Cessez de nous prendre pour des imbéciles

Marco Tosatti interpelle directement le cardinal Ouellet. Un résumé des derniers développements de "l'affaire Vigano" à lire absolument si l'on veut ouvrir les yeux sur les mensonges du "Vatican Press Gang" (10/7/2018)

>>> Quand Ouellet marque contre son camp

OUELLET: NON-DITS, HYPOCRISIES ET OMISSIONS. ET DES CONFIRMATIONS. RECOUVERTS D'UNE FAROUCHE DÉVOTION COURTISANE.


www.marcotosatti.com
9 octobre 2018
Ma traduction

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Je crois que si à l'avenir le problème du cléricalisme, de l'hypocrisie, des prétextes et des omissions ecclésiales est étudié dans les universités, la lettre ouverte du cardinale Marc Ouellet figurera dans un manuel.

Pardonnez-moi si je reviens encore parler de la lettre ouverte du cardinal Marc Ouellet en réponse à la mise en cause de Mgr Viganò, mais mon caractère est fait de telle manière que les tentatives de me prendre pour un imbécile m'irritent au plus haut point. Je crois que cette catégorie inclut le message que quelqu'un - pauvre de nous ! - a qualifié de pierre tombale sur les charges de Viganò. Il me semble à moi que si c'est une pierre, elle est tombée lourdement sur les pieds de ceux qui l'ont écrit. Et, en passant, je note que deux documents sont jusqu'à présent sortis du Vatican pour répondre à l'ex-nonce apostolique, et les deux se sont avérés être des buts contre son camp. D'abord la note de la Secrétairerie d'Etat annonçant une enquête (faite par les mêmes organismes qui pourraient être reconnus coupables sur la base de l'enquête elle-même; qui ont en main les documents; et qui sont accusés de couverture jusqu'à présent; vous voyez comme ils sont dignes de confiance...); puis la tentative de Ouellet de démentir Viganò, sans succès malgré les fanfares avec lesquelles les journalistes qui puisent directement ou indirectement leur subsistance de l'Eglise ont essayé de faire passer ce qui est une évidente contre-vérité.


Ce n'est pas nous, les habituels antibergogliens, rigides pharisiens etc. qui le disons, mais le Wall Street Journal: «Le Vatican dénonce les accusations contre le Pape mais en confirme les points clés», titre-t-il, et juste en dessous: «Le Pape François est accusé d'être au courant à propos du cardinal aujourd'hui en disgrâce, et de l'avoir pourtant réhabilité à une position de haute influence».

Et un raisonnement similaire peut être trouvé dans de nombreux sites - peu d'Italiens, bien sûr, compte tenu de la soumission des collègues -, mais des Anglo-Saxons, comme le Catholic World Report.

Je crois que si un jour, on étudie dans les universités le problème du cléricalisme, de l'hypocrisie, des prétextes et des omissions ecclésiales, la lettre ouverte du cardinal Marc Ouellet figurera dans un manuel.

Mettons en lumière seulement quelques points.
Le point central est la conversation de Viganò avec le Pape le 23 juin 2013. Ouellet écrit:

«Venons-en aux faits. Tu dis avoir informé le Pape François le 23 juin 2013 sur le cas McCarrick lors de l’audience qu’il t’a concédée, de même qu’à tant d’autres représentants pontificaux qu’il a rencontrés alors pour la première fois. J’imagine la quantité énorme d’informations verbales ou écrites qu’il a dû alors recueillir sur beaucoup de personnes et de situations. Je doute fort que McCarrick l’intéressait au point où tu voudrais le faire croire, puisqu’il était un Archevêque émérite de 82 ans et sans office depuis sept ans».


Nous avons déjà écrit et nous continuerons à le faire, que c'est le Pontife qui a demandé au nonce: «McCarrick, comment est-il?» et après la réponse dévastatrice de Viganò («Saint Père, je ne sais pas si vous connaissez le cardinal McCarrick, mais si vous demandez à la Congrégation pour les évêques, il y a un dossier gros comme ça sur lui. Il a corrompu des générations de séminaristes et de prêtres et le Pape Benoît XVI l'a obligé à se retirer dans une vie de prière et de pénitence») le Pontife a changé de discours, sans faire un pli, ni témoigner de la moindre curiosité devant des accusations aussi dramatiques. Et Ouellet - ou peut-être le Pontife lui-même, de qui Ouellet a-t-il eu la permission d'écrire? - veut nous faire croire qu'une telle accusation lui est sortie de la tête? Mais arrêtez! Croyants peut-être, mais pas crédules, et pas idiots non plus. Et de toutes façons, on a vu juste après à quel point il se souciait de McCarrick. Comme l'a écrit l'un des commentateurs de Stilum Curiae:

«Quand le cardinal Ouellet prétend que le pape Bergoglio ne s'intéressait pas à un vieux cardinal privé de charge depuis sept ans, soit il a perdu la mémoire, soit il a perdu la tête. En fait, il suffit de se rappeler les missions que Bergoglio a confiées à McCarrick, entre 2013 et 2014: il s'est rendu en Chine, aux Philippines et en Arménie, c'est McCarrick qui a rendu possible le contact entre le cardinal cubain Ortega et Obama; en réalité McCarrick était l'homme clé dans tous les dossiers diplomatiques importants pour le Pape. Du reste, c'est McCarrick lui-même qui se vantait de sa longue amitié avec Bergoglio, qui remonte à l'époque où il était archevêque de Washington. Il y a des limites à se moquer des catholiques».


En outre, Ouellet affirme qu'il ne sait pas et qu'il doute que McCarrick était un conseiller du pape. Mais Rocco Palmo [qui tient le blog très connu whispersintheloggia.blogspot.com, ndt] a écrit en 2016 que McCarrick était un «héros» pour le Pape, et toujours Rocco Palmo donne en 2016 la nouvelle d'une lettre de McCarrick au Pape, pour faire nommer Joe Tobin à Newark. Tout comme Maradiaga et McCarrick proposaient Blase Cupich pour Chicago. Et ce n'est pas tout. Le National Catholic Reporter (journal progressiste américain) fait l'éloge du cardinal, «écarté par Benoît XVI» mais maintenant de retour à une nouvelle vie avec François. Et nous concluons ce chapitre avec cette vidéo de McCarrick en personne à l'Université Villanova [cf. benoit-et-moi.fr/2017], dans laquelle il parle de lui-même et du Pape. Éminence Ouellet, Bergoglio n'était pas intéressé? Mais à qui fera-t-on croire cela?

Ce revival (renaissance) a eu lieu immédiatement après l'élection, et au moment où, en théorie, McCarrick aurait dû être lié par les restrictions, les sanctions, les conditionnements ou peu importe comment vous voulez les appeler, imposés par Benoît XVI. En fait, il faut être reconnaissant à Ouellet parce qu'avec son invective courtisane, il a clarifié un point clé: McCarrick avait été puni par Benoît, même si souvent et volontiers, grâce à la complicité d'un autre de ses grands amis, Donald Wuerl, archevêque de Washington, de la même clique de McCarrick, il fuyait la vie de prière et de pénitence, sans apparitions publiques ni voyages, où Benoît l'avait confiné.

Dans les premiers jours qui ont suivi le témoignage de Viganò, le Bergoglio Press Gang s'est employé à jeter le doute sur le fait que Benoît XVI, faible et hélas trop têtu dans la défense des collaborateurs déloyaux, avait puni McCarrick. Ouellet fait justice de cette barrière de fumée.


On en vient à se demander: qui est crédible? Car si l'auteur du post pouvait légitimement exprimer des doutes, celui qui l'a retwitté, c'est-à-dire le Père Antonio Spadaro, SJ, spin doctor communicatif du Pape François, avait tous les moyens de connaître - et peut-être les connaissait-il - les mesures de Benoît. Alors pourquoi jouer sur le doute, ayant la possibilité de vérifier? Il me semble qu'il s'agit d'un cas de grande malhonnêteté intellectuelle, de nature à enlever toute crédibilité à ceux qui la pratiquent. Surtout si c'est un consacré.

Dans la lettre ouverte, Ouellet joue avec les mots; sanctions ou pas sanctions, écrites ou orales; il dit cependant les avoir communiquées au nonce Viganò. Il dit aussi ceci:

«La raison en est qu’on ne disposait pas alors, à la différence d’aujourd’hui, de preuves suffisantes de sa culpabilité présumée. D’où la position de la Congrégation, inspirée à la prudence, et les lettres de mon prédécesseur et de moi-même l’exhortant, par l’intermédiaire des Nonces Apostoliques Pietro Sambi et toi-même, à un style de vie discret de prière et pénitence pour son propre bien et celui de l’Église. Son cas aurait fait l’objet de nouvelles mesures disciplinaires si la Nonciature à Washington ou une quelconque autre source nous avait fourni des informations récentes et décisives sur son comportement. Je suis d’avis que, par respect des victimes et exigence de justice, la recherche en cours aux États-Unis et à la Curie romaine fournisse une analyse critique complète des procédures et des circonstances de ce cas douloureux afin d’éviter que cela se reproduise dans l’avenir».


Eh bien non, ne nous faisons pas avoir. S'il n'y avait pas eu une mesure de la justice américaine dûe à la dénonciation d'abus de mineurs il y a longtemps, l'Église, américaine ou non, n'aurait pas bougé du tout. Quant aux preuves: Ouellet sait que McCarrick fait l'objet de mesures, et lui, qui est à la tête de la Congrégation pour les évêques, il ne s'active pas en ouvrant une enquête? Bravo! C'est un comportement qui inspire confiance, pour le passé, pour le présent et pour l'avenir. Quant à une «quelconque autre source»: le rapport de Richard Sipe, dans lequel il disait connaître les noms d'au moins quatre prêtres ayant eu des relations homosexuelles avec McCarrick avait déjà été publié sur internet. Il y avait eu le rapport du père Gregory Littlelton, condamné pour abus, qui parlait du cardinal.... Et il y avait déjà eu le rapport du père Ramsey, également très clair dans les accusations. Pourquoi le Préfet de la Congrégation pour les Évêques n'a-t-il pas demandé une enquête? Il serait intéressant de le savoir.

Parce que le message que l'on peut déduire de tout cela est: tant que McCarrick sodomisait des séminaristes (majeurs, avec abus de pouvoir) et des jeunes prêtres, mais que voulez-vous que ce soit... des faiblesses humaines. En fait, comme l'a dit Maradiaga: des faits privés et des questions administratives. Mais dès que la justice laïque soulève le couvercle, juste ciel! C'est pourquoi, laisse entendre Ouellet, si vous dites au Pape qu'un cardinal se fait des prêtres et des séminaristes, il se peut qu'il oublie, une fois l'audience finie. Consolant, non? Cela inspire confiance en l'Église et en ses dirigeants.

Certains, à Rome - et Viganò cite les noms - n'ont pas tenu compte des avertissements et des avis. Par complicité, par intérêt (n'oublions pas que McCarrick a été un grand pourvoyeur de fonds jusqu'à la fin: il a été protagoniste de l'opération qui a apporté, parmi les protestations, les millions de dollars de la Papal Foundation à l'IDI à la demande du pape Bergoglio, [cf. Affaire McCarrick: la piste du fric] ou pour vivre tranquillement leur vie cléricale. Mais plus que des invectives, des réprimandes et des menaces, le Préfet des Évêques devrait donner des explications. Claires, s'il vous plaît, et sincères. Au moins celles-là. Dans l'attente qu'une réponse sincère arrive de plus haut, une fois épuisées les "doublures". A la question: est-il vrai que Viganò a averti le Pape le 23 juin 2013 de la nature criminelle de McCarrick, un oui ou un non suffit.

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