Giuseppe Nardi analyse le discours adressé par Léon XIV le 21 juin dernier aux parlementaires à l’occasion du Jubilé des pouvoirs publics. Et il le fait en soulignant non pas tant les propos effectivement prononcés par le pape que les non-dits, c’est-à-dire ceux que son prédécesseur aurait immanquablement prononcés en ces mêmes circonstances.
Bref, il y a du changement, derrière les murs léonins. Et en bien.

Jubilé des gouvernants

Léon XIV met les choses au clair :

IA, persécution des chrétiens, droit naturel – plutôt que climat et migration

Samedi 21 juin, le pape Léon XIV a reçu des représentants du gouvernement et d’autres décideurs politiques à l’occasion du Jubilé des gouvernants de l’Année sainte. Ce moment hautement politique a révélé de manière significative la nette démarcation avec son prédécesseur immédiat, François.

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Léon XIV n’a pas accordé de place à l’inquiétant changement climatique « d’origine humaine » ni à l’indéniable migration de masse d’origine humaine.

Il n’a pas suggéré aux gouvernants de mettre leurs citoyens sous tutelle pour de soi-disant « objectifs supérieurs », et ne leur a pas demandé d’agir contre leurs intérêts intrinsèques.

Au contraire, le pape est allé bien au-delà et a appelé les responsables à s’orienter à nouveau vers le droit naturel – ce fondement qui est à la base de l’ordre humain. Et il a exhorté à ne plus ignorer les chrétiens persécutés dans le monde.

Par cette attitude, Léon XIV se rattache – en ignorant délibérément son prédécesseur – à la ligne des papes pour lesquels le droit naturel a toujours été le pilier de la cohabitation humaine. Son rappel de saint Thomas More, qu’il présente aux gouvernants comme modèle – cet homme qui a préféré donner sa vie plutôt que de trahir la vérité – en est également l’expression.

Ce discours de poids se nourrit de deux sources : de ce que Léon XIV a dit – et de ce qu’il a sciemment tu.

Car ce que son prédécesseur aurait dû dire est souvent resté inexprimé – et c’était la plupart du temps exactement ce qui aurait été nécessaire.

Léon XIV, en revanche, s’est exprimé clairement, et il s’est tu là où un pape ne devait pas nécessairement parler.

Il ne s’est pas perdu dans des sujets secondaires qui peuvent intéresser les élites mondiales parce qu’ils les aident à maximiser leur pouvoir et leur capital – mais pas pour le bien de tous. Pour Léon XIV, le prétendu « état d’urgence climatique » ainsi que le prétendu droit inconditionnel à la migration n’étaient pas des sujets Les points fixes qui avaient marqué le pontificat de son prédécesseur n’ont pas trouvé d’écho chez lui.

Dès le début de son pontificat, Léon XIV a mis à l’ordre du jour un sujet nouveau, mais néanmoins porteur d’avenir : l’intelligence artificielle. Il a mis en garde contre une déshumanisation des processus de décision et a réclamé un cadre éthique pour son utilisation. Sa devise n’était pas le rejet, mais la vigilance : L’IA, selon Leo, ressemble à un véhicule qui doit être maintenu sous contrôle – sinon, en cas de vitesse excessive, il quitte la route et se renverse.

Pour le journaliste Antonio Socci, cette comparaison imagée a rappelé François. Selon Socci, la conduite risquée décrite par Léon était celle de son prédécesseur. François, lui, n’aurait pas caché sa préférence pour une « Eglise blessée » – ce que Socci interprète de manière ironique comme une crise de l’Eglise « accidentée » – d’origine humaine, justement.

Les petits pas visibles du retour que Léon XIV accomplit au sein de l’Église ne restent pas sans effet. De nombreux fidèles ressentent pour la première fois depuis longtemps le sentiment d’être chez eux. Alors qu’ils s’étaient sentis aliénés lors du précédent pontificat, cette absence de patrie qui en poussait tant d’autres à s’éloigner intérieurement semble désormais s’estomper.

Pour la première fois, Léon XIV a remis la liberté de religion pour les chrétiens au centre de son discours. Un thème longtemps ignoré doit désormais faire à nouveau partie de l’agenda politique. Il a rappelé les horreurs qui ont eu lieu lorsque l’Etat islamique, hautement équipé avec l’aide de l’Occident, a soumis de vastes régions d’Irak et de Syrie, assassiné et chassé les chrétiens – alors que l’Occident n’a guère trouvé de mots pour exprimer sa solidarité. On n’a pas oublié : Chaque fois que l’Occident est intervenu militairement au Proche-Orient, le nombre de chrétiens a diminué de moitié – ces chrétiens qui avaient auparavant survécu à des siècles de domination islamique. Il semble presque inutile de préciser qu’aucune de ces interventions depuis 1945 n’a jamais été faite dans l’intérêt des chrétiens – et encore moins en leur faveur.

Léon XIV a expressément rappelé le récent massacre au Nigeria, au cours duquel deux cents chrétiens ont été sauvagement assassinés à Yelwata. Il a souligné qu’il fallait prier de manière particulière pour les chrétiens de l’État de Benue au Nigeria, des personnes qui sont sans cesse victimes d’actes de violence. Il a clairement écrit cette intention aux hommes politiques.

Quelques jours auparavant, Léon XIV avait autorisé le Dicastère pour les Causes des Saints à publier le décret de canonisation de 175 martyrs – des chrétiens tués au XXe siècle en haine de la foi. Des signaux clairs.

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