L’appel a été rejeté par le Tribunal du Victoria. A noter: la réaction très « en retrait » (‘c’est une litote!) de la hiérarchie de l’Eglise, tant en Australie qu’à Rome

J’attendais hier avec impatience le résultat de l’appel déposé par le cardinal contre sa condamnation en première instance à six ans de prison pour faits de pédophilie. Evidemment, je suis déçue, et triste, que la condamnation ait été confirmée. Si je n’en ai pas parlé hier, c’est parce que beaucoup l’ont fait, et qu’il n’y a malheureusement pas grand chose de plus à dire (voir en particulier yvesdaoudal.hautetfort.com)
Ce que je retiens, c’est la trahison (même si le mot peut paraître un peu fort, il n’est que le triste reflet de la réalité) de l’Eglise institutionnelle, tant locale qu’à Rome, qui a capitulé sans condition devant la justice des hommes, s’abritant hypocritement derrière « la solidarité avec les victimes » (présumées!): que n’y a-t-elle pensé plus tôt!
Trahison bien résumée ici – en lisant entre les lignes pour interpréter correctement l’adverbe prudemment.

Le Vatican a réagi prudemment mercredi au rejet par un tribunal de Melbourne de l’appel introduit par le cardinal australien George Pell de sa condamnation pour abus sexuel sur mineur.
« En réitérant son respect pour le système judiciaire australien, assuré le 26 février lors de l’énoncé du jugement en première instance, le Saint Siège prend acte de la décision du tribunal de rejeter l’appel déposé par le cardinal Pell », a déclaré le porte-parole du Vatican, Matteo Bruni, dans un communiqué. « Le Saint Siège se tient, ainsi que l’Eglise d’Australie, aux côtés des victimes d’abus sexuels et confirme son engagement à poursuivre, par le biais des autorités ecclésiastiques compétentes, les membres du clergé qui se sont rendus coupables de tels faits ».

www.levif.be

Le cardinal va avoir besoin de notre soutien.
Pour mémoire, je reproduis encore une fois l’adresse où l’on peut lui écrire… en principe (si tant est qu’il reste dans la même prison):

George Cardinal Pell,
Melbourne Assessment Prison,
317-353 Spencer St.,
West Melbourne, 
VIC 3003
Australia


Pell laissé seul par l’Église, mais les fidèles avec lui

Nico Spuntoni
NBQ
22 août 2019
Ma traduction

La Conférence épiscopale australienne accepte la sentence de l’appel qui condamne le cardinal et souligne l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Solidarité avec les victimes d’abus, mais aucune mention de la condition du cardinal qui continue à se proclamer innocent et qui ne peut même pas célébrer la messe en prison. Pour le soutenir derrière les barreaux, il y a en revanche un mouvement populaire. Auquel se joint même l’un des trois juges de Victoria en désaccord avec la sentence.

La Cour d’appel de Victoria a rejeté à la majorité – mais pas à l’unanimité – l’appel interjeté par le cardinal George Pell contre la peine de première instance qui l’avait condamné à six ans de prison pour abus pédosexuels. L’ancien Préfet du Secrétariat à l’Economie du Vatican a fait savoir qu’il était déçu du verdict prononcé par la juge suprême Anne Ferguson, mais il continue de se proclamer innocent. Son équipe d’avocats, quant à elle, examine les dossiers pour envisager d’interjeter appel devant la Haute Cour australienne. Les avocats n’ont plus que 28 jours pour franchir cette dernière étape.

Entre-temps, la confirmation de la condamnation du cardinal a été saluée par la Conférence épiscopale australienne avec une note encourageant l’acceptation de la sentence et soulignant l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Dans le communiqué, signé par le Président, Mgr Coleridge, les évêques tiennent à faire savoir que ce processus provoque la douleur de toutes les victimes des abus perpétrés par des prêtres, réaffirmant leur intention de travailler pour que les églises deviennent un lieu toujours plus sûr pour les mineurs. Le document ne fait cependant aucune mention de la condition du cardinal qui continue de se proclamer non coupable.

En Australie, comme dans le reste du monde, un mouvement d’opinion s’est créé, convaincu de son innocence. C’est à eux que Pell a voulu exprimer ses pensées et sa gratitude immédiatement après avoir pris connaissance de la réponse de la Cour de Victoria. Le procès du plus important prélat du pays a suscité un énorme intérêt dans l’opinion publique nationale, divisant la communauté nationale d’une manière presque viscérale. La crainte des ‘innocentistes’ est que le cardinal puisse devenir une sorte d’ « agneau sacrificiel » qui doit expier les péchés de l’Église catholique dans le scandale des abus.

Un danger contre lequel a mis en garde Peter Kidd lui-même, le juge qui avait prononcé la condamnation de première instance à six ans et qui, malgré cela, avait appelé à ne pas considérer le cardinal comme « le bouc émissaire de chaque échec perçu de l’Eglise catholique ».
L’appel rejeté par la Cour d’appel de Victoria revenait sur le « caractère déraisonnable de la motivation » qui, selon l’équipe d’avocats de la défense, était à la base du verdict de culpabilité prononcé en première instance. Les abus présumés ont été commis à deux reprises, entre 1996 et 1997, et deux enfants de chœur de la cathédrale St Patrick de Melbourne en ont été victimes.

La première plainte remonte à juin 2015 et n’a été déposée que par l’un des deux parce que l’autre était mort entre-temps. Ce dernier, cependant, avait démenti à sa mère en 2001 avoir été molesté par le cardinal dans les années où il était enfant de choeur. L’accusation est donc fondée sur le témoignage du plaignant, contesté par Pell. En raison du type d’appel présenté par les avocats (les motifs initiaux étaient au nombre de trois, mais deux autres – de nature procédurale – ont été rejetés), on a demandé à la Cour d’appel d’évaluer si la preuve examinée par le jury était crédible hors de tout doute raisonnable pour condamner l’accusé.

Sur ce point, il n’y a pas eu unanimité des trois juges: pour Mark Weinberg, contrairement à ses collègues Anne Ferguson et Chris Maxwell, le plaignant était « enclin à embellir des aspects » de son histoire, notant que celle-ci n’était pas exempte de « contradictions » et « d’insuffisances ». Selon Weinberg, en outre, ce n’est pas seulement le caractère criticable de ce témoignage qui se heurte à la question du « caractère déraisonnable de la motivation » avancée par la défense, mais c’est aussi la reconstruction des deux épisodes présumés criminels qui semble par moments invraisemblables.

À son avis, il y aurait donc une possibilité réelle qu’une personne innocente se retrouve derrière les barreaux. La défense avait mis l’accent sur la reconnaissance de l’impossibilité d’exécuter les faits contestés tels que racontés par le plaignant, se référant aux déclarations du cérémoniaire et du sacristain de l’époque selon lesquelles il aurait été « physiquement impossible » pour le cardinal de se livrer à l’agression dans un délai aussi court, se libérant avec facilité des lourds vêtements liturgiques qu’il portait.

Mais les juges Ferguson et Maxwell ont rejeté la thèse de l’impossibilité physique, considérant que le jury avait respecté le principe de l’absence de doute raisonnable dans son jugement de culpabilité. Les différentes condamnations des trois juges ont mûri après onze semaines au cours desquelles les toges ont été appelées à lire les quelque 2000 pages relatives au procès de première instance et à se rendre en personne à la Cathédrale Saint-Patrick, lieu des violences présumées.

Que va-t-il arriver au cardinal Pell ? Il n’est pas si évident que l’on aille jusqu’au recours à la Haute Cour, puisque celle-ci ne s’occupe généralement pas de réexaminer les preuve sur lesquelles le jury et la Cour d’appel ont déjà statué. En attendant, l’ex-trésorier du Vatican, après avoir entendu le verdict dans la salle d’audience, est retourné à la prison de Melbourne d’où il ne pourra sortir qu’en octobre 2022 en cas de bonne conduite.
Une source proche de lui a révélé à La Nuova Bussola Quotidiana que le cardinal est très serein et vit cette dure expérience comme une épreuve à offrir à Dieu. Depuis son entrée en prison, Pell a maigri, mais son état de santé est bon, il reste isolé pour des raisons de sécurité et se félicite de l’existence d’un vaste mouvement d’opinion convaincu de son innocence. Toutefois, il ne peut toujours pas célébrer la Sainte Messe, mais il se sent encouragé par la conscience des nombreuses prières récitées pour lui chaque jour.

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