Disons-le tout de suite: l’attitude qui consiste à rejeter en bloc un pape avant de le connaître, n’est pas tenable, en tout cas, ce n’est pas la mienne.
Voici pour commencer l’éditorial « à chaud » de Marco Felipe Perfetto, directeur du blog Silere non possum, dont les différents rédacteurs ne sont pas forcément sur la même ligne, mais qui a été globalement très critique avec François. Il est totalement conquis.

Léon XIV : la caresse de Dieu pour son Église

silerenonpossum.com/it/editoriale-elezioneleonexiv/
8 mai 2025

L’élection du pape Léon XIV est un signe limpide, et même désarmant, que le Seigneur n’abandonne jamais son Église. Dans les heures qui ont précédé l’annonce, entre hypothèses, manœuvres, craintes et tentatives de prédiction, personne ne semblait imaginer qu’un nom comme celui de Robert François Prévost pourrait émerger de ce Collège. Et pourtant, nous voici remplis d’étonnement et, en même temps, de paix. C’est le signe que vraiment, comme nous le rappelle saint Augustin, « vous, Seigneur, êtes plus intime avec moi que je ne le suis moi-même ».

L’Esprit Saint semble parfois nous laisser errer dans nos pensées, dans nos projets humains. Mais il intervient alors. Et il le fait avec cette puissance qui « nous saisit par les cheveux », pour nous ramener en arrière avant que nous ne tombions complètement. Cette élection ressemble à l’une de ces scènes où la main de Dieu se tend et, avec une décision paternelle, nous remet sur la bonne voie.

Le pape Léon XIV a salué l’Église avec des mots simples et puissants : « La paix soit avec vous tous ». C’est la salutation du Ressuscité, la première salutation du Maître à ses disciples effrayés. Ce n’est pas un souhait générique, ce n’est pas une utopie désincarnée. C’est l’annonce vivante d’une réalité : le Christ est ressuscité, et sa paix, désarmante et désarmée, est déjà à l’œuvre dans le monde. Le Saint-Père nous a rappelé que cette paix est pour tous, que personne n’est exclu de l’amour de Dieu et que le mal ne prévaudra pas. Dans ces mots se trouve le cœur de l’Évangile, mais aussi un rappel concret de l’urgence que nous avons, en tant qu’Église, à redécouvrir notre mission.

Léon XIV s’est présenté comme un « fils de saint Augustin », et ce n’est pas un détail pittoresque. C’est une clé d’interprétation. Augustin, en effet, n’était pas seulement un géant de la pensée : c’était un pasteur consumé par le feu de l’amour de la vérité et de son peuple. Il disait : « Avec vous je suis chrétien, pour vous je suis évêque ». Et c’est avec ce style que le nouveau pape a choisi de commencer son pontificat : avec humilité, avec clarté, avec une autorité qui vient de l’enracinement dans le Christ et non de la frivolité.

Nous ne pouvons ignorer la providence de ce choix. Prévost est un canoniste, donc un homme de justice, de mesure, de fidélité à la forme ecclésiale. Mais c’est aussi un homme doux, un religieux, un pasteur qui connaît les besoins de ses prêtres, de l’Église. Il a vécu la mission, la vraie mission. Il a été attentif aux vocations, dans ces lieux. Il est entré à la Curie en 2023, un temps pour y voir clair, sans en être prisonnier. Il n’a pas eu le temps de s’attacher aux centres de pouvoir, mais il a eu assez de temps pour savoir, pour comprendre, pour discerner.

Sous le pape François, Prévost a souvent dû se taire. Les évêques étaient choisis par le pape lui-même. Mais aujourd’hui, cette même patience – vertu si augustinienne – devient une richesse. L’homme qui a su attendre le moment de Dieu est maintenant appelé à diriger. Cette élection ouvre une nouvelle saison pour l’Église.

Une saison qui met au centre le Christ Jésus, son Église, qui fait face aux problèmes, bien sûr, mais qui est consciente que la première mission est d’annoncer l’Évangile.

Une saison où l’on place à nouveau la Justice au centre.

Un retour au travail missionnaire concret, et non des slogans pour se faire aimer.

De la charité qui devient une vraie proximité avec les presbytres, les évêques.

Des normes aimées, et non pas craintes ou ignorées.

Une saison où l’Évangile redevient ce qu’il est : la force qui sauve l’homme.

C’est aussi un message pour l’Église elle-même, souvent déchirée par des contradictions internes. La paix du Christ est nécessaire non seulement dans le monde, mais aussi entre nous, dans l’Église. Léon XIV a rappelé la valeur de la synodalité, celle qui prend en compte tous les hommes, et a également placé Jésus-Christ au centre, comme unique Seigneur et unique Pasteur. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons vraiment être une Église qui marche, et non un Parlement à la recherche de compromis.

Il a confié son ministère à la Vierge, le jour même de la supplication à Pompéi [cf. ICI]. C’est un geste qui parle d’une foi à genoux, vécue au quotidien. Dévotion à Marie ! Une Église consciente de ce qu’elle est peut parler au cœur de l’homme moderne. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer avec certitude que l’Église est entre les mains de Dieu. Peut-être l’ai-je moi-même parfois oublié.

L’élection de Léon XIV nous le rappelle avec force et douceur à la fois. C’est comme une caresse du Seigneur, qui ne nous laisse pas manquer de ce dont nous avons besoin. Il n’y avait pas de meilleur choix. Et peut-être, humainement parlant, avions-nous même oublié qu’un tel choix était possible. Mais l’Esprit Saint est là. Toujours. Et il agit. Malgré nous, et précisément pour nous.

Marco Felipe Perfetti
Silere non possum

Share This