaît qu’elle a échappé à tout contrôle. Bien au contraire. Il suffit de lire les déclarations, les documents et les dispositions qui émanent quotidiennement de la colline vaticane pour se rendre compte qu‘ils accélèrent, même lorsqu’ils savent qu’un précipice s’ouvre devant eux.
L’une des dernières décisions en date, par exemple, est celle du cardinal Tucho Fernandez, préfet du dicastère pour la doctrine de la foi, d’inclure une de ses conférences dans le corps doctrinal de l’Église. D’après ce que nous avons appris [cf. Fernandez et le changement de sexe. « Non, mais … » (autrement dit « oui, patience… »)], l’Église accepte désormais les opérations de changement de sexe. S’agit-il d’une dysphorie du cardinal Fernandez ou de l’expression d’un désir ?
Ce qui est certain, c’est qu’ en raison de sa structure hiérarchique, nous ne pouvons pas savoir s’il y a ou s’il peut y avoir une « rébellion des masses » dans l’Église. Les évêques ont le pouvoir et le pape détient le pouvoir absolu ; la rébellion est impossible car ceux qui se rebellent sont immédiatement écartés du troupeau. L’Église synodale, comme nous le savons tous, n’est rien d’autre qu’un récit pour les imbéciles. Et nous en avons des exemples tous les jours : de l’évêque Strickland au père Alexander Gwerder [prêtre argentin qui célébrait la messe traditionnelle, expulsé de sa paroisse en janvier dernier: le Dicastère pour le Clergé l’a démis de l’état clérical pour des crimes contre « l’obéissance et la communion »]. Tant qu’il n’y aura pas de changement épiscopal, ce qui est très difficile à réaliser, les mitrés resteront les yeux fermés.
Cependant, des événements particuliers apparaissent ici et là dans la géographie de l’Église, qui peuvent être considérés comme des tests, c’est-à-dire comme une manière de savoir ce qui se passerait si la hiérarchie abandonnait ses amours avec les progressismes de tout poil et accordait aux prêtres et aux fidèles la possibilité de vivre librement leur foi au rythme de la tradition.
Dans plusieurs pays, surtout dans l’hémisphère nord mais pas seulement, les dispositions de Traditionis custodes ont été largement ignorées et la messe traditionnelle est toujours célébrée quotidiennement ou le dimanche dans les églises paroissiales. C’est le cas depuis au moins 2008. Dans ces cas, la messe de Paul VI coexiste pacifiquement avec celle de saint Pie V et, fait intéressant, la messe traditionnelle connaît généralement un succès numérique bien plus important que la messe réformée. Les jeunes et les jeunes familles choisissent invariablement la messe en latin, ce qui indique qu’au fil des années et si l’Église était aussi synodale qu’elle le prétend, la messe en latin l’emporterait sur la messe réformée, qui tendrait à disparaître.
Prenons un autre cas. Il existe plusieurs ordres religieux et congrégations, pour la plupart progressistes depuis les années 60, qui ont des provinces plus classiques ou traditionnelles. Le résultat est indéniable : alors que les maisons religieuses progressistes sont habitées par des vieillards et que, si un jeune y entre, ce sera certainement le borgne ou l’homosexuel de la paroisse, les couvents des provinces plus conservatrices sont remplis de prêtres et d’étudiants jeunes, sains et normaux. Je ne mentionne qu’un seul cas, car il est largement connu: la province dominicaine de Saint-Joseph, province orientale, aux États-Unis.
Contrairement au reste de l’ordre, ils regorgent de vraies vocations bien qu’ils soient « rigides et pélagiens ». Ce sont d’ailleurs eux qui ont sauvé l’Angelicum – l’université romaine qui entendait autrefois dans ses salles de grands maîtres comme Garrigou-Lagrange, Gonzales Arintero ou Jacinto Cormier -, de la médiocrité dans laquelle elle était tombée à partir des années 1990. Elle l’a même sauvée de la ruine financière car, en reprenant la plupart des chaires anglophones, elle a attiré des étudiants religieux et laïques du monde entier qui veulent apprendre la philosophie et la théologie thomistes, et qui paient pour cela. La « théologie du peuple » du pape François et de Tucho Fernandez n’attire qu’une poignée de gens, et cela ne suffit pas à faire vivre une université.
Un dernier cas. Le 19 mars de cette année, coïncidant avec la solennité de saint Joseph, un événement intitulé « Prière catholique pour l’Amérique » s’est tenu à Mar-a-Lago, la résidence du président Donald Trump à Palm Beach, en Floride. Organisé par Catholics for Catholics, la cérémonie a réuni une centaine de prêtres et de nombreux laïcs afin de prier pour le président Trump et la nation. Parmi les intervenants figuraient l’évêque Joseph Strickland, ancien évêque de Tyler (Texas), le père Richard Heilman, la militante pro-vie Jean Marshall et le commentateur catholique Taylor Marshall.
Au cours de la cérémonie, Mgr Strickland a dirigé l’adoration du Saint-Sacrement dans le hall principal de Mar-a-Lago.
Ce qui est intéressant, c’est que tous les prêtres et fidèles présents étaient, pour le moins, très conservateurs. Je connais plusieurs prêtres qui y sont allés et qui ne célèbrent que la messe traditionnelle.
Que se passerait-il si les évêques synodaux donnaient la liberté à de tels rassemblements ? Quelle serait l’impression sur les catholiques, et sur le monde, si une centaine de prêtres se réunissaient dans un monastère, chacun célébrant sa propre messe privée en même temps ?
Comme l’a dit le cardinal Ratzinger lorsqu’il a visité Fontgombault et vu ce même spectacle : « C’est l’Église catholique ». Le sensus fidelium dirait la même chose, sensus auquel les évêques ont renoncé.
Le problème des évêques qui ne veulent pas voir, qui nient l’évidence par idéologie, qui préfèrent la mort des ordres religieux et des fidèles plutôt que de renoncer à leurs postulats conciliaires, c’est qu’ils emportent l’Église avec eux. Et cela n’est pas gratuit. Nous le payons.