Huit membres de l’Académie catholique française ont produit une contre-étude qui démonte pièce par pièce le rapport de la Commission Sauvé. Et ils dénoncent « un travail réalisé avec partialité et idéologie par hostilité à l’Eglise« . Mais dans l’opinion, le mal est fait: « calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ». Le dégonflage rigoureux des chiffres aberrants et l’évidence des failles de la méthode utilisée n’y changeront rien. Analyse de Luca Volontè sur la NBQ.

Un contre rapport démonte l’emphase accordée aux abus dans l’Eglise

Luca Volontè
La NBQ
30 novembre 2021
Ma traduction

Huit membres éminents de l’Académie catholique de France ont produit une contre-étude qui démonte pièce par pièce le rapport de la Commission Sauvé sur les abus commis par des clercs et des laïcs dans les structures cléricales françaises. Ils parlent de chiffres gonflés (pas 330 000 mais entre 4 000 et 27 000). Et ils attaquent : « Un travail réalisé avec partialité et idéologie par hostilité à l’Eglise ». En attendant, le Pape annule l’audience avec Sauvé.

Huit membres éminents de l’Académie catholique de France, dont son président Hugues Portelli, démontent le rapport sur la pédophilie dans l’Église de France au moment même où le pape renonce à rencontrer avant Noël Jean-Marc Sauvé le président de la commission CIASE .

Le soupçon, avancé aussi par La Bussola, d’une volonté d’humilier l’Église, en la faisant chanter pour qu’elle accepte n’importe quelle « solution » émanant de l’assemblée laïque, est plus que confirmé. Selon deux articles, celui de Cécile Chambraud dans Le Monde du 26 novembre et celui de Jean-Marie Guénois dans Le Figaro du 27 novembre, le document des huit membres de l’Académie catholique de France, bien que n’étant pas un document officiel de cette instance, a déjà joué un rôle décisif pour inciter le Pape à reporter l’audience prévue le 9 décembre avec le Président Jean-Marc Sauvé et toute l’équipe de la CIASE.

Le texte de 15 pages, très critique à l’égard du travail de la CIASE, a été envoyé au président des évêques de France, au nonce et à Rome. Les 15 pages sont une démolition point par point et multidisciplinaire du rapport de la CIASE et des recommandations qu’il contient. L’analyse critique des huit signataires de ce texte inédit, révélé par La Croix le 25 novembre, est uniformément négative.

Les auteurs sont : Jean-Robert Armogathe, directeur de la revue de théologie Communio ; Philippe Capelle-Dumont, professeur de philosophie à la faculté de théologie de Strasbourg ; l’avocat Jean-Luc Chartier ; l’historien Jean-Dominique Durand ; la juriste Yvonne Flour ; le philosophe Pierre Manent ; Hugues Portelli, doyen de la faculté des sciences économiques et sociales de l’Institut catholique de Paris ; et Emmanuel Tawil, professeur à Paris-II. Ils remettent en cause la méthodologie qui a conduit la CIASE à identifier 330 000 personnes majeures aujourd’hui qui ont été agressées sexuellement par un prêtre, un religieux ou un laïc.

Aux résultats méthodologiquement imparfaits et contradictoires de la CIASE, les huit universitaires catholiques français opposent ceux obtenus par les chercheurs de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes qui, sur la base d’un examen des archives, ont identifié une fourchette comprise entre 4.832 et 27.803 victimes. Ces chiffres sont très éloignés des 330000 victimes revendiquées comme réelles par les médias du monde entier qui ne sont, selon les auteurs du document, certes pas le fruit d’une rigueur scientifique:

« Un goufre sépare le nombre des témoignages reçus par la CIASE (2738), le chiffrage des victimes relevées par l’étude de l’EPHE (Ecole Pratique des Hautes Etudes) diligentée par la CIASE (4832), l’extrapolation de cette même équipe de chercheurs qui atteint le chiffre maximum de 27803 [victimes] évaluées à partir des données recueillies par cette étude, et les estimations faites à partir d’un sondage conduit par l’IFOP, qui a permis à cet institut de sondages d’extrapoler au niveau de la population française adulte pour parvenir à plusieurs centaines de milliers de victimes, avec un chiffre de 216000 victimes de clercs, chiffre porté à 330000 victimes en y incluant les victimes de laïcs ».

Le calcul des résultats laisse lui aussi perplexe. « Le chiffre de 118 personnes qui affirment avoir été abusées par un prêtre, poursuit le rapport, donne un pourcentage de 0,42% et celui de 53 personnes qui affirment avoir été abusées par un laïc un pourcentage de 0,19%, des chiffres nettement inférieurs à ceux qui permettent une interprétation statistique et la marge d’erreur qui subsiste dans ce type d’enquête est supérieure aux résultats obtenus. Les chiffres présentés et jetés en pâture aux médias et au public ne résisteraient pas à une enquête plus approfondie ».

C’est ce qu’on peut lire à la page 2 du document rédigé par les huit universitaires français. Qui poursuit : « L’esprit qui prévaut dans l’analyse des causes et dans la formulation des recommandations, lit-on en page 3, apparaît comme un ‘a priori‘ idéologique… difficile de ne pas voir que de l’impartialité affichée, la CIASE est passé à l’hostilité envers l’Église. »

Le document évalue ensuite les aspects théologiques et exégétiques, mais analyse également le contexte philosophique et sociologique des années 1960 et 1970, l’esprit de la « révolution sexuelle » et les appels publics à la dépénalisation de la pédophilie (Foucault, De Beauvoir, Sartre, Althusser). La contestation de l’analyse juridique du rapport de la CIASE démolit et démontre définitivement l’absurdité de toute demande de responsabilité civile et pénale « collective » de l’Eglise, des évêques et des confesseurs, tout comme elle enlève tout fondement aux demandes de « compensation » par l’aliénation du patrimoine immobilier de l’Eglise française.

Il est difficile de ne pas être d’accord avec les conclusions du document des 8 universitaires catholiques français: « Un rapport de la CIASE qui n’est ni courageux ni justifiable, construit avec une méthodologie superficielle et contradictoire, de graves lacunes théologiques, philosophiques et juridiques et des recommandations très discutables » (pg.14 et 15).

Le président de la CIASE Jean-Marc Sauvé a réagi au document des huit universitaires catholiques le 27 novembre dans « La Croix », en déclarant sans vergogne que « rien dans ce document des universitaires ne contredit l’analyse de la CIASE ». La polémique se poursuit et le 29 novembre, alors que les rumeurs de démission de certains membres de l’Académie catholique de France vont bon train, un duel public s’ouvre dans  » La Croix  » entre le président des évêques de France, Éric de Moulins-Beaufort, qui définit le rapport CIASE comme sérieux, et le père Jean-Robert Armogathe, l’un des huit signataires, qui rappelle au contraire la nécessité de désacraliser le  » faible  » rapport de la CIASE et d’en avoir  » une lecture attentive, juste et critique « .

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