Antidotes préventifs (suite)

À la faveur de l'homonymie, on va assimiler le Pape François et saint François d'Assise, présenté comme le champion du "dialogue". Mais prêter à ce dernier des intentions irénistes est plus qu'un anachronisme historique: c'est une imposture (21/1/2019)


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Antidotes préventifs (AM Valli)

 
Il suffit de connaître un peu d'histoire, récente et moins récente, pour comprendre que le Pape, qui rencontrera le chef des musulmans du Maroc, ne s'inspirera pas de l'évangélisateur saint François d'Assise, mais bien plutôt de «l'esprit d'Assise»


Citons aussi à ce sujet les propos de Vittorio Messori (benoit-et-moi.fr/2012...):

En ce qui concerne un certain œcuménisme, entendu comme abandon ou démission, le "vrai" François n'en a que faire. Après la conversion, toute sa vie est marquée par l'anxiété non pas d'entretenir avec les musulmans un "dialogue" académique, mais de les "convertir" à Jésus-Christ. Il essaie à plusieurs reprises de se rendre en Orient avec l'intention expresse d'atteindre le martyre: il n'y allait donc pas pour y répandre des idées iréniques, mais pour prêcher l'Evangile de manière explicite au point de mériter la mort par les infidèles.

Le dialogue interreligieux et l'esprit de saint François


Cristina Siccardi
www.corrispondenzaromana.it
16 janvier 2019
Ma traduction

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Dans l'Église, le mensonge s'embrase et à travers lui, ce sont des objectifs contraires au christianisme, fondé par la seconde Personne de la Très Sainte Trinité, que l'on poursuit. Ces jours-ci, un logo vient l'illustrer: c'est celui qui rappelle le prochain voyage du Pape François au Maroc, un pays majoritairement musulman, du 30 au 31 mars prochain, avec la visite des villes de Rabat et Casablanca.

Il ne s'agira pas d'un pèlerinage ni même d'un voyage apostolique, mais bien plutôt d'un voyage interreligieux, qui sera fait pour «célébrer» le 800e anniversaire du voyage, seulement et exclusivement missionnaire, de saint François à Damiette. L'intention est claire: établir une fausse et trompeuse continuité d'intention entre le saint stigmatisé d'Assise et l'actuel Pontife de Rome.

Le logo, choisi parmi 50 esquisses d'artistes ayant participé à un concours, montre une croix stylisée et un croissant musulman, aux couleurs des deux États: vert et rouge pour le Maroc, jaune et blanc sur le fond pour le Vatican. En dessous, il est écrit: «Pape François - Serviteur d'espérance - Maroc 2019» et, à côté, 'Maroc' écrit en arabe.

S'adressant au Corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège le 7 janvier, le pape François a déclaré que le voyage aux Émirats arabes unis (3-5 février) et celui au Maroc seront «deux occasions importantes pour développer davantage le dialogue interreligieux et la compréhension mutuelle entre les fidèles des deux religions, en ce huitième centenaire de la rencontre historique entre saint François d'Assise et le Sultan al-Malik al-Kamil».

Il suffit de connaître un peu d'histoire, récente et moins récente, pour comprendre que le Pape, qui rencontrera le chef des musulmans du Maroc, ne s'inspirera pas de l'évangélisateur saint François d'Assise, mais bien plutôt de «l'esprit d'Assise» quand, le 27 octobre 1986, à l'initiative du Pape Jean-Paul II, eut lieu la rencontre mondiale interreligieuse, à laquelle prirent part les plus hauts représentants des églises chrétiennes, ainsi que soixante représentants d'autres religions. En lien avec cet événement, Jean-Paul II forgea, il y a plus de trente ans, le terme «esprit d'Assise».

L'«esprit d'Assise» caractérise aussi le Magistère de François, loin des enseignements et du témoignage fort et rigoureux de saint François, lequel «disait que rien ne doit prévaloir sur le salut des âmes, confirmant l'affirmation surtout avec cet argument: que le Fils unique de Dieu, pour les âmes, avait daigné monter sur la croix. De là, cet acharnement dans la prière, cette course pour prêcher partout, cet excès pour donner l'exemple. C'est pourquoi, chaque fois qu'on lui reprochait son austérité excessive, il répondait qu'il avait été donné comme exemple pour les autres» (Saint Bonaventure de Bagnoregio, Legenda Maggiore, chap. IX, §1168).

Voyons donc comment l'«esprit de saint François d'Assise» s'exprima dans ses voyages missionnaires chez les musulmans. L'Église de Rome, sous le pontificat d'Innocent III, se proclama Épouse unique et véritable du Christ et, en tant que telle, suprême et sainte, et, grâce à l'intervention de saint Dominique et de saint François, on reconnut son besoin de purification, par la pauvreté, le sacrifice, l'apostolat et la véritable évangélisation face à l'hérésie cathare qui sévissait en Europe. En septembre 1219, à Damiette, saint François rencontra le sultan d'Égypte, al-Malik al-Kamil, essayant, en vain, de porter le Christ en terre musulmane.

Il y était arrivé en août 1219, alors que la cinquième croisade était en cours depuis deux ans, pour libérer Jérusalem envahie par Saladin. François, avec Frère Illuminé, obtint du légat pontifical la permission de passer dans le camp sarrasin, de rencontrer le sultan lui-même pour lui prêcher l'Évangile, afin de le convertir ou d'obtenir qu'il se rendît. Mais l'entreprise fut infructueuse. Dans la biographie documentée de saint Bonaventure de Bagnoregio, datant du XIIIe siècle, nous lisons que le saint prêcha au sultan «avec grande fermeté et grande ferveur d'esprit, la vérité de Dieu unique et trinitaire et de Jésus Sauveur de tous».

Le biographe Thomas de Celano décrit très bien l'aspiration de saint François non seulement à l'évangélisation, mais aussi au martyre authentique: «La sixième année après sa conversion, brûlant d'une soif irrepressible de martyre, il décida d'aller en Syrie prêcher la foi et la pénitence aux Sarrasins», mais il y eut un naufrage; puis, la treizième année de sa conversion (advenue en 1205) «il n'eut de cesse de réaliser son rêve brûlant. (...) Il partit pour la Syrie, et tandis que de féroces batailles faisaient rage entre chrétiens et païens, emmenant avec lui un compagnon, il n'hésita pas à se présenter devant le Sultan.
Qui pourrait décrire l'assurance et le courage avec lesquels il se tint devant lui et lui parla, et la décision et l'éloquence avec lesquelles il répondit à ceux qui insultaient la loi chrétienne? Avant d'atteindre le Sultan, ses sicaires le saisirent, l'insultèrent, le rouèrent de coups, et lui n'eut peur de rien: ni menaces, ni tortures, ni mort; et bien qu'investi de la haine brutale de beaucoup, il fut accueilli par le Sultan avec de grands honneurs! Celui-ci l'entoura de faveurs royales et, lui offrant de nombreux dons, tenta de le convertir aux richesses du monde; mais, le voyant tout mépriser résolument comme de l'ordure, il en resta profondément stupéfait, et le considéra comme un homme différent de tous les autres. Il fut très touché par ses paroles et l'écouta très volontiers» (T. de Celano, Vita prima, ch. XX, §§ 418-422).

Le Sultan fut admiratif devant la ferveur d'esprit et la vertu du frère, il le pria donc de rester auprès de lui. Saint François répondit: «Si toi et ton peuple voulez vous convertir au Christ, je serai heureux de rester avec vous. Si, au contraire, vous hésitez à abandonner la loi de Mahomet pour la foi du Christ, donnez l'ordre d'allumer un feu aussi grand que possible: moi, avec tes prêtres, j'entrerai dans le feu et ainsi, au moins, tu pourras savoir en toute connaissance de cause quelle foi doit être considérée comme la plus certaine et la plus sainte». Mais le Sultan lui dit: "Je ne crois pas qu'aucun de mes prêtres veuille s'exposer au feu ou à la torture pour défendre sa foi". (En fait, il avait vu un de ses prêtres, célèbre et d'un âge avancé, disparaître immédiatement de sa vue dès qu'il eût entendu les paroles du défi)» (Bonaventure. de Bagnoregio, op. cit., chap. IX, § 1174).

Le Sultan ne releva pas le défi, mais lui offrit beaucoup de dons précieux, «mais l'homme de Dieu, avide non pas des choses du monde mais du salut des âmes, les méprisait toutes comme de la boue (...) voyant d'ailleurs qu'il ne faisait pas de progrès dans la conversion de ces peuples et qu'il ne pouvait réaliser son rêve, averti par une révélation divine, il retourna dans les pays chrétiens» (ibid., § 1174-1175).

Cette année-là encore, en 1219, Frère François organisa une expédition missionnaire audacieuse de ses frères parmi les musulmans. Berardo, Ottone, Pietro, Accursio, Adiuto furent choisis pour apporter la Bonne Nouvelle; les trois premiers étaient prêtres, les deux autres frères laïcs. Ils furent parmi les premiers à embrasser la vie de frères mineurs, mais ils furent aussi les proto-martyrs de l'Ordre franciscain. Leur oeuvre de prédication se déroula dans les mosquées de Séville, en Espagne.
Ils furent capturés, battus et emmenés devant le sultan Almohade Muhammad al-Nasir, dit Miramolino, puis transférés au Maroc avec l'ordre de ne plus prêcher au nom du Christ. Malgré cette interdiction, les cinq missionnaires continuèrent à répandre la Vérité et l'Evangile, et c'est pour cette raison qu'ils furent à nouveau emprisonnés. Après avoir été fouettés plusieurs fois, ils furent décapités sur les terres du Croissant le 16 janvier 1220. Leurs corps furent transférés à Coimbra.

Ce fut alors que Fernando Martins de Bulhões, qui avait précédemment connu les martyrs lors de leur passage au Portugal avant d'être dirigés vers le Maroc, prit la décision de rejoindre les Franciscains. Il devint Fra'Antonio, futur Saint Antoine de Padoue.
Le mensonge d'un saint François, précurseur du dialogue œcuménique et interreligieux, est une fake new. Toutes les sources historiques contemporaines de saint François, sans aucune interprétation, parlent de la volonté de Frère François de rencontrer les musulmans à plusieurs reprises «par soif de martyre».

Dante lui-même, proche des événements, écrit dans la Divine Comédie: «par la soif du martyre, en présence du Soudan [sultan] superbe il prêcha le Christ, lui et les autres qui le suivirent» (Paradis XI, 100-102). Le caractère dramatique de cet événement, qui n'était pas une promenade de plaisir, mais une expédition missionnaire, est admirablement représenté dans l'Epreuve du Feu de Giotto, onzième des vingt-huit scènes du cycle des fresques des Histoires de saint François dans la Basilique Supérieure d'Assise.


On y voit saint François inviter les chefs musulmans présents à la cour du sultan à entrer avec lui dans le feu - mais eux s'enfuient -, pour montrer que le Christ est le vrai Dieu, tandis que le dieu islamique est une imposture.

La prédication de saint François, s'adressant à tous (croyants, musulmans, hérétiques, païens...), a toujours été fondée sur le Dieu unique et trinitaire, sur la Vérité révélée, sur le Salut par la conversion, le baptême et la foi dans le Christ. Et son discours courageux était précis, fort, déterminé.

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